Autant vous le dire, c’est le deuxième billet que je fais sur cette très courte nouvelle parce que je viens de fermer accidentellement la fenêtre où j’avais écrit l’autre (bien évidemment sans enregistrer). L’idée c’était de continuer l’exploration des nouvelles de Poe par cette donc très courte nouvelle, cinq pages dans l’édition Bouquins (conseillé par une fan de Poe), intitulée Morella. Elle a été publié dans une première version aux États-Unis en 1835 et en France dans la traduction de Charles Baudelaire en 1853. Son sujet principal pourrait se résumer en la vie après la mort.
Ce prénom étrange de Morella est celui d’une feme qui a tous les savoirs. Il aurait été inspiré à l’auteur par Juliana Morella, petite fille née en 1595 en Catalogne et à l’érudition immense (je n’ai pas trouvé dans Wikipédia. Un sujet qu’ils n’ont pas traité, c’est assez exceptionnel.) Ici, Morella n’est pas une petite fille mais une femme, elle aussi pleine de savoir et qui se passionne pour les « écrits mystiques qui sont généralement considérés comme l’écume de la première littérature allemande« . Notre narrateur, anonyme, devient son ami puis son mari même si
mon âme, dès notre première rencontre, brûla de feux qu’elle n’avait jamais connus ; mais ces feux n’étaient point ceux d’Éros.
Le narrateur voue en réalité une sorte d’admiration sans borne et cherche à se familiariser avec le sujet d’étude de sa femme, les écrits mystiques. Au fur et à mesure de son étude, le narrateur et Morella en viennent à discuter essentiellement de ce sujet. En même temps, il n’arrive toujours pas à comprendre le « mystère » et la « nature » de sa femme ; ils agissent sur lui comme un « charme ». Le narrateur va de plus en plus abhorrer sa femme. L’ »attouchement de ses doigts pâles », « le timbre profond de sa parole musicale », « l’éclat de ses yeux mélancoliques » lui tapent sur le système ; il en vient à souhaiter la disparition de sa femme. Le pire c’est que Morella s’en rend compte. Alors, quand celle-ci meurt en donnant naissance à une petite fille, ces dernières paroles sont les suivantes :
Je répète que je vais mourir. Mais en moi est un gage de cette affection. Ah ! quelle mince affection que tu as éprouvée pour moi, Morella. Et quand mon esprit partira, l’enfant vivra, ton enfant, mon enfant à moi, Morella. Mais tes jours seront des jours plein de chagrin, de ce chagrin qui est la plus durable des impressions, comme le cyprès est le plus vivace des arbres. Car les heures de ton bonheur sont passées, et la joie ne se cueille pas deux fois dans une vie…
Le nouveau père va adorer son enfant. Cependant il va observer que de jour en jour, la petite fille va ressembler physiquement et intellectuellement de plus en plus à sa mère. Il va même jusqu’à la priver du regard des autres et surtout ne pas la nommer de peur de ce qui pourrait arriver. Parce que chez Poe, il n’y a rien de simple dans le fait qu’une fille ressemble à sa mère…
Dans l’édition Bouquins, on nous explique qu’un critique a vu dans cette nouvelle la vie de Poe. Morella serait la mère de Poe et la petite fille la femme de Poe, Virginia, dont il est tombé amoureux quand elle n’était encore qu’une enfant. Il y a des gens qui vont vraiment chercher très loin !
Mon avis pas forcément éclairé. J’ai été un peu déçue par cette nouvelle (même si la fin rattrappe le début) parce que elle m’a paru moins fouillée et plus brouillon, même si il y a tout un raisonnement qui oppose les gens qui croient en la vie après la mort et les autres, notamment Locke dont Poe détourne le raisonnement de manière habile. Je pense que j’ai eu cette impression parce que la nouvelle n’est pas situé dans l’espace ni dans le temps. Il n’y a donc pas l’impression d’horreur qui pourtant est si bonne dans d’autres de ses nouvelles.
En conclusion, il faut enregistrer ses billets au fur et à mesure.
Références
Morella (traduction de Charles Baudelaire) dans Contes-Essais-Poèmes de Edgar Allan POE (Bouquins, 1989)