Présentation de l’éditeur
Le cauchemar de Mana Neyestani commence en 2006, le jour où il dessine une conversation entre un enfant et un cafard dans le supplément pour enfants d’un hebdomadaire iranien. Le cafard dessiné par Mana utilise un mot azéri, et les azéris, peuple d’origine turque du nord de l’Iran, sont depuis longtemps opprimés par le régime central. Pour certains d’entre eux, le dessin de Mana est la goutte d’eau qui fait déborder le vase et un excellent prétexte pour déclencher une émeute. Le régime de Téhéran a besoin d’un bouc émissaire, ce sera Mana. Lui et l’éditeur du magazine sont arrêtés et emmenés dans la prison 209, une section non officielle de la prison d’Evin, sous l’administration de la VEVAK, le ministère des Renseignements et de la Sécurité nationale. Au bout de deux mois de détention, Mana obtient un droit de sortie temporaire. Il décide alors de s’enfuir avec sa femme.
Bouleversant, Une métamorphose iranienne est une plongée en apnée dans le système totalitaire kafkaïen mis en place par le régime iranien.
Mon avis
L’histoire se décompose en deux parties : tout ce qui se passe en Iran et la fuite. Pour ce qui se passe en Iran, c’est une illustration parfaite de ce que l’on essaye de nous faire comprendre dans les journaux (et c’est beaucoup plus parlant et intéressant qu’un simple reportage au journal télé).
On touche du doigt deux réalités, comme le souligne la présentation de l’éditeur : le système totalitaire avec tout ce qui est traitement d’un prisonnier politique (comment on force quelqu’un à avouer ce qu’il n’a pas fait, lui imputer de grandes fautes pour une toute petite erreur, l’enfermement dans des prisons secrètes…)
La deuxième chose c’est le système kafkaïen. On vous renvoie de l’un à l’autre, on vous change de place. On vous met responsable de tous les malheurs du monde. On monte la population les uns contre les autres. Je n’ai pas trouvé évident que les manifestations qui ont fait suite au dessin de Mana n’est pas été aidé par le VEVAK. On sent que ce n’est pas sain comme ambiance.
Cette bd permet aussi de connaître les problèmes qui peuvent toucher l’Iran par rapport à sa composition « ethnique » puisque ici on parle des farsis et des azéris qui ne peuvent pas se supporter. On apprend donc pas mal de choses dans le « scénario » qui est tout de même l’histoire « vraie » de l’auteur.
Une deuxième partie de la BD relate le parcours du combattant pour tenter d’obtenir un asile politique et montre la méfiance des pays occidentaux pour accorder des visas. C’est particulièrement vrai pour la France.
Pour ce qui est du dessin, je vous renvoie à l’avis de Mo pour un commentaire de pro. J’ai trouvé que c’était là où l’auteur mettait sa personnalité. Cela m’a donné l’impression d’avoir sous les yeux quelqu’un sur qui tous les malheurs du monde venait de tomber (il faut voir comment il est vouté, cela fait peur) et qui pourtant gardait son humour (dans les dessins) et son humanité.
En conclusion, c’est un témoignage passionnant et important car il y en a sûrement beaucoup d’autres qui ne peuvent plus le faire.
Références
Une métamorphose iranienne de Mana NEYESTANI – traduit de l’anglais par Fanny Soubiran à partir de la traduction anglaise de Ghazal Mosadeq – imprimé en Slovénie (Ça et là / Arte éditions, 2012)
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