Cecile's Blog

  • Andrew Lane a décidé de faire publier cette courte nouvelle où il utilise son héros récurrent, le jeune Sherlock Holmes.

    J’avais lu le tome 1 pendant l’été (il y en a quatre qui sont parus à ce jour) et comme je vous l’avais dit, le petit gars aurait pu s’appeler Sherlock ou Peter, on n’aurait pas vu la différence. Ce premier tome avait au moins le mérite d’avoir une histoire, une minuscule enquête. Les faiblesses étaient dues au fait qu’il fallait installer les personnages.

    Ici, Andrew Lane explique que cette nouvelle aurait du apparaître dans le tome 3 mais qu’il l’a supprimé car elle n’apportait rien. Il l’a ensuite remaniée pour qu’elle puisse se situer entre le tome 3 et le tome 4. Je vous rassure : cela n’apporte toujours rien (le niveau d’anglais est toujours aussi facile par contre).

    L’histoire est simple : Sherlock Holmes se fait enfermer à Bedlam, un asile de fou, et Sherlock Holmes réussit à s’échapper de Bedlam. Pourquoi et qui a voulu qu’il soit enfermer ? On ne nous le dira pas. Andrew Lane essaye de monter un pseudo mystère avec un fantôme. Même cela il ne l’exploite pas jusqu’au bout. Cependant, la seule chose un peu intéressante du livre est le raisonnement logique que fait Sherlock pour justifier que les fantômes ne peuvent exister.

    En gros, j’ai été déçue. Cela vient sûrement du fait que publier un chapitre de livre qui n’était pas assez bon pour rentrer dans un livre ne m’apparaît pas forcément comme judicieux.

    Références

    Young Sherlock Holmes – Bedlam de Andrew LANE (Macmillan Children’s Books, 2011)

  • J’ai le tort de laisser mon âme ouverte. Le vacarme que font les hommes la remplit et m’empêche d’entendre mon monologue intime.

    J’ai découvert l’existence de ce livre en écoutant l’autre jour à la radio la chronique de Jean-Louis Ezzine sur France Culture (en fait en podcast parce qu’à 6h50 cela exigerait que mes quelques neurones soient déjà réveillés). Il commençait sa chronique en citant la préface du livre (je vais vous en citer un peu plus tout de même pour que vous puissiez profiter aussi) :

    Au temps de Pascal, l’homme était un roseau pensant. Mais, pour les hommes d’aujourd’hui, l’obligation de penser est beaucoup moins impérieuse. Nos prédécesseurs ont pensé pour nous. Ils nous ont laissé un stock considérable de vocables prestigieux et d’opinions distinguées où nous trouvons tout ce qu’il faut pour composer des discours éloquents. Non seulement tout a été dit, mais, à notre époque, le patrimoine intellectuel de l’humanité est mis à la disposition de tout le monde ; et, en dépit de sa bêtise, Gustave, dont la mémoire est bonne, donne parfois à sa pensée inconsistante un vêtement de solides formules.

    D’autre part, très jeune, l’écolier apprend à « développer » des idées qu’il n’a pas encore. Plus tard, il saura traiter tous les sujets. Nous serions tous capables de préparer pour la semaine prochaine, dans une salle tranquille de la Bibliothèque cantonale, une conférences sur les mœurs des phoques ou sur les traditions religieuses dans l’Afghanistan.

    […]

    Je le répète : il reste quelques progrès à faire. La vie intellectuelle de l’humanité n’est pas encore définitivement réglée. Quelques-uns de nos contemporains, en dépit de toutes leurs lectures, continuent à pensoter. Avant de remettre à mon éditeur les morceaux qui composent ce recueil, j’ai tenu à les relire, car j’étais inquiet. Comme c’était à prévoir, j’y ai trouvé beaucoup d’idées qui, depuis longtemps, hélas ! sont complètement défraîchies. Mais, ça et là, j’ai reconnu avec émotion la palpitation du pensotement. C’est incontestable : je suis un roseau pensotant.

    Le lecteur ne s’en apercevra peut-être pas ; car aujourd’hui, ceux qui lisent pensotent aussi rarement que ceux qui écrivent. Il y a beaucoup de personnes qui lisent des pages entières en somnolant. Eh bien, que ces personnes le sachent : mon éditeur n’a pas l’habitude de rendre l’argent. Au lecteur mécontent qui n’aura trouvé dans mon livre aucun aliment sapide, je demanderai : « Aux endroits où je pensotais, pensotiez-vous aussi ? » Dans les phénomènes de télépathie sans fil, il importe que l’appareil récepteur soit réglé sur l’autre. Pour qu’un livre ait de l’efficacité, il faut que l’auteur et le lecteur pensotent simultanément. Cela dit, je ne crains plus aucune critique.

    Ceci dit, le livre d’Henri Roorda rassemble des chroniques qui sont parus dans des journaux suisses. Pour ceux qui aiment celles de Jean-Louis Ezzine, c’est à peu près dans le même genre. Il prend des situations de tous les jours, les observe, les décortique dans ce qu’elles peuvent avoir de cocasses, de stupides … ces situations le font penser et ils dits ce qu’ils en pensent mais pas comme vous et surtout moi pouvons le faire : avec humour, avec des bon mots, avec une grande acuité qui s’exprime dans une et une seule phrase bien dites. Il y a aussi pas mal de second degré. Les chroniques sont un genre à part entière mais quand c’est bien fait, je trouve que cela nous donne à réfléchir sur notre société, pas celle des évènements politiques ou internationaux mais celle de tous les jours, celle du réel. Ici, c’est le cas, on passe des gares, à l’enseignement, au choix de prénoms, aux gens bien intentionnés contre lesquels on ne peut pas se protéger …  Cela peut faire rire ou simplement sourire car on reconnaît des situations de tous les jours, des idées que l’on a eue. Je vous remets un extrait (où on voit tout le second degré du bonhomme) mais j’aurais pu tout citer.

     Je ne sais pas où nous allons ; mais mes méditations profondes m’ont permis de découvrir la cause du mal universel : tout va mal parce que les hommes ne veulent plus être pauvres.

    […]

    Puisque, sur notre triste planète, tout le monde ne peut pas être riche, il faut que les hommes de bonne volonté se dévouent et se décident fermement à rester pauvres jusqu’à leur mort. Pour l’Europe, soixante à quatre-vingt millions de familles laborieuses, pauvres et contentes de leur sort, suffiraient sans doute. Jusqu’à ce jour, la pauvreté n’a pas été assez honorée. Que les moralistes fassent désormais, infatigablement, des tournées de conférences dans tous les pays et prouvent à leurs auditeurs que la pauvreté est la première des vertus sociales. Le Pauvre n’est-il pas celui qui détruit le moins de bonnes choses ? Car celui-là fait œuvre de destruction qui avale une tranche de rosbif ou, simplement, cent grammes de fromage. Il y a évidemment des destructions nécessaires. C’est à toutes les destructions superflues que les Volontaires de la Pauvreté renonceront.

    J’ai la prétention d’être un Juste. Connaissant mes propres faiblesses, j’accorde aux autres le droit d’avoir des défauts. (Ils se passent, d’ailleurs, fort bien de mon autorisation.) Je ne vais pas exiger des Pauvres une abnégation totale. Je propose que, dans chaque pays, l’État leur distribue d’abondantes richesses fictives, telles que des diplômes ou des décorations. Les plaisirs de la vanité valent bien ceux de la table. Ils doivent même leur être préférés, si les hygiénistes disent vrai. Au bout de dix ans de persévérance joyeuse, le Pauvre conscient recevra une carte de bon citoyen, qu’il aura le droit de fixer à la porte de son appartement. Dix ans plus tard, s’il a bien « tenu », on lui donnera un premier accessit avec un petit bout de ruban rouge. Enfin, il ne méritera la Grande Corde de l’Ascétisme national qu’après quarante ans de civisme et de labeur acharné. Quant aux sybarites qui, à l’estime de leurs concitoyens, préféreront les filets de sole, le cinéma, les thés dansants et les épingles de cravate, ils ne seront jamais décorés. Et ce sera bien fait.

    Le livre a été édité une première fois et des gens s’en servent encore aujourd’hui … sans en avoir compris l’humour.

    En conclusion, je vous invite à lire la biographie de Henri Roorda sur wikipédia. Ce qui est triste c’est qu’il s’est suicidé alors que dans ses chroniques, il donne l’impression d’un homme tellement positif. C’est dit dans la postface et franchement, cela m’a fait un choc.

    Références

    Le Roseau Pensotant de Henri ROORDA – édition établie et postfacée par Éric Dussert (Mille et une nuits n°596, 2011)

    P.S. Je l’ai lu en version électronique mais comme il me plaisait trop et que je voulais le garder dans ma bibliothèque, je l’ai acheté en version papier en même temps qu’un deuxième volume qui est aussi sorti chez Mille et une nuits Le Rire et les Rieurs, suivi de Mon Suicide (c’est là qu’il explique le geste par lequel il a mis fin à sa vie)(bien sûr c’est paru à titre posthume). À noter : en janvier, les éditions Mille et une nuits vont faire paraître deux autres volumes : Le pédagogue n’aime pas les enfants et Miettes d’anarchie, suivi de Le Débourrage des crânes est-il possible ? et de Mon internationalisme sentimental.

  • (Il est évident que j’ai choisi ce titre pour murder, moor et la couverture en tartan.)

    Un de mes grands talents est de découvrir les séries par le milieu. À lire les autres blogs, c’est un talent que je partage avec beaucoup de lectrices. Ici, j’ai fait encore pire puisque j’ai commencé par le quatrième tome et dernier paru de la série.

    C.S. Challinor est américaine. Elle est née dans l’Indiana et habite actuellement en Floride. Par on ne sait trop quel miracle, elle a été à l’école (apparemment cela se situe après le bas) en Angleterre et en Écosse. Elle a des diplômes en latin et en français de l’ »University of Kent, Canterbury » et a même un diplôme de russe, qu’elle a obtenu à l’Institut Pouchkine de Moscou. Je ne sais pas trop pourquoi l’éditeur nous précise tout cela parce que franchement cela n’a rien à voir avec la choucroute. Il aurait écrit « elle a vécu en Écosse pendant ses études », cela m’aurait amplement suffit.

    Le personnage principal de la série de C.S. Challinor est Rex Graves. Il est visiblement comme un procureur de la Haute Cour de Justice d’Édimbourg. Il est veuf et a rencontré dans un des tomes précédents une jeune femme qui s’appelle Helen. Il vient de lui acheter un manoir (une très grosse maison que je n’hésiterais pas à appeler château si j’étais elle) où elle a son propre lac (un où il y a un monstre, comme dans le Loch Ness). Même qu’à la fin, il offrira une bague à son amoureuse. C’est mon résumé de la situation mais C.S. Challinor dit que le château est à Rex et qu’il l’a acheté pour vivre en paix son amour avec Helen car à Édimbourg, il vit avec sa mère. Ce qu’il faut retenir c’est que la demeure est isolée, qu’elle est reliée au monde par un chemin de terre qui devient chemin de boue en temps de pluie et que les habitants du village d’à côté sont farouches.

    Tout cela n’aide pas, surtout quand on pend sa crémaillère comme Monsieur Graves. Il invite des gens qui ne sont pas ses amis et qu’il n’aime visiblement pas trop (?????) En plus, il y a une de ses ex, Moira, qui arrive à l’improviste chez lui, après des années de silence. Ils boivent pendant que dehors, le temps est des plus humides. Ils ne peuvent donc repartir après la soirée et Rex est obligé d’héberger tout le monde. Il y a des disputes, des chuchotements, des tensions … À cela s’ajoute, un tueur d’enfants qui rodent sur la lande. L’ambiance est donc angoissante. Au matin, tout le monde est vivant sauf Moira, qui est retrouvée au milieu du lac d’Helen. Les pneus des voitures sont lacérés, le téléphone coupé, les téléphones portables ont disparu. La salle de bain de Rex est inondée (le pauvre, il a déjà mis une fortune pour tout rénover). Les journaux télévisés annoncent que le tueur d’enfants a fait une nouvelle petite victime. La police est donc débordée et Rex va être obligé de tout régler tout seul (apparemment c’est comme d’habitude et en plus il arrive).

    Au moment de la lecture, c’est un roman très sympa à lire (et franchement, j’ai bien envie de lire les trois premiers, en sachant que le cinquième sort en mars). On ne s’ennuie pas et on cherche le coupable avec Rex. C.S. Challinor ménage son suspens et opère beaucoup de retournements de situations. Elle nous fait partager en grande partie les déductions de son enquêteur. En faisant le résumé, on se rend facilement compte que C.S. Challinor a plaqué en Écosse les codes du film américain du début d’après-midi, avec tout ce que cela implique de clichés et de bien-pensance. Ce qui sauve le tout finalement et qui rend le livre à peu près crédible, ce sont le personnage principal et les personnages secondaires qui sont incarnés (il n’y a qu’Helen que j’ai trouvé fade et trop en retrait par rapport à Rex ; ils font un bourgeon d’équipe dans la vie mais pas dans les enquêtes (un peu comme Barnaby et sa femme)). Pour un quatrième tome, cela manque peut être d’installations et d’innovation (trop classique pour ce début de 21ième siècle).

    Comme je disais, c’est une lecture détente et parfois c’est agréable !

    Références

    Murder on the Moor de C.S. CHALLINOR (Midnight Ink Books, 2011)

  • Présentation de l’éditeur

    Tyreelin, un village à la frontière irlandaise. Patrick est le fils illégitime du curé local. Très jeune, il commence à se travestir et se fait appeler Pussy. À la mort de son amant et protecteur, un politicien victime du conflit irlandais, Pussy part à la recherche de sa mère dans le swinging London des années 1970. Mais sur la capitale anglaise aussi plane la menace du terrorisme, et Pussy, bien malgré elle, va se retrouver mêlée à un attentat à la bombe dans une discothèque… Un récit drôle et flamboyant, où la violence et la misère côtoient les paillettes et le glamour.

    Mon avis

    L’avis d’Ys m’avait donné envie de découvrir le livre mais je n’étais pas sûr qu’il me plairait car ce n’est pas franchement le type de livre que j’aime (c’est plus par préjugés et méconnaissance). Mais maintenant, j’ai un reader et les éditions Asphalte proposent leur livre en version numérique pour pas cher. 16 euros pour un livre que je n’étais pas sûr d’aimer, bof mais le même livre pour 6,99 euros, je veux bien tenter (même chez Gibert en occasion, je pense pas que je l’aurais trouver pour moins cher). Le seul truc, c’est que parfois les mots étaient attachés alors que cela n’aurait pas du être le cas (c’est dix-quinze fois dans le livre, faut pas non plus exagérer).

    J’ai beaucoup, beaucoup aimé. Après avoir lu d’autres avis, j’ai pensé que je devais être bizarre parce que le peps, je ne l’ai vu qu’au début. Pussy est une personne extrêmement déterminée. Elle ne donne pas l’impression de souffrir des quolibets des habitants de son super village. On a l’impression que finalement, elle est plus ou moins la seule à tracer sa route sans se soucier de son environnement. C’est l’humour de Patrick McCabe qui donne le peps à tout le début de l’histoire (cela ressemble à une histoire d’adolescent qui essaye de se construire, la guerre, l’IRA, ce n’est qu’arrière plan. Pussy ne s’en soucie pas du tout. La musique est omniprésente comme je peux me l’imaginer d’une adolescence des années 70). On sourit beaucoup.

    Puis au fur et à mesure, mon sentiment à la lecture a changé. Pussy a des blessures : son père qui ne la reconnaît pas (en tant que fille ou garçon d’ailleurs), sa mère qui l’abandonne. Tout cela revient comme un leitmotiv dans le livre. Ce qui progresse dans le livre, c’est aussi la politique. L’impression que j’ai eu, c’est que tout s’effondre autour de Pussy mais que c’est la seule à s’en rendre compte. Les gens autour d’elle sombrent dans la pauvreté, la misère, l’alcool, l’imbécilité (que ce soit à Londres ou en Irlande) et perdent leur fierté (pour les Irlandais). Pussy se montre la plus clairvoyante et cherche à faire comprendre ce qui se passe. Personne ne l’écoute parce que justement elle est différente. À la fin, je n’ai plus ressenti le peps du début mais j’ai plus vu la solitude et l’amertume.

    Ce qui est intéressant, c’est que Patrick McCabe est constant dans la manière dont il fait parler Pussy (cela ne peut pas plaire à tout le monde par contre). Il y a un mélange de naïveté enfantine, d’adolescent adulte, de clairvoyance comme je l’ai dit, de situations rêvées. Il ne se contente pas de faire une narration linéaire mais va chercher à faire parler tout ce que peut contenir son personnage. C’est justement ce qui donne cette impression que Pussy est une vraie personne et pas quelque chose de creux, sans épaisseur comme on dit.

    Le livre a été adapté par Neil Jordan au cinéma en 2005. Son autre livre traduit en français The Butcher Boy est d’ores et déjà dans ma PAL.

    Edit : les erreurs dans le fichier ont été corrigées, avec une célérité incroyable, par la société qui l’édite. J’ai été mauvaise langue car il y en avait sept. Maintenant, il n’y en a plus. Il ne faut donc plus hésiter à vous achetez le livre si vous avez une liseuse (sinon il faut acheter ou au moins lire le livre).

    D’autres avis

    Ceux de Ys (c’est le billet qui a fait que je voulais découvrir le livre), d’Yvon, de Nina,d’Achille, de Nymeria, d’Angélita, de Pierre Faverolle, de Mélopée, de Mikaël Demets, d’Oncle Paul, d’Eden, …

    Références

    Breakfast on Pluto de Patrick McCABE – traduit de l’anglais (Irlande) par Audrey Coussy (éditions Asphalte, 2011).

    Sur le site de l’éditeur, vous pouvez retrouver la playlist du livre (c’est un peu la marque de fabrique tout de même).

  • Quatrième de couverture

    Condamnée par sa maladie, Constance Keating a fait un choix simple et décisif, celui de mourir à son rythme, loin de la sollicitude pesante de sa famille et des vains prolongements que peut offrir un temps la science.

    Bravant son Irlande pieuse et traditionnelle, elle confiera sa fille au père de celle-ci, un écrivain rencontré par hasard lors d’un séjour en Italie, un Juif d’origine polonaise, qui n’avait jamais appris cette paternité.

    Une nouvelle fois Jennifer Johnston fait du roman une arme de libération au service des femmes, dans le contexte si symbolique de l’Irlande.

    Mon avis

    J’aime d’amour Jennifer Johnston (à part pour son dernier roman paru en France) parce qu’à chaque fois, elle me touche, elle me met les larmes aux yeux (j’ai un côté parfois maso). C’est ce qui nous plaisait, à ma mère et à moi, dans la littérature irlandaise. Bien sûr, il ne faut pas lire ces romans quand on est vraiment trop déprimé (quoique je suis en train de lire Breakfast on Pluto de Patrick McCabe et c’est triste mais réjouissant à la fois, plein de pèche).

    Donc encore une fois, elle m’a mis les larmes aux yeux. C’est une femme, quarante-cinq ans, mais aussi une jeune maman, qui se meurt d’une leucémie et qui a décidé de mourir sans que la médecine ait rien décidé là-dedans. C’est donc une femme avec un caractère particulier, un caractère libre et courageux. C’est ce côté libre qui a dirigé toute sa vie. Elle a abandonné ses études pour se débrouiller toute seule et suivre sa voie à Londres (elle n’a pas réussi car elle voulait de venir écrivain). Elle a fait un bébé toute seule. L’impression que cela m’a fait, c’est qu’elle n’a jamais réussi à vivre complètement. On lui dit qu’elle a un petit talent pour l’écriture et elle arrête. Avec le père de l’enfant, c’était le grand amour et elle le quitte une fois qu’elle est enceinte. Finalement, mourir elle ne pourra pas arrêter, même si elle le décide, avant d’avoir réussi. C’est comme si enfin elle arrive au bout de quelque chose.

    Jennifer Johnston alterne les périodes de souvenir et les moments de maladie. Au fur et à mesure que le mal avance, cela devient plus confus ou plus mêlé (on est censé suivre le rythme des pensées de Constance car c’est le livre qu’elle écrit pour après sa mort. Par définition, elle ne le finira pas.)

    La seule chose qui m’a dérangé c’est les changements de mode de narration. Dans le même paragraphe, où Constance parle, on a une alternance entre le je et le elle. Est-ce que le problème vient de la traduction ? Je n’en sais rien.

    Par contre, je retire ce que j’ai dit dans le précédent billet. Cela ne ressemble pas tellement à Hella S. Haasse à part pour le côté un peu nostalgique.

    Références

    Un Noël blanc de Jennifer JOHNSTON – traduit de l’anglais (Irlande) par Arlette Stroumza (Le serpent à plumes / collection Motifs, 2003)

  • J’ai choisi de lire ce livre parce que … trivialement il coutait 2$69, je ne connaissais pas l’auteur et la couverture était kitch. J’ai découvert ce titre en suivant le conseil du bas de la page relative à Murder in the Library dont je vous ai déjà parlé. J’ai bien fait car ce livre m’a énormément plu et ce pour deux raisons.

    C’est un roman policier des plus classiques puisqu’il s’agit d’un mystère en chambre close. Il faut savoir que l’auteur préféré de John Russell Fearn était John Dickson Carr. Ceci explique cela.

    L’histoire est assez simple. Un jeune ingénieur en électronique veut épouser la fille d’un riche magnat, le fameux Hammond, qui a fait fortune dans le transport. Après 4 mois d’idylle, il demande la main de la jeune fille à son père. Celui-ci refuse alors qu’il avait semblé d’accord au premier abord. Quand sa fille demande une explication, il lui explique que l’ingénieur est un coureur de dot puisqu’il a demandé 2 millions de livres (c’est un auteur américain qui situe ses mystères à Londres). La jeune fille courre après son prétendant et lui demande une explication. Celui-ci lui promet de lui écrire. Et en effet, elle reçoit une lettre le lendemain lui demandant de se rendre à un rendez-vous secret à 19h30 (l’heure est très importante dans le livre). Bien sûr, elle ne doit rien dire à son père. Elle ne prend donc pas sa voiture mais se propose d’y aller à pied. Elle fait le coup de l’héritière rebelle mais quand un taxi passe, elle le prend. Tout cela l’a fait partir bien avance de chez elle.

    Quand elle arrive, elle voit son amoureux partir en voiture précipitamment. Le quartier est glauque et abandonné. La maison est très peu éclairée et semble sans vie. Elle frappe à la porte. Un majordome lui répond. Son amoureux est inconnu au bataillon. Le majordome lui claque la porte au nez. La voilà partie demandé des comptes à l’amoureux au lieu où celui-ci habite. Mais entre temps, le père a reconstitué la lettre qui devait lui être cachée (l’héritière est un peu cruche : on lui demande de détruire une lettre et elle se contente de la déchirer en quelques morceaux et de la jeter à la poubelle de sa chambre). À 19h40, il arrive devant la maison glauque mais lui on le laisse rentrer. À 19h50, on retrouve son corps avec tous les os cassés, les organes internes en vrac à exactement 5 miles de là ! (8km pour les gens comme moi)(tout cela en sachant que le roman a été écrit en 1951 et que l’intrigue est contemporaine). La police reconstitue rapidement les derniers déplacements de la victime puisque il était sous surveillance car il avait reçu des lettres de menace. Ils se retrouvent dans la maison glauque : les sols sont couverts d’une épaisse couche de poussière laissant penser que la maison est inhabitée depuis de longues années, il n’y a aucune ampoule dans la maison, il n’y a pas de rideaux … La première chose que je me suis dite est que les coupables étaient des gens bien stupides car ils avaient inventé une machine qui met de la poussière partout et uniformément. Je croyais que le but était de l’enlever. Comme je suis fan de ce type de roman policier, cela m’aurait déjà amplement suffit.

    Le livre est sous-titré par l’éditeur « a scientific novel ». Il faut voir que John Russell Fearn est à la base écrivain de science fiction, dans le sens le plus premier du terme, et est très connu pour cela. Il reprend ici une peur de l’époque pour une technologie émergente : l’électronique (et aussi les recherches sur les atomes, électrons …) et un thème toujours d’actualité : la transmutation des objets. C’est très intéressant car il montre l’incompréhension des non-scientifiques et le fossé qui se creuse avec les scientifiques. Il y a aussi la peur du savant fou, de l’invention qui échappe à tout contrôle. Il ne dévie que très peu de la réalité (c’est un tout petit peu de science fiction donc).

    Le prochain livre que je lirais de cet auteur est sans doute The Crimson Rambler qui annoncé comme étant dans la veine des romans de John Dickson Carr (et là sous-titré « a crime novel »). J’ai oublié qu’ici il y a le personnage du Dr. Carruthers qui est le scientifique tout puissant qui dirige le monde des sciences mais explique aussi aux profanes que sont les policiers. C’est je crois le point où l’auteur s’est le plus inspiré de John Dickson Carr.

    Références

    What happened to Hammond ? de John Russell FEARN (Wildside Press, 2006)

  • Quatrième de couverture

    Après avoir vécu près d’un demi-siècle à l’étranger, deux sœurs retournent passer un été dans leur maison natale, aux abords d’Amsterdam, avant de la vendre. Épouse de diplomate, Félicia a vieilli dans l’enceinte des ambassades pendant que Nina partageait la vie de bohème d’un guitariste sud-américain. Leurs difficiles retrouvailles ont lieu sous l’avide regard des habitants du quartier, dont elles vont à leur insu bouleverser l’existence.

    Puisant sa singularité dans une poésie de l’étrange qui laisse la part belle à la rumeur, au rêve, au fantasme ou au cauchemar, ce roman se clôt sur un constant douloureux : on ne peut rien changer à son passé, et si peu à son destin.

    Mon avis

    J’ai trouvé que l’atmosphère de ce livre était la même que dans Un long week-end dans les Ardennes : oppressante. Il n’y a pas l’isolement mais presque. Malgré le voisinage. C’est justement ce voisinage qui rend le roman oppressant. Hella S. Haasse a adopté une narration en deux temps. Il y a la partie classique avec l’alternance des points de vue des protagonistes et la partie où c’est une personne du voisinage qui intervient pour faire avancer l’histoire mais aussi pour décrire le sentiment des voisins sur l’histoire. Il y a le côté bienpensance, le côté commérage, le côté scrutateur … Exactement comme la narratrice dans la série Desperate Housewives. Cette voix qui sort de nulle part mais qui juge.

    Ce n’est pas la seule chose qui m’a fait penser à cette série. Le roman se concentre sur des destins de femmes, de femmes volontaires ou qui vont le devenir. Les hommes de manière générale vont plutôt subir les décisions. Il y a les deux sœurs, une veuve de diplomate, plus que classique mais qui n’a pourtant pas connu le bonheur malgré les apparences, l’autre qui est veuve d’un guitariste argentin. Elle, elle a connu le bonheur mais aussi le malheur puisqu’elle a subit les dictatures argentines. Elle ne s’est cependant jamais tue ; elle s’est toujours révoltée. C’est la personne qui est la plus proche d’une vie réussie, ou en tout cas, d’une vie vécue de tout le roman. Il y a les deux voisines des deux sœurs : une Bree Van de Kamp, petite fille malheureuse qui a réussi à s’en sortir en apparence en tout cas et qui tient sa maison de main de maître, et Wanda, petite bonne femme qui ne sait pas qui elle est, à part la femme d’un mari trop gentil, trop prévenant, trop étouffant.

    Ce qui est intéressant dans le roman, c’est que Hella S. Haasse ne parle pas de cela. Elle focalise sur l’histoire de Nina et de l’Argentine. On a l’impression tout au long du roman que c’est le thème principal mais en fait non. Alors quand le roman se termine, on est frustrée car l’auteure n’a pas été à fond dans ce thème là. C’est comme si l’auteure nous forçait à regarder d’un côte tout en voulant nous montrer autre chose. Dans le même genre, le fils du guitariste revient voir sa belle-mère. Wanda disparaît. Hella Haasse sous-entend un lien qu’elle laisse en suspend (elle reprend un peu cette idée à la fin mais elle ne conclut pas). C’est étrange comme manière de procéder.

    Finalement, je dirais, au niveau du ressenti, que les romans de Hella S. Haasse me font penser aux meilleurs de Jennifer Johnston (cela tombe bien parce que j’en ai deux dans ma PAL).

    D’autres avis

    Ceux de Claudialucia, de Malo, de Schlabaya

    Références

    Des nouvelles de la maison bleue de Hella S. HAASSE – roman traduit du néerlandais par Annie Kroon (Actes Sud / Babel, 2004)

  • Ce livre traînait depuis longtemps dans ma PAL. Il n’y a pas que lui qui y traîne d’ailleurs. Même si il est à moi depuis longtemps, je me rappelle très bien pourquoi je l’ai acheté. Parce qu’il y avait le mot Ardennes dans le titre (cela me fait rêver depuis que je suis petite car on allait en vacances en Champagne avec notre guide vert Champagne Ardennes or ma mère trouvait que les Ardennes c’était loin pour notre vieille voiture). Eut un temps où je croyais que les Ardennes, cela s’arrêtaient à la France (j’étais jeune et influençable au moment de Tchernobyl alors moi, ces histoires de frontières, j’y croyais dur comme fer). Puis j’ai lu et quelle a été ma surprise de découvrir qu’il y avait des Ardennes en Belgique et au Luxembourg. Figurez-vous que même la Meuse coule ailleurs qu’en France. Je l’ai découvert en lisant Renate Dorrestein. Après avoir découvert que je suis une cruche en géographie et qu’il ne me faut pas grand chose pour rêver, passons aux choses sérieuses.

    J’ai sorti le livre de ma PAL car il était devant moi et que cette dame est morte cette année (j’avais deux livres d’elle dans ma PAL en plus).

    Quatrième de couverture

    La grande pianiste Edith Waldschade aime les loups et en élève trois, en dépit des légendes effrayantes que lui racontait son père quand elle était enfant. Solitaire et taciturne, elle respecte ces animaux pour leur beauté et leur intelligence tandis que son père révérait en eux la bête souveraine de la mythologie nordique.

    Dans sa propriété cernée de sapins surgit un jour l’inquiétant Erwin, qui prétend être son demi-frère. Que veut-il ? Que sait-il ? Le mystérieux passé familial dont il semble être le dépositaire mêle superstitions et peurs ancestrales à une histoire plus récente, celle de l’Europe brune des années 1930-1940.

    Mon avis

    Ce roman m’a plu, même énormément malgré ce qui va suivre.

    Il y a une multitude de thèmes qui est abordé mais il n’y a aucune conclusion. Il y a la mythologie nordique abordée avec le prisme de justification à l’idéologie nazie. En parallèle, il y a l’image du loup dans cette même mythologie. Il y a le rôle du loup, celui de la musique, celui d’un couple multi-ethnique, l’amour, les relations familiales, le rôle du journaliste, les sectes, l’immigration. Tout est mêlé avec brio et intelligence mais il n’y a pas de conclusion. Ou si la conclusion est que la vie est faite de coïncidences et de hasard et que tout cela peut jouer même longtemps après.

    Le livre tient sur son atmosphère si particulière proche du film Festen. D’ailleurs, une grande partie de l’action se déroule sur un « long week-end ». Il y a cette idée de regrouper des personnages dans un même lieu (Agatha Christie le faisait avant mais elle faisait mourir ses personnages). Il y a la même ambiance mystérieuse, hystérique, suspicieuse, le même côté secret de famille. Puis il y a le déclencheur aussi.

    L’écriture de Hella S. Haasse est particulière car elle change suivant les personnages. Pour certains, il va y avoir une narration classique ; le temps utilisé est le passé. Pour la pianiste, quand un dialogue intervient avec Erwin, le soi-disant demi-frère, le temps est le présent, les gestes sont entre parenthèses. Cela donne l’impression qu’elle parle avec une sorte de Dieu tutélaire ou avec un côté de sa mémoire qu’elle n’ose pas se rappeler. Toutes ces scènes ont un côté très envoûtant.

    Bien sûr, il y a aussi l’envoûtement du paysage, sombre et stoïque à souhait ; les loups qui rodent autour de cette maison de malheur et de haine. Quand j’y réfléchis bien, je crois que le style froid de Hella S. Haasse renforce tout cela. La pianiste va pleurer, sa nièce va se montrer hystérique et pourtant leurs comportements semblent toujours déplacés même si  ils sont justifiés (avec un climat de tension pareil, on les comprend).

    Je crois que j’ai aimé ce roman car Hella S. Haasse a su créer un univers en y apportant sa voix. Elle sait y emmener son lecteur. En tout cas, elle m’a emporté dans cette famille et cette maison comme Festen m’avait emporté.

    D’autre avis

    Ceux de Saphoo, de Malice et de Claudialucia.

    Références

    Un long week-end dans les Ardennes de Hella S. HAASSE – roman traduit du néerlandais par Annie Kroon (Actes Sud / Babel, 2006)

  • Parce que parfois je n’ai pas envie de faire de billets sur tout un livre. Parce que parfois j’ai juste envie de vous faire connaître un mot qui m’a fait rire, un mot qui m’a touché.

    Je parais familier mais je suis un parfait étranger que l’on confond avec ses moi antérieurs. Je suis un étranger et je me déplace. Je me déplace sur deux jambes et bientôt à quatre pattes. Je ne suis plus animal végétal ou minéral. Je ne suis plus constitué de circuits ou de disques. Je ne suis plus codé ou déchiffré. Je ne suis que vide et futilité. Je suis un étranger vide, la copie carbone de ma forme. Je ne peux plus trouver ce que je cherche en dehors de moi-même. Cela n’existe pas au-dehors. Ce n’est peut-être qu’ici, dans ma tête. Mais ma tête est de verre et mes yeux ont cessé d’être des caméras, la cassette est terminée et personne ne peut prononcer de parole qui me touche. Aucun geste ne peut me toucher. Tombé d’un autre monde j’ai atterri là-dedans et je n’arrive plus à parler votre langue. Voyez les signes que je tente de faire avec mes mains et mes doigts. Voyez les vagues mouvements de mes lèvres dans les draps. Je suis une tache blanche dans une civilisation effrénée. Je suis une traînée sombre dans l’atmosphère qui se dissipe sans prévenir. J’ai l’impression d’être une vitre, peut-être une vitre brisée. Je suis un homme de verre. Je suis un homme de verre qui disparaît dans la pluie. Posté parmi vous j’agite mes bras et mes mains invisibles. Je crie mes mots invisibles. Je deviens de plus en plus las. Je suis de plus en plus fatigué. Je vous fais des signes d’où je suis. Je rampe ici et là car je cherche la trouée vers le vide total et ultime. Dans mon isolement je vibre parmi vous. Je hurle mais les cris sortent comme des morceaux de glace pure. Je fais signe que le volume est trop fort. J’agite les bras. J’agite les mains. Je disparais. Je disparais mais pas assez vite.

    Références

    Spirale de David WOJNAROWICZ – traduit de l’anglais (États-Unis) par Laurence Viallet (Éditions Laurence Viallet, 2011)

  • Quatrième de couverture

    1862 : début des grandes réformes en Russie, qui annoncent une tentative de libéralisation du régime. Désireux de prouver sa largeur d’esprit, alors fort à la mode, un grand chef de l’administration s’invite à la noce d’un modeste fonctionnaire. La série de catastrophes découlant de cette très mauvaise idée est l’occasion d’une farce irrésistible qui, par son impertinence caustique, annonce déjà la révolution.

    Un extrait

    Où Dostoiëvski parle d’un petit fonctionnaire de Saint-Pétersbourg :

    C’était un homme aussi doux qu’un poulet, de la trempe la plus ancienne, élevé au larbinisme, et, néanmoins, un homme bon et même noble. C’était un Russe de Pétersbourg, c’est-à-dire que son père et le père de son père étaient nés, avaient grandi et avaient servi à Pétersbourg, et qu’ils n’étaient jamais sortis de Pétersbourg. C’est là un type de Russes absolument particulier. Ils n’ont quasiment pas la moindre idée de la Russie, ce qui ne les dérange pas du tout. Tout leur intérêt se limite à Pétersbourg, et surtout, au lieu de leur service. Tous leurs soucis sont concentrés sur leur whist à deux sous, leur petite boutique et leur traitement mensuel. Ils ne connaissent aucune coutume russe, aucune chanson russe, sinon « Loutchinouchka… », et encore, seulement parce qu’elle est jouée à l’orgue de barbarie. [p. 55]

    Une citation

    Mais comment donc ? Tout à l’heure, ils reculaient, et, d’un seul coup, si vite, ils s’émancipent ! On pouvait croire que ça allait, mais ce passage, il était comme un peu étrange : il augurait quelque chose. Comme s’ils avaient complètement oublié que lui, Ivan Ilitch, il existait sur terre. [p. 58]

    Mon avis

    J’ai trouvé l’histoire intéressante mais cela manquait de contextualisation. La seule indication que l’on a pour comprendre les enjeux, c’est la phrase de la quatrième de couverture, genre on est tous des spécialistes de la Russie du XIXième siècle. De 1855 à 1881 a régné en Russie le tsar Alexandre II. Ce fut visiblement le tsar qui entama toutes les réformes même si certaines furent limitées ou pas appliquées. 1862, c’est aussi la période des insurrections polonaises. Ce règne est aussi le temps des Nihilistes. Je suis en train de lire le livre de Nicolaï Tchernychevski où dans la préface on nous parle des troubles estudiantins de 1862 … sans rien dire de plus (mais j’ai un livre dans ma PAL sur la Russie de cette époque, ne vous inquiétez pas). Or, le texte s’inscrit visiblement dans  un contexte (j’ai été influencée par la lecture de Nabokov qui dit que Dostoïevski écrit des romans à suspens mais n’arrive pas à créer son univers)(Nabokov n’aime pas Dostoïevski, en tout cas le juge mineur). Ici, à l’interprétation de mes faibles connaissances, j’ai plutôt cherché à voir ce qu’il annonçait de la Révolution. Il n’y a vraiment que la citation et forcément cela déçoit.

    Ce que l’on peut comprendre c’est que la Russie de l’époque était très hiérarchisée, qu’il y avait un respect supposé inné par les classes supérieures. Dans cette période de réformes, un général décide d’assister au mariage d’un de ses subordonnés (mais très en dessous), pour montrer son « humanité ». Le récit va se concentrer sur cette incursion : le général sera en trop et les plus pauvres vont s’adapter et se gêner pour lui. Ce que l’on peut en conclure c’est que la modification de la société est en cours mais n’est pas imminente car le général reste général et exige que les subordonnés lui obéissent (genre qu’ils rigolent à ses blagues mais aussi qu’ils s’adaptent à des réformes qu’ils n’ont pas décidées mais qui sont faites pour faire évoluer la société). Dostoïevski ne livre pas de conclusion mais présente une histoire. Il ne fait pas intervenir son narrateur pour aider à comprendre. Il fait de son récit une « farce », une pièce que l’on pourrait jouer au théâtre. Les « catastrophes » sont les faits d’hommes bourrés.

    Il faut que je lise les « grands romans » pour me rendre compte moi-même de ce qu’est vraiment Dostoïevski et lire les nouvelles ensuite. En tout cas, lire le dossier que le Magazine littéraire avait consacré à l’auteur ou même une biographie. J’ai l’impression qu’en faisant comme cela, comme actuellement, il y a quelque chose qui m’échappe, une dimension que je ne capture pas.

    Références

    Une sale histoire de Fédor DOSTOÏEVSKI – récit traduit du russe par André Markowicz (Actes Sud / Babel, 2001)