J’aime beaucoup lire des revues (encore plus depuis que je vais à la librairie près de mon travail car ils mettent bien en évidence leur stock qui est vraiment très varié)(ce qui me plaît, c’est toutes les découvertes que l’on peut faire au détour d’une page, comme si un nouveau petit coin du monde s’ouvrait devant nous) mais je n’en parle jamais parce que j’ai l’impression que cela n’intéresse personne. Pourtant, personnellement, j’aimerais bien que vous me parliez des revues que vous lisez, surtout des fameux « mook » car si pour certaines revues, je suis abonnée, pour d’autres non et je les achète suivant le thème principal, le sommaire, un article sur un sujet qui m’intéresse. Il y a beaucoup de revues, je ne peux malheureusement pas tout savoir, et donc il y en a forcément qui m’échappent. Je vais donc copier sur Matilda et parler des revues que je lis (en essayant de présenter les articles pour que vous puissiez voir si il y en a un qui vous intéresse).
Je vais répéter la présentation du magazine que vous avez du lire des milliers de fois depuis le printemps dernier. Le Believer est la version française d’un magazine américain, The Believer, fondé en 2003 par Dave Eggers. Il est présenté comme « un mensuel dans lequel la longueur des articles est sans objet ». Dave Eggers a aussi dit qu’ils se concentreraient « sur les écrivains et les écrivains qu’ils aiment » et accorderaient « aux gens et à leurs créations le bénéfice du doute ». L’édition française est elle trimestrielle et reprend pour moitié le meilleur des trois éditions américaines du moment et pour l’autre moitié une sélection des archives du magazine. La charte graphique de la couverture française est la même que celle de l’édition américaine (illustré par un certain Charles Burns) car comme vous pouvez le constatez, la couverture est faite en module et est donc facile à adapter.
Passons un peu au-delà de la publicité maintenant. Les articles de ce premier numéro traitent de sujets très différents : de livres, de littérature et de créations littéraires, de bd, de musique (où on fait un petit lien avec la littérature tout de même), de cinéma, de sujets plus sociétaux aussi. Ces articles peuvent prendre plusieurs formes : journalisme narratif avec les réflexions et pensées de l’auteur, entretiens, conversations mais aussi chroniques. Ce qui m’a bien plu dans ces lectures c’est le côté intimiste des articles. J’ai eu l’impression d’être avec un ami qui ne parlait qu’à moi, ce qui n’est pas le cas quand on lit des revues plus objectives au niveau des faits ou des opinions. J’ai aimé avoir l’impression qu’il y avait quelqu’un derrière, qui se mettait en scène dans son article.
Passons au sommaire.
Il y a deux chroniques : une de Nick Hornby, qui parlent de ses lectures, et une du critique de musique Greil Marcus. Le premier écrit une sorte de billet de blog sur comment il a voulu voir ce qu’écrivaient les « jeunes » et comment il en est venu à lire d’autres livres, d’autres auteurs, comment il a découvert tel auteur en librairie. Il livre ses impressions, ils commentent, ils comparent. Greil Marcus livre un top 10 mais je n’ai pas très bien compris de quoi. Chaque item pris séparément est intéressant mais je n’ai pas compris le lien entre tous. Cela m’a cependant permis de une très belle chanson The Place I Left Behind de Deep Dark Woods.
[yframe url=’http://www.youtube.com/watch?v=sKKVF1cqGMU&feature=related’]
Pour les entretiens et les conversations, il y en a quatre. Don DeLillo s’entretient avec Greil Marcus (le même critique de musique) à propos de « la sensibilité artistique de Dylan » et de « son rapport au monde ». En ce moment, je suis droguée à Bob Dylan depuis que j’ai été à un entretien près de la cité de la musique, où il y avait une expo Bob Dylan et une librairie où on pouvait acheter 7CD + 1 DVD de Bob Dylan pour 35 euros. Il y avait aussi un CD très intéressant sur les influences de Dylan (j’ai découvert Dave Van Ronk qui a une voix trop hallucinante)(je vais éviter de vous faire un billet en ne mettant que du YouTube). Don DeLillo intervient car il a écrit un livre, son troisième, en 1973, intitulé Great Jones Street « consacré à un personnage qui ressemble à Bob Dylan, même si ce n’est pas un clone ». Il y a un entretien entre deux écrivains Harry Mathews (époux de Marie Chaix)(ils vivent en France)(il fait parti l’Oulipo) et Laird Hunt (je ne le connais pas mais il paraît qu’il est écrivain). Vous allez normalement entendre parler dans pas longtemps de Harry Mathews car j’ai demandé un de ses livres à la bibliothèque. Il y a aussi un entretien avec Steve Carell, célèbre acteur de comédie. On découvre un acteur humble, normal, qui vit très simplement son succès et qui a un discours très intéressant sur ce qu’est la création à la télévision et au cinéma. Côté musique, il y a aussi une conversation entre Damon Albarn (Blur, Gorillaz, The good, the bad and the queen)(je suis archi fan de sa musique) et Paul Simonon (The Clash)(je dois connaître deux chansons mais j’aime bien qui a rejoint The good …) Ils parlent de leur rencontre, de leurs gouts musicaux, de leurs gouts littéraires mais aussi de leurs quartiers communs : North Kensington (connu aussi sous le nom de Notting Hill, Ladbroke Grove, Portobello suivant qui vous êtes). Il y a un entretien avec Daniel Clowes, auteur de roman graphique, qui parle de comment il a débuté (je ne connaissais pas non plus ; pourtant il est très traduit en français).
Il y a les articles autour de la littérature : la visite de la maison de Thomas Bernhard en Autriche (où l’auteur essaye de lire la décoration de la maison en fonction des livres de l’auteur), une conférence de Zadie Smith qui explique comment se passe l’écriture des romans, dans son cas en tout cas (elle est trop sympa et pleine d’humour)(j’ai un roman d’elle dans ma PAL depuis des siècles, j’ai honte). Il y a un article rigolo sur Marx où on découvre qu’avant d’être Marx, Marx était avant tout un fils qui voulait faire plaisir à son père en voulant écrire « des textes expérimentaux ridicules pour l’anniversaire de son père ». Enfin, il y a un article passionnant sur « la littérature au fluide correcteur » où on parle plagiat mais surtout de cette littérature qui consiste à créer une œuvre à partir d’une autre création, en supprimant, découpant … des mots d’autres livres. Jonathan Safran Foer s’y est d’ailleurs essayé.
Pour les articles sociétaux, il y en a deux : un sur « le chant du cygne de Christiania, ville libre », sous-titré dans le sommaire « pourquoi cette expérience utopique vieille de plusieurs décennies sombre dans l’indifférence générale » et un autre sur les bunkers de la guerre froide. Les deux sont franchement intéressants car ils décrivent les faits mais permettent aussi le développement de toute une réflexion qui fait appel à énormément de référence. Pour l’article sur Christiania, il y a le côté pile mais aussi le côté face qui sont décrits. Pour les bunkers, on nous fait visiter un bunker de 10 km2 construit sous un hôtel et qui était censé abriter le congrès si il y avait eu un problème pendant la guerre froide. L’auteur parle alors de la relation ambiguë des américains pour des bunkers, dont l’efficacité n’est absolument pas prouvée, de l’argent gaspillé pour les construire (et pour les approvisionner en nourriture)(l’auteur va peut être un peu loin quand il explique que c’est aussi ce qui a permis le développement de la consommation de masse…) mais aussi du paradoxe qu’il y a à vivre dans un monde détruit. L’auteur en arrive au réchauffement climatique et explique qu’il est étrange d’avoir voulu se protéger d’une menace qui pouvait se passer demain sans se soucier de l’après-demain. Pourtant, c’est une doctrine qui semble perduré dans une certaine société américaine.
Il y a aussi un article que je n’ai pas compris d’un auteur (très connu apparemment) Stephen Elliott sous-titré dans le sommaire « Une traversée du désert, afin de retrouver sens à la vie après la triple infidélité de mon ancienne petite amie ».
En résumé, c’est un numéro très riche en informations. On s’y sent bien car l’écriture est assez intimiste. La seule chose que l’on peut regretter, c’est les références anglo-saxonnes très précises, qui j’ai l’impression ne sont pas forcément arrivées aux oreilles du péquin moyen (moi quoi)(c’est l’occasion de découvrir pourtant).
Maintenant, c’est à vous de voir si cela vous intéresse !
Références
Le Believer – printemps 2012 – numéro 1 (Inculte revue, 2012)