Cecile's Blog

  • LesBaladinsDuRegentPaulDohertyCe livre était à côté du Anne Perry à Gibert. C’est pour cela que je l’ai pris. J’ai le tome 2 de cette série, celle du frère Athelstan, dans ma PAL mais j’ai préféré commencer par le 12ième. Ce qui vous l’avouerez me donne deux bonnes de raisons de lire et de vous présenter ce livre.

    Je vous livre tout de suite mon impression. Frère Athelstan n’enquête pas vraiment. Il attend que tous les suspects meurent et quand il n’en reste plus qu’un, sa sentence tombe : c’est le dernier le coupable (parce que ce n’est pas lui bien sûr).

    L’histoire se passe donc à Londres en 1381. On est sous le régime de Jean de Gand, régent pour le compte de Richard II, fils de Edouard le Prince Noir (lui même fils d’Edouard III). Tout cela est expliqué au début du livre en une page : pas besoin d’avoir fait une thèse sur l’histoire de l’Angleterre pour comprendre.

    Le livre s’ouvre sur une scène pouvant rappeler des choses à certains. Des hommes attendent d’autres hommes dans la campagne londonienne, toute enneigée en cette hiver rigoureux (cela fait bizarre d’écrire cela). Les premiers, Cranston chargé de justice à Londres et ses hommes, attendent les deuxièmes, des Flamands venus parler avec jean de Gand, pour les aider à rentrer sans encombre dans la ville malgré leur précieux chargement : une prisonnière masquée et donc mystérieuse. Ils se font pourtant tous attaqué par des hommes qui s’étaient camouflés (ils avaient mis des drap sur eux apparemment). Les assaillants, les Hommes Justes (qui préparent une sorte de révolution paysanne) n’arriveront pas à capturer la prisonnière mais prendront deux têtes (qui étaient déjà coupés).

    D’autres Hommes Justes, dans le deuxième chapitre, tomberont dans une embuscade dressée par Maître Thibault, l’homme de confiance de Jean de Gand. Le but de l’homme est de récupérer les deux têtes mais il n’y arrivera pas. C’est seulement dans le troisième chapitre, quand Cranston et frère Athelstan se joignent au régent et à ses invités pour assister à une pièce donnée par les baladins du régent, qu’elles réapparaitront lors d’un assaut magistral. Les Hommes Justes (enfin on suppose) arriveront à tuer un homme et en blesser un autres, ainsi qu’à tuer un des baladins. Cranston et Athelstan vont être mandés par le roi pour trouver ces mystérieux assaillants. Bien sûr les investigations se portent sur ceux qui étaient présents (cela se passait dans une église de la tour de Londres, complètement gardée et hermétique). Athelstan est le maître du jeu, Cranston n’étant qu’un assistant glouton. Il reste dans le brouillard une très grosse partie du livre alors que lui-même se fait agresser et d’autres (beaucoup d’autres : il y a des meurtres et des décapitations à tout va) meurent. Il va trouver la solution dans les 50 dernières pages, une solution un peu inattendue même si nous avions nous aussi réduit nos suspects vu qu’il n’y avait pratiquement plus personne.

    De Paul Doherty, j’ai déjà lu la série des Nicholas Segalla, qu’il signe Ann Dukthas. Dans la série du frère Athelstan, l’auteur privilégie l’action et la vraie aux personnages (description psychologique) ou à l’histoire.

    Entendons-nous bien, il recréé bien la période dans le sens où on s’y croit mais contrairement à la série des Nicholas Segalla qui mettait en scène une sorte d’immortel qui revisitait les grands évènements de l’histoire, on n’a pas l’impression de sortir plus intelligent de cette lecture.

    C’est un bon divertissement mais qui ne nous amène pas plus loin. J’ai ainsi passé un bon moment de lecture, dans ce livre entraînant (j’avais toujours envie de savoir la suite) mais l’histoire ne me restera pas forcément longtemps en tête.

    Pour la description des personnages, je serais moins sévère car j’arrive au 12ième tome tout de même et donc l’auteur n’a plus de raison de décrire ses personnages principaux.

    Références

    Les baladins du régent de Paul DOHERTY – traduit de l’anglais par Christiane Poussier et Nelly Markovic (10/18, 2014)

  • LeMystereDeHighStreetAnnePerryCela faisait longtemps que je n’avais pas ouvert un Anne Perry. Alors quand j’ai été à Gibert la semaine dernière, je n’ai pas résisté à ce petit volume à la couverture attrayante selon mon goût (puis la quatrième de couverture parle d’un libraire). Pour le coup, c’est une grande déception.

    Il faut noter que c’est un livre de commande, écrit spécialement pour la série « Bibliomysteries ». L’éditeur a demandé un court texte. Pari réussi : le livre fait 80 pages.

    Un libraire, Monty Danforth, seul un soir à la librairie, trouve dans un carton de nouvelles acquisitions un manuscrit, plus exactement un très vieux parchemin très mystérieux car il échappe à toutes les tentatives de reproduction : photocopieuse, photographie. Peu de temps après (la même nuit), un vieil homme arrive avec sa petite fille pour acquérir ce parchemin alors que personne n’est au courant. Dans les jours qui suivent, deux nouveaux acquéreurs arrivent dont un homme d’église (je pense que déjà avec cette indication vous voyez mieux la nature du parchemin, son époque et son origine). Parallèlement, le libraire s’inquiète de l’absence de son patron depuis quelques jours pour cause de maladie. Intrigué par tant de mystères, Monty demande conseil à son ami, le très cartésien Hank Savage. Anne Perry ne conclut pas sa nouvelle car elle voulait écrire une fin ouverte d’après l’interview en fin de volume.

    Ce texte est un ensemble de déjà-vu : le libraire qui trouve un parchemin, le duo « le gars attiré par le fantastique – le gars qui explique tout par la science », le mystère du parchemin, les acquéreurs … Je n’ai absolument rien trouvé d’original. De plus, le livre manque quelque peu d’atmosphère brumeuse, mystérieuse (la couverture ne tient pas ses promesses pour cela). La seule idée que j’ai trouvé intéressante est celle émise par l’auteur dans l’interview, que plus une religion a d’adeptes, plus elle se simplifie pour être comprise par le plus grand nombre. Cette idée n’est pas assez développée (même pas du tout en fait).

    C’est une déception dans le sens où Anne Perry voulait faire un texte versant dans l’ésotérisme mais elle n’y arrive pas car tout est déjà vu et survolé. Elle n’a pas pu développer cette thématique dans une nouvelle. Une déception que j’oublierai bien vite pour ne garder que mes bons souvenirs d’Anne Perry.

    Références

    Le mystère de High Street de Anne PERRY – Traduit de l’anglais (Grande-Bretagne) (Ombres noirs, 2014)

  • J’ai reçu hier une très gentille petite carte de Niki me demandant si j’étais souffrante puisque je ne rédigeais plus de billets sur les livres que je lisais. Sachez que je vais bien (pour ceux que cela intéresse bien entendu). Outre que j’ai lu quelques navets, je me suis inscrite à un MOOC sur Coursera intitulé Greek and Roman Mythology.

    Je me suis aussi inscrite à des MOOC scientifiques, qui occupent beaucoup mon temps mais qui me sont nécessaires pour compléter mes connaissances qui semblent insuffisantes à bien des égards. Mais le MOOC sur la mythologie, je l’ai choisi parce que j’ai toujours voulu savoir ce qui se cachait derrière la mythologie grecque et romaine, et surtout connaître des références culturelles que tout le monde cite. Je ne le fais pas à fond car normalement il y a une dissertation à rendre. Je regarde juste les vidéos et fais les quizz.

    Il y a donc des lectures à faire et la première a été L’Odyssée de Homère. J’ai donc passé trois semaines dans ce livre et cela a été ma plus grande surprise depuis le début de l’année.LOdysseeHomere

    Je n’ai jamais voulu me lancer là-dedans car dans ma tête, c’était une sorte de longue poésie (et je n’arrive pas avec la poésie comme vous le savez peut-être).

    J’ai choisi la traduction disponible chez Babel car après avoir lu les commentaires sur Amazon, il m’a semblé que c’était la version la plus adaptée pour moi. Je l’ai donc ouvert et première surprise, cela se lit très bien. Pour une première lecture, je n’ai pas fait particulièrement attention à la forme mais plus au fond. En cela, j’ai été aidé par les vidéos du MOOC qui souligne les points essentiels de l’action et le pourquoi du comment. Par exemple, le professeur a beaucoup insisté sur la Xenia grecque mais aussi sur l’universalité de certains thèmes.

    Je ne reviendrai pas sur le livre car je ne pense pas que je pourrais vous apporter dessus plus que ce que vous ne savez. Quand je l’ai fermé, j’ai eu envie de le relire (pour vous dire comme je l’ai aimé). J’ai bien sûr prévu de lire L’Iliade mais mon chef m’a dit que c’était plus compliqué donc j’attends un peu. Je me suis aussi demandée pourquoi on traduisait, en France, Odysseus par Ulysse. Je me suis sentie bête quand j’ai regardé la première semaine de vidéo. Je me suis demandée qui était cet Odysseus dont on parlait en plus de Télémaque (j’avais lu les huit premiers livres et je n’avais pas rencontré ce personnage…). Ulysse, c’est le nom romain. Pourquoi nous n’avons pas gardé le nom grec ?


    Je ne savais pas si vous avez déjà suivi un MOOC mais il y a un forum où les participants discutent. Dessus, il y avait un sujet sur le livre de Margaret Atwood, L’Odyssée de Pénélope. Curieuse, je l’ai acheté puis lu et c’est aussi une très bonne surprise.

    Le livre est écrit une alternance (de chapitre) entre l’histoire de l’Odyssée racontée par Pénélope et le chœur des 12 servantes assassinée par Télémaque dans l’Odyssée.

    LOdysseeDePenelopeMargaretAtwoodPénélope s’exprime dans une langue moderne et parlée. Cela se justifie par le fait qu’elle nous parle du XXIième siècle, du « paradis », où elle nous observe. Elle a aussi adoptée un point de vue moderne et féministe.

    Dans un premier temps, elle nous parle de son enfance à Sparte, à la cour de son père , Icare. Elle nous raconte la tentative de meurtre que celui-ci a commis celle en voulant la noyer et où elle fut sauver par des canards. Elle parle aussi de sa mère, une Naïade, qui préférait nager que de s’occuper de sa fille. Elle s’est ainsi transformé en une adolescente timide et peu sûr d’elle.

    Quand elle eut quinze ans, elle a été en âge de se marier. Ulysse l’a jouée à la course à pied et l’a gagnée (on l’a plus ou moins laissé gagner) mais cela ne compte pas puisqu’il avait aussi joué pour la cousine de Pénélope, Hélène, qui avait été remportée par Ménélas provoquant ce que l’on sait. Ulysse est décrit ayant des jambes courtes et un torse de barrique. D’un point de vue moral, il est défini comme un menteur, tricheur et beau-parleur. Ce n’était donc pas le grand amour comme décrit dans L’Odyssée. Il y a une certaine complicité qui s’est faite au lit, après le mariage. Cependant, Pénélope souffre de l’attitude méprisante de sa belle-mère et de celle trop envahissante de la nourrice d’Ulysse. Puis, il part à Troie et n’en revient qu’après 20 ans.

    Dans la suite du livre, Pénélope parle de ses stratagèmes pour se protéger des prétendants. Pour cela, elle les a fait espionner par ses douze plus belles servantes, celles qui seront assassinées.

    Celles-ci s’expriment donc dans le livre, comme un chœur dans les tragédies grecques. Elles sont donc un groupe vengeur et menaçant envers Ulysse mais n’en veulent pas du tout à Pénélope.

    Le livre est court mais est très drôle car iconoclaste, moderne tout en étant ancré dans l’histoire racontée par Homère. Je vous le conseille vivement. C’est par contre très différent des livres habituellement rédiger par Margaret Atwood.

    Références

    L’Odyssée de HOMÈRE – traduit du grec par Frédéric Mugler (Actes Sud / Babel, 1995)

    L’Odyssée de Pénélope de Margaret ATWOOD – traduit de l’anglais (Canada) par Lori Saint-Martin et Paul Gagné (Flammarion, 2005)

    P.S. : Il me reste une semaine de travail à tirer et après je suis en vacances pour trois semaines. Je serais plus présente alors …

  • VengeanceBenjaminBlackRassurez-vous, j’ai lu d’autres livres entre ma lecture du tome 4 et du tome 5 des aventures de Quirke, le médecin légiste. Je n’ai juste pas encore eu le temps d’en parler (ou je ne l’ai pas pris, allez savoir). Je tenais cependant à vous informer que la saison 1 de la série Quirke, inspiré des livres de Benjamin Black, sort le 9 juin alors qu’initialement c’était prévu pour fin juillet (je trépigne d’impatience, surtout qu’il y a aussi la saison 2 de Endeavour qui est sortie).

    Ce volume est très très convaincant (en tout cas en anglais). Au premier chapitre, Victor Delahaye est dans un bateau avec Davy Clancy, le fils de son associé en affaire, Jack Clancy. Tout à coup, il sort une arme et se suicide devant le jeune homme de vingt-quatre ans. Il n’y a aucun doute : c’est bien un suicide. La question est surtout pourquoi ? Alors que les évènements se sont produits dans la région de Cork, la famille ayant décidé de rentrer à Dublin, les investigations seront menées par  l’inspecteur Hackett, assisté par Quirke bien évidemment. Ils auront du pain sur la planche parce qu’assurément les Clancy et Delahaye sont de drôles de famille. La famille Delahaye est constitué du père (celui qui s’est suicidé), de Mona, sa très très jeune épouse (sa première femme étant morte), de deux jumeaux James et Jonas (du premier mariage), de Maggie (la soeur de Victor) et du père de Victor, Samuel (il est cloué dans un fauteuil roulant suite à une attaque). Les Clancy sont constitués de Jack, associé de Victor et fils de Phil (qui lui même était l’associé de Samuel), de Sylvia, la femme anglais de Jack et de Davy, leur fils. Les Delahaye et les Clancy sont donc associés de longue date même si les hommes Delahaye tiennent la première place. Il y a donc des jalousies et rancunes sous le tapis. Nos deux acolytes vont chercher à les déterrer surtout après que Jack meurent noyer à bord de son bateau (enfin, pas exactement mais je ne vais pas tout raconter non plus). Il y a donc du suspens (ce n’est pas non plus un thriller) mais pour tout dire, la fin m’est apparue évidente quand je l’ai lu mais je n’avais pas du tout trouver (à moitié en fait, parce qu’à un moment il y a un indice). Donc premier bon point : une histoire consistante.

    Je vous avais dit que j’allais lire la suite de cette série en anglais pour voir l’écriture de Benjamin Black (alias John Banville) dont on vante les talents. C’est une vraie réussite pour le coup. J’ai maintenant la certitude que je ne parle pas anglais, vu le nombre de mots (et surtout d’adjectifs) que j’ai cherché (et pas tous encore). Par contre, j’ai pu constaté que Benjamin Black jouait beaucoup sur les registres de langue. Par exemple, Hackett parle un anglais démodé. Je n’avais pas du tout remarqué cela en français où j’avais plutôt l’impression d’une monotonie de ton. De la même manière, j’ai trouvé Quirke, plus mordant, plus cinglant au niveau des répliques, moins désespéré aussi (peut être qu’il commence à aller mieux). Si vous pouvez, je pense qu’il est bien de lire cette série en anglais.

    Concernant les personnages, peu dévolution dans les personnages par rapport au tome 4 (à part peut être Quirke donc). Phoebe, la fille de Quirke, est avec Sinclair, l’assistant de Quirke à l’hôpital, depuis un an. Ils forment un drôle de couple qui ne semble pas bien assorti mais attachés l’un à l’autre. Je n’arrive pas bien à cerner Phoebe. Elle m’échappe encore au contraire de Quirke et Hackett qui sont bien décrits physiquement, psychologiquement, suffisamment pour être incarnés à mes yeux. Phoebe (et même Sinclair) reste trop discret sur leurs sentiments.

    La quatrième de couverture du sixième tome s’annonce très bien mais je vais faire un pause et lire un livre en français (et peut être trouvé le temps de vous faire les deux billets sur les autres livres que j’ai lu).

    Références

    Vengeance de Benjamin BLACK (Picador, 2013)

  • MortEnEteBenjaminBlackBon, ça y est, j’ai fini le tome 4 des enquêtes de Quirke et écrites par Benjamin Black (alias John Banville). J’ai beaucoup aimé ce volume car il mêle adroitement l’enquête et l’étude psychologique des personnages récurrents. Ce n’est pas seulement le dernier comme dans le précédent épisode.

    Comme toujours, l’enquête de Quirke se situe dans les milieux aisés dublinois, des années 50. Il est appelé un dimanche dans la « maison » de campagne d’un homme d’affaire, possédant entre autre le journal où Jimmy Minor travaille, le Daily Clarion. Quirke est le légiste de garde, suite à la maladie du titulaire. Il retrouve là bas l’inspecteur Hackett. Tous les deux se retrouvent face au corps de l’homme d’affaire, qui à première vue, s’est suicidé se tirant une balle dans la tête (je vous passe la description du cerveau éparpillé par tout mais vous vous imaginez). Je dis bien à première vue car les deux hommes voient assez rapidement que ce n’est pas possible puisque d’après leurs expériences, il est impossible de tenir encore fermement le fusil quand on s’est tiré une balle dans la tête. Quelqu’un a voulu maquillé son crime en suicide. Ils vont l’annoncer à la famille de la victime : sa femme Françoise, française énigmatique, sa sœur Dannie, hautement perturbée psychologiquement même avant le drame, et Giselle, sa fille. Françoise oriente tout de suite les soupçons vers le rival de Dick Jewell, la victime, Carlton Sumner. En effet, tous les deux se seraient disputés car Carlton voulait récupérer de manière plus ou moins malhonnête les affaires de Dick.

    Quirke et Hackett prennent bonne note mais s’intéresse aussi à Maguire et à sa femme, le couple qui entretient la maison de campagne. Ils les interroge en premier puisqu’ils étaient sur place. Ensuite ils vont interroger la famille Sumner que Quirke a connu à l’université. Hackett connaît lui le fils, Teddy, qui a déjà eu des problèmes avec la police pour violence. Au fur et à mesure de l’enquête, ils vont aussi s’intéresser de plus près à Dannie (la sœur donc) qui s’avère être une amie proche de Sinclair, l’assistant de Quirke, qui s’est rapproché de Phoebe, la fille de Quirke, à l’initiative de ce dernier. Phoebe va donc encore être mêlé aux enquêtes amateurs de son père, bien malgré elle. Quirke se charge de manière très très rapprochée des entretiens avec la veuve (au revoir Isabel) (elle n’aura tenu qu’un épisode).

    Comme vous le constatez, il y a beaucoup de suspects, tous aussi plausibles les uns que les autres. C’est donc particulièrement intéressant au niveau de l’enquête (même si on devine avant la fin le dénouement). Il ne faut pas vous attendre à une action démentielle car les enquêteurs de Benjamin Black sont quand même très cérébraux. Tous se passe en entretiens, interrogatoires et réflexions. Les jeunes vont cependant particulièrement être en vedette dans cet épisode ; je veux parler de Phoebe (qui y était déjà dans les volumes précédents), Sinclair, Dannie et Teddy.

    C’est ce qui m’a beaucoup étonné ; enfin, David Sinclair intervient enfin comme un personnage actif. Dans le volume précédent, il était plus ou moins vu comme le subalterne de Quirke qui cherchait à profiter de l’alcoolisme de son patron pour pouvoir prendre sa place et voyait donc son retour avec une grande déception. De plus leurs relations étaient empreintes d’une certaine froideur. Ici, Quirke prend l’initiative d’inviter Sinclair au repas hebdomadaire avec sa fille. Sinclair s’attache bien malgré lui à Phoebe. Tout s’enchaîne assez vite. Je suis assez contente du tour que prend cette histoire. De plus, dans ce volume, on abandonne complètement Malachy et on retrouve Rose seulement pour le dénouement. J’ai trouvé que c’était plutôt une bonne chose car leurs personnages commençaient à s’essouffler précédemment.

    Sinclair est aussi l’occasion de mentionner une autre chose : la religion juive. En effet, Sinclair comme Jewell sont juifs et visiblement, c’est quelque chose de très particulier en Irlande, pays majoritairement catholique. Les Jewell et Sinclair sont pas ou peu pratiquants mais Benjamin Black insiste dessus. Je n’ai pas compris où il voulait en venir mais j’ai trouvé les réactions des personnages très étranges. Par exemple, Phoebe dit tout de suite à son père que Sinclair est juif, qui lui ne sait pas comment elle l’a vu. Elle ne le dit pas comme un jugement mais comme une constatation froide. Pourtant quand elle va devenir plus intime avec lui, elle va lui demander comment cela fait. Dannie a été pensionnaire dans une école religieuse catholique ; elle y a appris tout le protocole de cette religion mais elle dit que les autres savaient qu’elle était différente. L’impression que cela m’a donné est que l’auteur envisage ses personnages juifs, comme un groupe singulier et pourtant non homogène. Ils sont sources de curiosité et quelques fois d’agressivité. Dans le volume précédent, il y avait un personnage noir. J’ai l’impression que Benjamin Black veut souligner la diversité dans une société que l’on pourrait penser très homogène (surtout dans les années 50). Il veut peut être montrer que les liens qui sous-tendent la société irlandaise sont plus complexes qu’on ne pourrait le penser. C’est ce que j’ai pensé mais je ne suis pas vraiment sûre.

    Ce qui m’a fait pensé cela, c’est aussi l’atmosphère très particulière qui se dégage de l’écriture de Benjamin Black dans ce volume-ci. Il utilise un narrateur omniscient, qui voit les sentiments de chacun des personnages, mais qui se place tour à tour dans le point de vue de chacun des personnages. J’ai eu cette impression que chaque personnage est isolé par rapport aux autres, qu’il voit bouger devant ses yeux comme des marionnettes incompréhensibles. Chacun est aussi obnubilés par ses sentiments, sans forcément s’intéresser à ceux des autres. C’est comme si les personnages n’avaient pas de liens entre eux ou très peu. C’est pour cela que j’ai pensé qu’il était important pour l’auteur de montrer d’une autre manière comment les personnages interagissent entre eux. Ils jugent les autres non par leurs caractères mais pas leurs appartenances à une certaine classe sociale ou à une certaine religion.

    C’est donc un volume des aventures de Quirke que j’ai particulièrement apprécié, plus que les volumes 2 et 3 à mon avis. Je commence à mieux voir la manière dont Benjamin Black construit ses romans et surtout à mieux comprendre sa manière de narrer ses histoires.

    Références

    Mort en été de Benjamin BLACK – traduit de l’anglais (Irlande) par Michèle Albaret-Maatsch (Nil, 2014)

  • LaDerniereCigaretteNikolavitchBottaJ’ai acheté cette bande dessinée au dernier salon du livre, au stand de la région Ile-de-France. Il n’y avait personne sur le stand mais le dessin de couverture m’a interpellée et donc j’ai retourné le livre pour lire le résumé. Première phrase : « Novembre 1943, près de Kiev ». Je n’ai pas cherché à en savoir plus et j’ai mis la BD dans ma besace.

    On est donc en 1943 à Kiev. Un commissaire politique soviétique, le commissaire Tchektariov, se retrouve séparé de son unité lors d’un bombardement. Il se réfugie dans la cave d’une maison, où il y a déjà un officier allemand, le colonel Dorscheid. Au lieu de s’entre tuer, ils se comportent en homme en faisant une pause dans cette guerre. Ils fument ensemble les deux dernières cigarettes du colonel allemand. L’un sait déjà que son camp a perdu, une bataille  que lui-même n’a jamais voulu mener, et l’autre sait déjà que son camp va avancer jusqu’à Berlin (pour bloquer les Américains aussi) mais en voyant toute sorte d’horreurs. Les deux hommes portent un regard lucide sur cette guerre mais aussi sur le futur qui les attend.

    La narration est effectuée par le Soviétique et il nous décrit les massacres perpétrés en Ukraine, en Biélorussie, en Pologne, où ils découvrent les camps allemands. Il décrie des moments d’anesthésie totale, où les régions traversées sont tellement dévastées qu’on ne peut plus penser normalement.

    La guerre se termine. Les deux hommes se retrouvent. L’Allemand est en prison pour avoir fait massacrer tout un village. Le Soviétique cherche à comprendre comment un guerrier a pu se transformer en criminel (je reprends ici une phrase de la bande dessinée).

    C’est une BD très courte, une quarantaine de pages en petit format mais c’est un coup de poing parce qu’en quelques mots, quelques images et une histoire tout est dit.

    Le scan de la couverture ne rend pas justice à celle-ci pour les couleurs, qui sont en réalité plus foncées. Le type de dessin à l’intérieur du livre est identique (je le trouve très beau et très travaillé personnellement) mais les couleurs sont différentes. Pour le passé (pendant la guerre), les dessins sont en noir et blanc alors que pour le présent (Dorscheid en prison), les couleurs sont à dominante jaune-marron.

    Je vous conseille donc vivement cette bande dessinée.

    Références

    La dernière cigarette de Alex Nikolavitch (scénario) et Marc Botta (dessin) (La Cafetière / Vertige Graphic, 2004)

  • ScandalInSkibbereenSheilaConnollyJ’ai lu le deuxième de la série, malgré le peu d’enthousiasme suscité par le premier volume (surtout dans les commentaires parce que moi, j’avais bien rigolé). Ben, surprise ! … il est beaucoup mieux même si à mon avis l’auteur a un sacré problème avec les meurtres. Elle n’arrive pas à envisager de les résoudre. Ce qui est gênant pour un auteur de roman policier (j’ai lu sur les blogs anglophones (je n’arrive pas à retenir qui habite où, en fait) que c’est plus un cozy mystery).

    On retrouve Maura, trois mois après les faits qui ont été raconté dans le premier tome. Elle est devenu propriétaire du pub Sullivan’s et de la maison de Old Mick, propriétaire décédé du même pub (je spoile un peu mais comme il y a peu de chances que vous lisiez le livre, vous ne m’en voudrez pas). Cela la change beaucoup puisque quand elle était à Boston, où sa grand-mère irlandais l’a élevée, elle était pauvre et était sans aucune attache (sauf sa grand-mère, avant son décès). Contrairement au premier volume, Sheila Connolly ne nous le rabâche pas toutes les trois lignes (ce qui vraiment est très reposant) et en plus elle ne rappelle pas toute l’histoire, c’est juste sous-entendu.  On peut enfin se concentrer sur le cozy mystery ! On retrouve tous les personnages : Rose, Mick, Jimmy, Bridget, Sean (le policier).

    Cela a pour moi été une source de grande déception : Maura sort avec Sean et non pas avec Mick. Je m’imaginais cela depuis le premier volume et non, l’auteur a fait tout le contraire de ce que je voulais. Je m’imagine Mick comme beau, fort, gentil et ténébreux alors que Sean pour moi est grand et maigre mais gentil aussi. Je pense que Maura est petite, gentille et très dynamique (un peu trop et se fourre donc toujours dans le pétrin). Il lui faut donc quelqu’un qui la protège et je pensais à Mick et pas au policier. Ce qui m’a fait rigolé, c’est que dans ce coin d’Irlande, d’après l’auteur, il n’y a pas beaucoup de gens entre 20 et 30 ans. Elle insiste beaucoup là-dessus (visiblement, elle a une marotte à chaque volume). Cela m’a fait pensé qu’elle était mandatée par l’office du tourisme pour attirer des femmes là-bas pour le repeuplement de ce coin du pays. Cela m’a fait regarder où était Skibbereen (j’ai même fait Street View) et donc, si tu est un homme de trente ans et qui habite par là, je veux bien venir habiter chez toi.

    Tout cela j’espère vous permet de mieux situer le contexte général du roman. Passons à l’histoire, au fond du problème quoi. Skibbereen s’honore d’avoir un taux de criminalité très bas mais depuis l’arrivée de Maura, on compte déjà trois morts en trois mois (deux dans le premier volume et un dans celui-là)(à mon avis, elle porte la poisse). Pour l’instant, l’évènement reste suffisamment rare pour qu’il soit fascinant.

    Un jour, Althea, une fashionista new-yorkaise, arrive dans le pub comme un éléphant au milieu d’un troupeau de souris et demande si par hasard il n’y aurait pas aux alentours des familles issus de la noblesse anglo-irlandaise (ou plus précisément des familles qui ont eu de l’argent dans le temps). En effet, elle travaille dans un musée et a eu connaissance d’une esquisse de Van Dyck (c’est ce qu’elle suppose) qui pourrait la préparation d’un tableau qui serait dans la région de Cork (au vu de qui possédait l’esquisse). Commence alors une véritable chasse au trésor. Maura, trop récente du coin, s’adresse à Old Billy qui squatte un fauteuil du bar toute la journée et qui raconte ses vieilles histoires au touriste. Il aiguille Althea vers le manoir des Townsend, où vit la dernière descendante de la famille qui a plus de quatre-vingt ans. Elle est gardé par deux domestiques, un couple, et un jardinier. Althea, toute à son enthousiasme, y va le soir-même et se fait claquer la porte au nez. Le problème est qu’au matin, on retrouve le jardinier assassiné sur la pelouse. Maura est obligé de signaler à Sean, la présence de l’américaine (car ce ne peut être un hasard tout de même). Une fois qu’il y a eu le meurtre, Maura se consacre à aider Althea avec l’aide de Gillian, une artiste locale, qui vit la moitié de l’année à Dublin, et Harry, le neveu de la vieille dame du manoir qui est descendu à la suite du meurtre. Ils recherchent le tableau dans la maison, le trouve, cherche ensuite la preuve formelle que c’est un Van Dyck …

    La mort du jardinier revient épisodiquement dans la mémoire de Maura (mais elle ne le connaissait pas donc bon …) mais elle préfère chercher la peinture que de s’occuper du meurtre ou de son pub. À la page 230 (sur 294), on en arrive enfin à la résolution du meurtre ! C’est quand même pour cela que je lis des romans policiers pas pour chercher des peintures. Enfin, bref … Le problème est que la résolution s’exécute par un tour de passe-passe (un personnage extérieur à l’histoire et à la région ; c’était déjà la même idée dans le premier volume) et qu’il n’y a pas d’arguments logiques pour cette réponse. C’est ce qui me fait dire que l’auteur a un problème avec les meurtres. Il ne faut pas faire mourir les gens si on ne veut pas résoudre d’énigmes !

    C’est tout à fait le genre de romans dont j’aime voir les défauts et chicaner sur l’histoire alors qu’en réalité j’y passe un bon moment de détente et de rigolade. Il ne faut juste pas chercher à y voir ce qu’il n’y a pas.

    Références

    Scandal in Skibbereen de Sheila CONNOLLY (Berkley Prime Crime, 2014)

  • DisparitionAprilLatimerBenjaminBlackJe vous avais déjà parlé des deux premiers tomes des aventures de Quirke, médecin légiste à Dublin dans les années 50 : Les Disparus de Dublin et La Double Vie de Laura Swan Cela fait un an que j’avais ce volume dans mon reader. J’ai eu un peu honte quand le quatrième sortait et qu’il y a eu le promo sur le ebook. Pourtant je n’ai pas commencé le livre. Ce qui m’a décidé, c’est que j’ai vu que Quirke était en série sur la BBC et que le DVD sortait bientôt et aussi le fait que j’ai changé d’application de lecture sur ma tablette (j’ai pris Mantano au lieu de Aldiko parce qu’on eut souligner de plusieurs couleurs : je suis futile, je suis futile, je suis futile). Donc si on résume, c’est le premier livre que j’ai lu sur ma tablette et je l’ai dévoré pendant le grand week-end.

    Comme pour La Double Vie de Laura Swan, clairement, il n’y a pas d’enquête. Quirke ne fait preuve d’aucune capacité de déduction que l’on pourrait attendre d’un détective. Sa fille vient le voir car elle est inquiète suite au fait qu’elle n’a plus de nouvelles de son amie April Latimer, nièce d’un ministre et sœur d’un célèbre docteur, catholique conservateur, fille d’une veuve qui se dévoue corps et âmes aux œuvres de charité. Cela ressemble beaucoup à des liens plut écrasant ; c’est pourquoi April Latimer est devenue docteur, elle aussi, mais a décidé de vivre sa vie en s’éloignant ostensiblement de ses célèbres et parfaits parents.

    Discrète à l’hôpital où elle n’a que très peu de contacts avec le reste du personnel, elle est le personnage charismatique d’une bande d’ami qui comprend : Phoebe, la fille de Quirke, que l’on a déjà rencontré aux tomes précédents et qui a (eu) une vie plus que compliquée, Jimmy Minor, petit journaleux, fouille-merde, qui est jaloux de tout car à mon avis, il se sent médiocre tant au point de vue humain que professionnel, Isabel Galloway, actrice plus âgée que le groupe, Patrick Ojukwu, qui est interne à l’hôpital mais qui a la particularité d’être noir dans cette Irlande des années 50. Bien sûr, les trois femmes sont amoureuses de lui (enfin c’est ce qu’on suppose au début du livre) et se le disputent, non pas ouvertement, mais secrètement ; c’est ce qui provoque aussi la jalousie de Jimmy Minor.

    Donc, Phoebe demande de l’aide à Quirke, qui vient juste de sortir de deux mois de séjour à l’hôpital pour se désintoxiquer de l’alccol. Ses amis ne sont pas convaincus mais il va commencer son travail de « détective amateur ». En fait, cela consiste à aller voir les gens concernés par l’affaire, de secouer le cocotier (comprendre les bousculer un peu dans leurs certitudes et leurs conforts) et voir ce qu’il en tombe. Ici, il n’en tombe rien dans un premier temps car c’est une famille et des gens qui ont soit l’habitude du secret, soit l’habitude du paraître. Ils sont donc très forts pour ne pas laisser un étranger rentrer dans leurs vies. Les choses changent quand ils commencent à se sentir menacer par la curiosité de Quirke (j’insiste que ce n’est pas par ses talents de détective). La liens se fissurent jusqu’à ce qu’on ne voit plus que les failles dans le dénouement. En cela, Benjamin Black (alias John Banville) reprend les thèmes qu’il a abordé dans les deux précédents tomes : faire tomber les apparences, dire que la bassesse de l’humanité est égale quelque soit la fortune posséder.

    Parce que, oui, Quirke n’est pas un optimiste de nature. Je rappelle que c’est un orphelin, « adopté » par le juge Griffin, père de Malachy Griffin, obstétricien que l’on voit de nouveau apparaître dans ce volume. Il a connu des moments difficiles à l’orphelinat, l’école technique … C’est un être peu sûr de lui, qui ne comprend pas ce qu’il fait là. Il est déplacé dans ce monde. Il est précisé plusieurs fois qu’il est de très grande stature, qu’il fait pataud, maladroit. L’auteur insiste plusieurs fois principalement quand Quirke est dans des situations où il doit montrer un certain paraître. Au contraire, quand il doit agir (pour aider sa fille, pour braver l’assassin), il est transformé, devient un homme d’action habile. Ce tome 3 est un homme de transition car il s’interroge beaucoup sur sa consommation d’alcool, le pourquoi et surtout comment la limiter (parfois cela en devient un peu lourd). Quirke est aussi un homme à femmes, ou plutôt à une relation compliquée avec les femmes : on retrouve les histoires précédentes : Délia sa femme décédée il y a longtemps, Sarah (?), la femme décédée de Malachy il y a peu, Rose la veuve joyeuse, auxquelles se rajoute Isabel Galloway (qui semble moins tourmentée et plus humaine, qui pourrait presque le guérir). Finalement, j’ai trouvé que Benjamin Black essayait de nous décrire un personnage-détective, avec son long manteau et son chapeau, cliché des années 50 (Benjamin Black écrit aussi des suites aux aventures de Philip Marlowe), mélangé avec un personnage plus humain, plus faible. C’est le premier tome où j’ai plus eu l’impression de « sentir » Quirke.

    Le problème est que j’ai trouvé l’articulation avec l’histoire un peu faible. Autant, dans ce volume, l’auteur a aboutit à des personnages très travaillés, autant je n’arrive pas du tout à comprendre la ville de Dublin dans ces années-là, où en tout cas les règles qui la régissent.

    On retrouve le personnage de Hackett, le détective professionnel que j’espère plus travaillé dans les prochains volumes. Je dis cela car je suis déjà en train de lire le quatrième tome (en ebook aussi) où l’enquête reprend le pas (toujours dans le même type de milieu) et où ce personnage intervient plus apparemment. Comme mon frère va en Angleterre vendredi, je lui ai aussi commandé les tomes 5 et 6 car je voudrais voir en VO ce que les livres donnent puisqu’on ne tarit pas d’éloge sur l’écriture de John Banville / Benjamin Black alors qu’en VF je ne trouve pas cela extraordinaire. Après il ne me restera plus qu’à regarder les DVD qui sortent fin juillet.

    Références

    La disparition de April Latimer de Benjamin BLACK – traduit de l’anglais (Irlande) par Michèle Albaret-Maatsch (Nil Détectives, 2013)

  • LiscornoJacquesJosseVoilà un livre qui fait plaisir, qui fait voyager, qui fait briller les yeux, qui fait aimer la vie !

    Dans Liscorno, Jacques Josse parle de ses lectures d’enfance / adolescence. Liscorno est la village breton où était situé la maison familiale de Jacques Josse. Dans ce petit livre de 92 pages, l’auteur décrit les lectures qui l’ont marqué pendant sa jeunesse et qui ont forgé l’homme qu’il est aujourd’hui. On va donc de son arrivée dans la maison à son départ pour la ville.

    Les auteurs importants pour lui sont des poètes (Tristan Corbière, Émile Verhaeren …), des écrivains américains (Jack London, Jack Kerouac, Allan Ginsberg …) Tous ont en commun de faire écho à son existence bretonne mais surtout de l’inciter à voir autrement son univers et de faire de nouvelles expériences. Dans la vie de l’auteur, la lecture est un va-et-vient entre vie réelle et vie « lue ». Il ne dissocie pas les deux. Pour lui aussi, la lecture permet de s’évader mais elle permet surtout de devenir autre et de se développer. Même les expériences des plus lointains auteurs font écho à sa vie bretonne dans un petit village.

    Cela m’a beaucoup interrogé au moment de la lecture car je me suis demandée comment il faisait pour choisir ses lectures. Pour faire écho à une vie bretonne, je pense que le mieux est de lire des auteurs bretons (pas le mieux en fait, le plus sûr et encore on ne vit pas pareil dans toute la Bretagne). J’ai réfléchi et je pense qu’en fait ils se basent beaucoup sur les sensations et sur les sentiments (nobles comme la liberté quand on roule sur une autoroute américaine), plus que sur les histoires. C’est pour cela qu’il est touché par la poésie parce que c’est avant tout cela. Et c’est ce qu’il décrit, de manière poétique aussi, dans le livre : ce que différents auteurs lui ont apporté dans sa jeunesse et encore maintenant. Pour raconter sa découverte de Tristan Corbière, il écrit (et j’aimerais écrire pareil) :

    La nuit où Tristan Corbière s’est invité dans la mansarde à Liscorno pour ne plus vraiment en ressortir est bien cochée dans ma mémoire. Je dois au poète contumace, au crapaud qui chante, à celui qui savait plus que quiconque ce que rogner et rognures signifiaient en poésie, la première lecture qui m’a physiquement bousculé. Ses strophes ont serré ferme et sans préambule (par temps de chien, courant de la mer d’Iroise jusqu’au Cap Horn) des poches de chairs sensibles à l’intérieur du ventre avant d’attaquer le très ténu réseau des nerfs pour finir par toucher, au plafond, les pattes de l’araignée qui a électrisé, en un éclair, des zones où lire et écrire se chevauchaient.

    Cette manière de lire est très différente de la mienne. Mes lectures ne font pas écho à ma vie au sens de l’expérience (parce que aller bosser tous les jours, on fait plus romanesque). Sur le moment, la lecture me permet de m’évader en vivant dans des pays que je ne connais pas ( c’est pour cela que je ne lis pas trop de littérature française ; je les connais les français, je vis avec) mais si on me demande plus tard ce que raconte le livre, je suis incapable de le dire, je ne m’en rappelle pas. Je me rappelle de mon ressenti, de l’atmosphère, des caractéristiques des personnages … ; pour que je me rappelle l’histoire, il faut qu’on me dise un élément ou quelque chose pour que ma mémoire commence à se dérouler. C’est un peu comme si j’avais intégré de nouveaux personnages dans ma vie, comme si je les faisais vivre sans pour autant retenir toute leur vie. Quand j’étais petite, je mélangeais les personnages et je les faisais vivre mes propres histoires.

    À la lecture, je me suis demandée si je ne devrais pas essayer sa manière de lire, juste pour voir.

    Sinon, le livre est magnifique et vous fera briller les yeux.

    L’avis de Yvon.

    Références

    Liscorno de Jacques JOSSE (Éditions Apogée, 2014)

  • ZweiMalZweiCharlesLewinskyJe dois faire pour le cours d’allemand de samedi une présentation d’un livre. J’ai choisi celui-là après de très grandes réflexions et ce pour plusieurs raisons.

    On n’était pas obligé de choisir un livre en allemand mais vu qu’à chaque fois que je parle des livres aux gens IRL (aux gens qui ne lisent pas je précise), il me considère comme une folle et me demande pourquoi j’ai lu cela. J’en ai déduis à force que c’est tout simplement que je ne savais pas résumer parce que je me contente de raconter l’action et je donne mes sentiments sur la lecture après alors qu’un livre n’est pas que actions et donc les gens ne peuvent pas se rendre compte de pourquoi il faut le lire.

    Donc j’ai choisi un livre en allemand parce que je me suis dit qu’on ne me poserait pas la question et que si on me pose la question, je pourrais dire « mais pour apprendre du vocabulaire, voyons » alors qu’en réalité, je prends des livres au hasard à la bibliothèque et que si cela me plaît, je lis et si cela ne me plait pas, je rends. J’ai remarqué que chez les gens qui ne lisent pas, le rapport aux livres de bibliothèque est beaucoup plus compliqué, plus complexé même. Il faut lire tous les livres qu’on emprunte comme s’ils allaient disparaître, même s’ils seront encore disponibles dans un an (c’est cela qui est bien avec la bibliothèque). En plus, ce sont des livres qui ne remplissent pas la maison.

    J’ai pris une BD parce que je ne voulais pas prendre un livre simplifié (c’est les deux seules choses que je peux lire en allemand donc le choix est rapide). Si j’avais pris le livre simplifié, cela aurait consisté à faire le résumé d’un résumé. J’ai pris une BD plutôt qu’un comics car j’avais peur de manquer de temps et que celle-ci ne faisait que 48 pages.

    Si on résume, je me retrouve à faire une présentation en allemand d’un livre que je n’ai pas plus aimé que cela. Chouette, non ? IllustrationZwiMalZwei

    L’histoire est assez simple : deux couples attendent un enfant (chacun je précise pour ceux que toute autre hypothèse perturbe). Un des couples est plutôt aisé, bobo ou plus simplement bien assis dans la société. Ils veulent depuis longtemps un bébé mais n’y arrivent pas. Ils essaient donc toutes les techniques. Il y a la scène qu’on voit dans certains films : « chéri, tu viens ? Ma température bonne » « heu ? maintenant ? je suis en plein dans un truc important ? » et le gars se presse quitte à renverser tout le monde. Miracle, des miracles, après dix pages la dame est enceinte. Commence alors une période encore plus stressante : la grossesse. Est-ce que si est normal ? Est-ce que ça est normal ? Que doit-on acheter ? Il faut prévoir la sage-femme, la garderie… À la fin, elle chronomètre son mari pour se préparer aux contractions, le réveille en pleine nuit toujours en prévision du bébé. Le mari supporte en silence même s’il semble très désemparé.

    L’autre couple est beaucoup moins prise de tête, voir un peu inconséquent. Elle est couturière, lui quelque chose comme garagiste. Ils se rencontrent, couchent ensemble (très facile à comprendre en allemand). Il la rappelle parce qu’il la trouve assez inhabituelle. Elle ne sait même plus qui il est (cela s’est passé la nuit d’avant). Trois mois plus tard, c’est elle qui rappelle parce qu’elle découvre qu’elle est enceinte. Ils vont finalement garder le bébé même si au début, lui ne voulait pas. Il l’annonce à sa famille, qui lui dit qu’il est trop jeune, qu’il ne faut pas … mais il veut quand même. La famille veut un mariage, elle ne veut pas, finalement ils vont le faire quand même. Eux ne prévoient pas la crèche, la sage-femme, la chambre, les jouets … C’est inconséquent mais elle vit sa grossesse de manière plus cool.

    Au début de l’histoire, les deux couples sont décrits séparément dans une alternance de planches puis ils se rencontrent. L’alternance de planches persiste même s’il peut y avoir des histoires commune.

    Vous vous en doutez, la BD finit par les accouchements, en même temps, parce que c’est happy end.

    Je n’ai pas aimé les dessins parce que je trouve ce style un peu vieux, un peu journaux, trop simpliste (même si je suis incapable de faire pareil). J’ai trouvé les couleurs fades. D’une histoire qui auraient dû avoir du punch, je suis sortie déprimée, un petit peu amusé par certaines situations. Je trouve que ces couleurs ralentissent un rythme qui était intéressant car Charles Lewinsky ne décrit que les situations phares de la grossesse. Donc finalement, le scénario est assez nerveux mais les dessins ne sont pas en adéquation avec rythme.

    C’est une BD rigolote sur le moment mais la seule chose dont on se rappellera est que la grossesse dure neuf mois quoiqu’il arrive ; mais cela, on le savait déjà normalement.

    Références

    Zwei mal zwei de Charles LEWINSKY et Andreas GEFE (Edition Moderne, 2011)