Cecile's Blog

  • Présentation de l’éditeur

    Venise, 1579. Dans les brumes de décembre, les cloches de San Zanipolo chassent les âmes en peine. À l’aube du carnaval, la cité des Doges s’éveille sur des cris : tordu dans une affreuse posture, une salive noirâtre aux commissures des lèvres, le corps sans vie d’un imprimeur est découvert derrière un étal de marché. Ce n’est que le premier cadavre aux lèvres noircies, la peste est de retour en ville ! Peste ou complot ? Seule Flora, une jeune courtisane entrevoit la vérié. Mais qui la croira ? Veronica Franco, sa tutrice ? Galeazzo Foscarini, qu’elle aime sans espoir de retour ? Les jours passent, le fantÔme de Dandolo, le doge sanguinaire, revient semer le trouble dans les esprits. Le mal se répand, apportant son lot de violences et d’injustices pour un cortège macabre. Et tandis que les Vénitioens, terrifiés, cherchent des boucs émissaires, les vrais coupables poursuivent leur oeuvre de mort. Risquant sa vie, Flora ne pourra compter que sur son sang-froid pour noyer dans les eaux sombres de la lagune les malédictions de Venise …

    Philosophe de formation, Charlotte Bousquet est l’auteur d’une dizaine de romans pour les adultes et la jeunesse. Elle a récemment publié La Marque de la bête (Mango) et Arachnae (Mnémos), un thriller de fantasy inspiré d’une Renaissance italienne qu’elle adore. Elle a été récompensée par plusieurs prix, dont le prix Merlin pour Les Arcanes de la trahison (Nestiveqnen).

    Mon avis

    Je remercie ma libraire qui m’a permis de découvrir ce livre mais aussi cet éditeur (le catalogue de la collection Courants Noirs me semble vraiment très intéressant). Grande lectrice de romans policiers historiques des éditions 10/18 quand j’avais 18 – 20 ans et maintenant lectrice des romans de Jean d’Aillon et de Jean-François Parot, j’ai tout de suite pris le livre quand j’ai vu le résumé. Moins « érudits » que les romans des auteurs précédents, dans le sens où les connaissances sont distillées par petites touches, le roman n’en est que plus prenant surtout pour des jeunes lecteurs (mais aussi pour les plus vieux). On apprend entre autre tout sur une célèbre courtisane de l’époque Veronica Franco (à quand la traduction de ses poèmes je vous le demande ?) et sur la famille Venier, influente dans le Venise de l’époque et qui compta plusieurs doges. On y retrouve les quatrains de Omar Khayam dont Dominique nous avait parlé ici. Un des points positifs de ce livre est qu’il vous rend plus intelligent.

    Un autre est que le suspens est présent tout au long du livre. Il y a des rebondissements auxquels on ne s’attend jamais. Cela permet de maintenir notre envie de tourner jusqu’au bout du livre. Il faut quand même souligner que la narration est déconcertante : il y a beaucoup de personnages et chacun nous raconte son point de vue en quelques pages et cela tourne comme ça tout au long du livre. On ne sait parfois plus où on en est. Mais on s’habitue au fur et à mesure que l’histoire avance et surtout au fur et à mesure que l’on s’attache à Flora, la courtisane novice de seize ans (c’est très intéressant de découvrir Venise à travers ce personnage principal : elle n’est pas naïve, n’a pas froid aux yeux, c’est son futur métier qui veux ça, mais elle a quand même encore la candeur de l’enfance).

    Le seul point vraiment négatif est la fin : elle n’est pas assez fouillée, trop rapide. On en voudrait plus ! C’est à se demander si l’auteur ne se garde pas une porte ouverte pour un deuxième tome.

    En conclusion, un belle découverte grâce à ma gentille libraire !

    Références

    Noire Lagune de Charlotte BOUSQUET (Gulf Stream éditeur – collection Courants Noirs, 2010)

  • Présentation de l’éditeur

    De Quincey se profile régulièrement derrière ses écrits, ce qui en fait une présence familière à tout lecteur attentif. Mais ce personnage exemplaire laisse naturellement échapper le singulier, ou l’irrégulier, de cette vie, ce qui lui fit propre jusqu’à l’insignifiance – ou à la fiction (cet « anecdotage » que De Quincey lui-même exploita si bien à propos de Kant).

    John Ritchie Findlay accompagna les dernières années de l’écrivain. Plein de révérence et d’étonnement, il laissa de cette amitié une petite chronique jamais rééditée depuis sa publication originale. Voici donc, comme figés dans le temps, quelques éclats de cette très étrange existence. Voici un De Quincey aussi courtois, affable et serviable qu’incontrôlablement caustique, ou médisant ; perambulateur émérite et opiniâtre opiomane ; toujours en retard d’un écrit, ou d’un crédit, toujours en retard d’une dette, espérant sans cesse se reprendre. Voici, sous le regard d’un témoin fasciné, l’émouvant portrait d’un excentrique malgré lui, en proie au démon de la ratiocination, à l’opiomanie, aux affres de la pauvreté et à l’obsession du texte impossible à écrire, à achever, à envoyer.

    Mon avis

    Ce petit livre n’est pas un texte littéraire dans le sens où il n’a pas la construction des derniers jours d’Emmanuel Kant et que l’auteur n’est pas l’écriture de Thomas de Quincey (même si il y a parfois de très jolies phrases : ils « se mirent à diiscuter de vieux auteurs, de questions d’histoire et de littérature classique bien au delà de ma portée, si bien que je restai échoué sur le rivage avec cette marée d’éruditions et de spéculations fluant et refluant devant moi« ). Il faut plutôt le voir comme une sorte de documentaire sur Thomas de Quincey et sur son « déclin ». En effet, Findlay a repris la construction en deux parties des derniers jours d’Emmanuel Kant. La première partie, sous forme de journal, explique comment Findlay s’est retrouvé fasciné par de Quincey, tout ce qu’il a pu apprendre de l’auteur aussi. La deuxième partie, sous forme de note, décrit comment Findlay a essayé d’aider du mieux qu’il le pouvait Thomas de Quincey. Je crois que la différence de forme provient du fait que Findlay ne veut pas insister sur les vieux jours de l’auteur et que l’on en garde l’image d’un grand homme. Je trouve que c’est tout à son honneur (de Quincey ne l’avait pas fait pour Kant parce qu’il a un esprit « caustique » et « médisant »).

    C’est le mérite du livre : mieux nous faire connaître Thomas de Quincey. D’abord au niveau physique :

    C’était un homme très petit (environ 1,59 ou 1,60 m) mais d’une contenance remarquable due à une séduction intellectuelle que jamais je n’ai rencontrée depuis. Quoique sans régularité, ses traits étaient empreints d’une finesse aristocratique, et un air d’éducation raffinée pénétrait son visage. Il avait un front extraordinairement large et dense. À première vue, son visage avait la fraîcheur lisse d’un jeune garçon, réchauffée d’une sorte de rougeur hectique en remarquable contraste avec ces évidents signes de l’âge que donnaient les cheveux grisonnants et les yeux pâlis. La coloration de ses joues était, j’en suis persuadé, due à son usage constant de l’opium et l’aspect apparemment lisse de la face disparaissait une fois observée de plus près.

    On voit aussi que Thomas de Quincey aime parler de tout et de rien. Il ne m’en ai que plus sympathique :

    Invité à revenir le voir, je faisais un saut de temps en temps ; une demi-heure de conversation avec lui était un privilège que j’estimais trop pour risquer de l’importuner fréquemment. Il était disposé à aborder n’iporte quel sujet : les nouvelles du jour, les articles du Scotsman, les livres récents, nos amis communs, toutes les questions fondamentales, car il était dans la conversation un homme du monde et non un pédant ou un rat de bibliothèque. Parfois, il badinait sur des sujets insignifiants, les traitant avec une sorte d’importance humoristique. Aussi se lança-t-il un jour dans une longue dissertation sur la difficulté de s’habiller. Se raser, en particulier, était un grand tracas. Après avoir rassemblé les meilleures informations sur la question, il avait acquis une série de rasoirs de première qualité, mais on l’avait prévenu qu’ils ne pourraient se passer d’un affilage régulier, tâche à laquelle il n’imaginait pas de se soumettre ; en outre, il fallait avoir une boîte à savon, article de nécessité qu’il abhorrait au plus au point. Quelques années plus tard, il résolut ce problème en se laissant pousser la barbe.

    En conclusion, c’est un livre instructif mais il faut aimer Thomas de Quincey (ou au moins l’avoir déjà lu) pour pouvoir le lire jusqu’au bout.

    Références

    Les derniers jours de Thomas de Quincey de John Ritchie FINDLAY – traduit de l’anglais par Michèle Hechter (Le cabinet des lettrés – Le promeneur, 1997)

  • Présentation de l’éditeur

    Thomas de Quincey (1785-1859), que Baudelaire a contribué à rendre célèbre en France, est l’auteur d’une oeuvre abondante, dont on retient habituellement Les Confessions d’un opiomane anglais et De l’assassinat considéré comme un des beaux-arts. Les derniers jours d’Emmanuel Kant, un de ses textes les plus aboutis, sont incontestablement aux côtés de ces chefs-d’oeuvre.

    Ce n’est pas un hasard si Marcel Schwob, lui-même auteur de Vies imaginaires, a traduit ce récit. Car si De Quincey s’est appuyé sur des mémoires de contemporrains de Kant pour retracer la vie et surtout la fin du philosophe, c’est une véritable oeuvre de fiction qu’il bâtit, dont Kant est le personnage à la fois sublime et ridicule, saisi dans ce qu’il a de plus intime. On ne trouvera dans ce livre aucun développement sur sa philosophie mais une succession d’anecdotes révélatrices. De ce mélange d’ironie et de tendresse finit par se dégager une profonde mélancolie, celle du temps qui passe et détruit ineroxablement les plus grands esprits.

    Mon avis

    Vous vous rappelez Kant, cet homme dont la philosophie plus que compliquée (je rappelle que j’étais en terminale S) hantait vos manuels de terminale. Pour vous, Kant c’est peut être aussi l’homme à la ponctualité maniaque de Koenigsberg. En gos, Kant dans l’imaginaire commun n’est pas un homme comme les autres. Et bien figurez-vous que si !

    Kant, dans la vie, quand il reçoit ses relations, est adorable : il fait la conversation (en plus avec des propos intelligents), se soucie de chacun … Mais Kant vieillit un peu comme tout le monde. Alors, il n’est plus génie. Il devient embrouillé, victime de ses serviteurs, se brûle avec la bougie qui lui sert à lire. Mais il n’en reste pas moins un vieillard adorable. Tous ses amis vont continuer à se soucier de lui.

    De Quincey nous donne les annecdotes de la « décrépitude » de Kant. Le livre est constitué en deux parties : les annecdotes montrant tout le charme d’un grand esprit et les annecdotes montrant la chute du génie. De Quincey nous fait aimer la personne de Kant, on se prend pratiquement de tendresse pour lui.

    C’est le troisième livre de de Quincey que je lis et c’est encore un style différent. Dans De l’assassinat …, il y avait l’humour anglais. Dans Klosterheim, il y avait l’art de narrer une aventure et ici c’est l’art de s’attaquer à un personnage célèbre que l’on admire avec un angle très novateur. Schwob précise dans sa préface qu’il a fait de même avec Coleridge et Wordsworth. Pour le dernier, « en trois pages d’extase il montre le grand homme coupant un beau livre – qui ne lui appartient pas – avec un couteau souillé de beurre. »

    En conclusion, je continue ma découverte de de Quincey !

    Je remercie au passage Michel Sender et Dominique d’avoir attiré mon attention sur ce livre.

    La première page

    J’admets qu’on m’accordera d’avance que toutesles personnes de quelque éducation prendront un certain intérêt à l’histoire personnelle d’Emmanuel Kant, si peu que leurs goûts ou les occasions aient pu les mettre en rapport avec l’histoire des opinions philosophiques de Kant. Un grand homme, même sur un sentier peu populaire, doit toujours être l’objet d’une libérale curiosité. Supposer qu’un lecteur soit parfaitement indifférent à Kant, c’est supposer qu’il soit parfaitement inintellectuel ; en conséquence, même si en réalité il se trouvait ne point considérer Kant avec intérêt, il faudrait encore feindre le contraire. Ce principe me permet de ne point faire d’excuses à aucun lecteur, philosophe ou non, Goth ou Vandale, Hun ou Sarrasin, pour lui imposer une courte esquisse de la vie de Kant et de ses habitudes familières, tirée des rapports authentiques de ses amis et disciples. Il est vrai que, sans aucun manque de générosité de la part du public, les oeuvres de Kant ne sont pas, dans ce pays, considérées avec le même intérêt qui s’est amassé autour de son nom. Et ceci peut être attribué à trois causes : premièrement au langage dans lequel ces oeuvres sont écrites ; secondement à l’obscurité supposée de la philosophie qu’elles contiennent, qu’elle soit inaliénable ou due au mode particulier d’exposition de Kant ; troisièmement à l’impopularité de tout philosophie spéculative quelle qu’elle soit, et en quelque manière qu’elle soit traitée, dans un pays la structure et la tendance de la société impriment à toute l’activité de la nation une direction presque exclusivement pratique. Mais quelles qu’aient été les fortunes immédiates de ses livres, pas un homme de curiosité éclairée ne regardera l’auteur lui-même sans une nuance d’intérêt profond.

    Références

    Les derniers jours d’Emmanuel Kant de Thomas de QUINCEY – traduit de l’anglais par Marcel Schwob (Allia, 2004)

  • Cela n’a aucun rapport avec les livres mais c’est un tag de Mango : « Il s’agit d’aller dans le dossier « images » de votre ordinateur, d’ouvrir le premier fichier et de mettre sur votre blog la première photo en la commentant ».

    J’ai triché bien évidemment parce qu’il n’y a rien dans mon dossier Images donc ça aurait un peu trop rapide. Donc me voilà parti à la recherche d’une jolie photo dans les méandres de mon disque dur. Mon frère fait de très jolies photos, toujours très classes digne d’un photographe (il en a même l’appareil ; c’est pour dire). Je vais voir ses photos de Port Royal des Champs à cause du récent billet de Dominique (je les ai regardées récemment du coup) mais impossible d’enregistrer les images. Ensuite je me suis dit je vais monter une des maisons d’artistes que j’ai vu : la maison de Tourgueniev (problème : il n’y a pas de toit à la maison ou sinon il n’y a pas de rez-de-chaussée), la maison de la Malibran (mais là vous vous seriez aperçu que je prenais toutes les photos à travers des arbres et donc on y voyait pas grand chose), la maison de Dumas, la maison de Zola (impossible de retrouver les photos), la maison d’Elsa Triolet et Louis Aragon (idem). Il y avait aussi mes bibliothèques ou ma PAL mais là j’avais honte.

    Tout à coup, un éclair de lucidité. Je vais vous montrer la seule photo de moi que l’on a affiché dans la maison : ma photo d’El Escorial que j’ai prise lors d’un congrès en Espagne. Merci de ne pas écrire dans les commentaires qu’elle n’est pas aussi jolie que je le crois ; laissez moi encore quelque espoir …

    Roulement de tambour !

    Maintenant les tagués (mais vous n’êtes pas obligées) :

    The story book girl : parce qu’elle met plein d’images dans ses billets !

    Made in my little home : parce qu’elle m’avait tagué pour le tag de l’amitié et qu’à ce moment là je n’avais pas le temps d’y répondre. C’est ma manière de lui rendre cette marque de gentillesse qui m’a beaucoup touché.

    Plume parce qu’elle a acheté un livre suite à un des mes billets (là j’en suis restée sans voix) et qu’en plus j’adore le concept de son jeu : Lecture et préjugés. Le premier je l’avais déjà mais j’attends de voir les autres !

  • Mort en lisière est en réalité un recueil de dix nouvelles à ne surtout pas lire dans plusieurs cas :

    • Vous êtes un tant soit peu déprimé. Elle va vous plomber encore un peu plus le moral à chaque nouvelle. C’était mon cas ; je me suis retrouvée très triste à la fin du livre. En effet, pour tous les personnages des nouvelles cela ne se termine jamais dans la joie et la bonne humeur. Même si au départ ils étaient heureux, plein d’illusions sur le monde, à la fin, il se retrouve soit dans une vie qu’ils n’ont pas choisi, soit ils sont malheureux …
    • Vous avez encore quelques illusions sur l’humain, sur la vie telle que nous la vivons de nos jours. Vous voulez garder ces illusions : ne lisez pas ces nouvelles. Margaret Atwood va vous ouvrir les yeux sur la réalité.

    Passons aux résumés des nouvelles.

    • Courrier du coeur : un groupe de jeunes adolescents est en camp d’été surveillé par deux moniteurs et de jeunes serveuses. Une des serveuses va se retrouver enceinte d’un garçon dont elle n’osera pas dire le nom. Elle élevera seule son enfant. Dix ans plus tard : on fait le point sur la vie de quelques protagonistes de cette histoire.
    • Un cadeau empoisonné : une femme vient de se faire opérer d’un kyste ovarien (avec des poils et des dents : comme si c’était un enfant) qu’elle garde dans un bocal de formol. Elle est journaliste et maîtresse de son patron marié. Elle le quitte mais envoie le kyste à la femme, comme l’enfant qui serait né de leur amour.
    • Isis dans les ténèbres : un poète raté raconte son amour de jeunesse non réciproque de Séléna. Il finit par se marier avec une autre femme mais garde toujours Séléna en tête.
    • L’homme dans la tourbière : une jeune femme couche avec son professeur marié. Il l’emmène en Écosse dans les tourbières car il est archéologue et on vient de retrouver un corps. Il la laisse plus ou moins de côté. Elle le quitte même si pour elle c’est le grand amour. AU bout de quelques années, elle se rappelle exactement l’Écosse mais l’amant n’est qu’une image floue.
    • Mort en lisière : Loïs accroche des tableaux de paysage dans son nouvel appartement. Cela lui rappelle le suicide de sa meilleure amie de camp de vacances que l’on n’a jamais retrouvé. Ne serait-elle pas cachée dans les tableaux ?
    • Les oncles : une femme est élevée par sa mère et ses trois oncles qui la chérissent comme si elle était leur fille. Plus tard, elle travaille dans un journal et se lie d’amitié avec un homme qui ressemble aux trois oncles qui va l’aider à construire sa carrière. Cependant, il la trahira après vingt ans et elle va se remettre en question.
    • Les années de plomb : histoire d’amitié – amour non consommé entre Vincent et Jane racontée après la mort de Vincent.
    • Hommage à Molly : une femme, dont la meilleure amie s’est fait tuer sous les coups de son mari, dine avec un homme. Et s’interroge sur ses réactions.
    • Dans la jungle des familles : un homme est marié avec une femme qui a deux soeurs. Il couche avec les trois soeurs et ça fout le bins dans la famille.
    • Le mercredi d’une mercenaire : c’est la journée d’une femme comme les autres : elle a un mari révolutionaire, écologiste qui dénigre le journal elle travaille et dont elle craint de se faire virer même si elle n’a que des piges. Enfin elle vit sa vie.

    Je pense que le résumé des nouvelles vous permet de bien voir les thèmes de Margaret Atwood : les femmes (souvent journalistes d’ailleurs), les amours contrariés, l’amitié, la mort et la vie dans son plus simple appareil. Pas de bonheur, de mariage heureux. Elle dépeint des personnages courants, de notre vie quotidienne. Cela ne correspondait pas trop à ce dont j’avais besoin à ce moment là. Il faut cependant lui reconnaître un très grand talent : les nouvelles sont toutes de niveau égal (ce qui est quand même rare dans ce type de recueil), sont autour de même thème (c’est très homogène). De plus, elle a une écriture impressionante dans le type d’images qu’elle peut développer ; c’est bref, acide mais on voit tout de suite la scène se dessiner devant nous. Un exemple sur les premières lignes de la première nouvelle :

    Les serveuses se dorent au soleil comme une troupe d’otaries écorchées, leurs corps rose et brun tout luisant d’huile solaire. Elles ont gardé leurs maillots de bain parce que c’est l’après-midi. Aux premières lueurs de l’aube, ou bien au crépuscule, il arrive qu’elles aillent se baigner toutes nues – rester accroupis en proie à mille démageaisons, au milieu des buissons infestés de moustiques qui se trouvent en face du ponton qui leur est réservé, devient alors infiniment plus attrayant.

    En conclusion, je continuerai la découverte de cette auteure en connaissant maintenant ce qu’elle écrit et les thèmes qu’elle aborde.

    Références

    Mort en lisière de Margaret ATWOOD – traduit de l’anglais (Canada) par François Dupuigrenet-Desroussilles (Pavillons poche – Robert Laffont, 2009)

    Vous pouvez d’autres avis sur le site du Prix Littéraire des Blogueurs. En effet c’est dans le cadre de ce prix que j’ai lu ce livre (que je n’aurais pas ouvert sinon). Ce livre peut voyager pour les autres participantes (et même les autres mais il faut que je vous connaisse quand même). N’hésitez pas !

  • Ce que j’aime avec la sortie du film sur Sherlock Holmes, c’est qu’il y a plein de livres sur lui qui sortent. C’est la fête pour moi. Ici, c’est une bande dessinnée : Sherlock Holmes avec des vampires. Si Darcy y a le droit pourquoi pas Sherlock me direz vous ? Je vous répondrais tout à fait car à mon avis c’est une réussite.

    Juin 1891. Après « sa mort » dans les chutes de Reichenbach, Sherlock Holmes vit tranquillement à Paris où il a déjà résolu quelques enquêtes. Et en plus il a arrêté les substances stupéfiantes et il dit texto à Mycroft venu en visite : « Je peux toutefois te rassurer. Je me suis passé de stimulants depuis mon départ d’Angleterre. À vrai dire, j’en suis le premier surpris. Aussi désagréable que soit ma situation, elle semble avoir un effet bénéfique. Elle met mon intellect à contribution comme rarement. » Il emmène ensuite son frère chez lui et là il découvre que sa logeuse (pas Mrs Hudson rassurez-vous) vient de se faire mordre par un vampire (et donc elle est morte). La première attaque échoue. Quelques jours après, une deuxième attaque plus sournoise car on l’attire dans un guet-apens en lui mettant devant les yeux le sosie d’Irène Adler, la seule femme que Sherlock Holmes ait aimé. Tout est relatif avec Sherlock Holmes car bien sûr il avait déjà tout compris et se laisse prendre au piège volontairement pour savoir ce qu’on lui veut. C’est le chef des vampires de Londres, Selymes, qui lui demande de poursuivre l’un des leurs : « Il y a quelques années, l’un de mes protégés fut touché par une maladie dégénérative. Il ne se contrôlait plus, se montrait agressif… Après qu’il ait commis pluieurs meurtres sauvages qui ne manquèrent pas d’attirer l’attention sur nous, nous avons fini par le capturer. Owen Chane,,, C’est son nom… resta enfermé un long moment à méditer sur ses crimes, jusqu’à ce qu’un imbécile le laisse s’échapper. Nous haïssant, il a décidé de s’en prendre aux gens d’influence, d’en tuer encore et encore pour détruire les relations mutuellement profitables que nous entretenons avec l’establishement. Et il y réussit. La reine Victoria elle-même nous a sommés de l’éliminer au plus vite, sous peine d’être exterminéx. » S’engage une lutte à mort entre Sherlock Holmes et Owen Chanes …

    Enfin à mort je suppose parce qu’il y aura deux tomes. En tout cas le premier est vraiment très bien (et pourtant je ne suis pas particulièrement vampires). Pour ce qui est des dessins, j’ai été particulièrement convaincue par ceux représentant le Londres victorien (idem pour les couleurs. En résumé, on est dans l’ambiance). Le seul défaut des personnages, c’est que Sherlock ne ressemble pas à J. Brett mais Laci explique qu’il a pris les traits de son père. Donc, c’est pas grave !

    En conclusion : quand est-ce que le deuxième tome sort ?

    Références

    Sherlock Holmes et les Vampires de Londres – tome 1 : L’appel du sang de Sylvain CORDURIÉ (scénario), de Vladimir KRSTIC-LACI (dessin), de Axel Gonzalbo (Couleurs) et de Jean-Sébastien ROSSBACH (couverture) (Soleil, 2010)

  • Résumé

    L’action se déroule à l’époque de la Guerre de Trente Ans dans les provinces de Bavière et de Souabe. On y rencontre le personnage du Landgrave, soutenu par les Suédois, qui gère la ville fortifiée de Klosterheim mais d’une main de fer (en temps de guerre c’est un peu toujours le cas mais lui un peu trop ; il est plutôt dans la dictature). Il y a aussi Maximilien, jeune homme courageux s’opposant au Landgrave et donc fervent partisan de l’Empereur. Il doit être rejoint par la « jeune et innocente Comtesse Paulina », fille naturelle de l’Empereur, qui est aussi son amoureuse.

    Dans un premier temps, on suit ce voyage terrifiant à travers un pays en guerre. C’est un voyage en convoi. Celui-ci se fera attaqué, pillé à plusieurs reprise mais la Comtesse arrivera à bon port à Klosterheim et se réfugie dans une sorte d’abbaye, Sainte Agnès. En effet, à peine est elle arrivée que Maximilien doit fuir ou se cacher parce qu’il a déplu au Landgrave. Au même moment, un home masqué sème la panique dans la ville et surtout dans la tête du Landgrave qui sent son autorité menacée. Vous l’aurez compris ce masque c’est Maximilien… Après une histoire plutôt traditionnelle, il y aura une fin totalement inattendue (à moins que vous lisiez la présentation de l’éditeur).

    Mon avis

    J’ai trouvé l’histoire très compliquée au départ. En premier lieu, à cause des faits historiques qui ne sont pas présentés. Thomas de Quincey laisse à penser que nous devrions tout de suite comprendre qui sont les gentils et les méchants dans l’histoire rien qu’à leur nom. Cela rend le livre un petit peu difficile à suivre au départ.

    Après, c’est tout simplement génial. Vous aimez les romans gothiques, l’ »atmosphère de suspicion », les « troubles menaces », les « lettres d’intimidation », les « meurtres » : ne vous privez pas. Cela vos plaira sans aucun doute. C’est très bien écrit, on suit les péripéties des protagonnistes avec grand enthousiasme.

    D’ailleurs Coleridge rapproche Klosterheim du Quentin Durward de Walter Scott : « la pureté de la langue et du style » qui atteint selon lui « un niveau d’excellence auquel Walter Scott ne semblait pas même prétendre ». En effet, c’est plus facile à suivre que Walter Scott. De plus, le rapprochement est évident par le fait de la description de faits historiques mais c’est à mon avis différent : Walter Scott prend plaisir à décrire des personnages tandis que Thomas de Quincey prend plaisir à décrire des actions et des intrigues.

    En conclusion, ne boudez pas votre plaisir !

    Un autre avis

    Celui d’Alcapone.

    Références

    Klosterheim de Thomas de QUINCEY – traduit de l’anglais et préfacé par Liliane Abensour (José Corti – collection romantique, 1997)

  • Quatrième de couverture

    Meggie, douze ans, vit seule avec son père, Mo. Comme lui, elle a une passion pour les livres. Mais pourquoi Mo ne lit-il plus d’histoires à voix haute ? Ses livres auraient-ils un secret ? Leurs mots auraient-ils un pouvoir ? Un soir, un étrange personnage frappe à leur porte. Alors commence pour Meggie et Mo une extraordinaire aventure, encore plus folle que celles que racontent les livres. Et leur vie va changer pour toujours…

    Le premier tome d’une magnifique trilogie fantastique, par un célèbre auteur contemporrain. Lire n’a jamais été aussi fascinant – et aussi dangereux.

    À partir de 11 ans.

    Mon avis

    Ce billet aurait pu s’intiuler : comment je suis retombée en enfance à cause de The story book girl. Surtout, je ne sais pas résister à un livre qui parle de livre. Pour vous situer un peu la chose, cela faisait douze ans que je n’avais pas mis mon nez dans un livre pour adolescents.

    Franchement, je suis fascinée par les jeunes lecteurs d’aujourd’hui. Je n’ai jamais lu un livre de plus de 300 pages avant mes 15 ans et de 400 pages avant mes 20 ans. Le Da Vinci Code a été mon premier livre de plus de 600 pages (après j’ai lu Les Bienveillantes : 800 pages et c’est le plus gros à ce jour). Ce livre de poche fait quand même 650 pages (j’étais déjà épâtée par les enfants de 10 ans qui lisaient Harry Poter : je me pensais un peu attardée mentale).

    Ensuite, j’ai été fascinée par la quatrième de couverture. En gros, cela vous raconte deux pages du livre (d’habitude, on vous les 100 premières pages, voire la moitié, voire la totalité du livre).

    J’ai ensuite ouvert le livre (pour le lire c’est mieux me direz-vous). Pendant, les 100 premières pages, j’ai trouvé que c’était un peu long même si la description de la maison de la tante de Meggie, Elinor, me fait dire qu’il faut que j’aille vivre chez elle : sa maison est bourrée à craquer de livres sur tout avec des piles et des étagères partout. Elle dépense tout son argent dans les livres. Le seul défaut que cette femme a : c’est qu’elle n’aime que les livres.

    Après cela commence à bouger un peu plus et là je me suis encore trouvée à tourner les pages bêtement pour savoir la suite. Pour vous expliquer en gros (même si cela gâche le travail de la quatrième de couverture), Mo a le pouvoir de faire sortir les objets et les personnages des livres rien qu’en les lisant à haute voix. Manque de chance, il a lu un livre Coeur d’encre avec plein de méchants dedans : Basta, Capricorne et un saltimbanque Doigt de Poussière et ils sont tous sortis du livre pendant que sa femme Thérésa rentrait dedans. Neuf ans après cette lecture, Capricorne veut que Mo, alias Langue Magique, délivre d’autres de ses amis du livre.

    Si il y a des longueurs parce que l’auteur prend le temps de tout expliquer (et vraiment tout), il y a aussi de très belles tournures de phrases (très poétiques) que l’on ne trouve pas dans les livres pour adultes. Les longueurs sont à mon avis surtout le fait que c’est le premier tome d’une trilogie et qu’il faut bien installer les personnages.

    Je ne dirai pas que c’est un coup de coeur mais cela m’a bien plu. J’irais même jusqu’à lire les deux autres tomes : Sang d’encre et Mort d’encre qui vient de sortir. En plus, c’est pas joli d’avoir le premier tome sans les deux autres !

    Références

    Coeur d’encre de Cornelia FUNKE – traduit de l’allemand par Marie-Claude Auger (Gallimard Jeuness – Folio junior, 2010)

  • Présentation de l’éditeur

    Après des années passées en Amérique, le journaliste Christopher « Kit » Farrell regagne l’Angleterre. Son ami Nigel Seagrave doit l’entretenir d’une affaire qui le préoccupe : il est persuadé que Muriel, la femme qui partage sa vie, n’est pas celle qu’il a épousée. Pour étayer sa thèse, il organise au manoir d’Udolpho un dîner au cours duquel il espère obtenir une preuve de ce qu’il avance. À la fin du repas, le maître de maison invite les convives à le rejoindre dans la splendide serre tropicale qui fait sa fièrté. Mais lorsque les hôtes y pénètrent, ils découvrent le corps de Nigel, gisant sur le sol, frappé d’une balle en pleine poitrine.

    Ce n’est que le début d’une série de faits déroutants et inexplicables, que la police va s’efforcer d’élucider… avec l’aide d’un personnage réel, l’écrivain Wilkie Collins, célèbre pour ses romans d’épouvante et de mystère.

    Voici l’un des derniers inédits de John Dickson Carr, l’un des auteurs les plus inventifs en matière de crime en chambre close. Associant une minutieuse reconstitution de l’époque victorienne à l’esprit du roman gothique, Les noueaux mystères d’Udolpho maintient jusqu’au bout le suspense et le défi intellectuel, sans oublier l’humour et l’érudition littéraire.

    Mon avis

    Il y a six mois le titre ne m’aurait même pas interpellé sur les tables d’une librairie. Le challenge English Classics est passé par là. Quand j’ai vu le titre, j’ai retourné le livre pour lire le résumé et là on me dit que Wilkie Collins enquête. J’ai su que c’était fini et qu’il fallait que je ramène ce petit livre de 400 pages à la maison.

    Une fois que cela a été fait, je me suis précipitée pour le lire. La préface commence bien : « En ces temps de disette pour les amateurs d’énigmes, la sortie en français du dernier roman écrit par John Dickson Carr constitue un petit évènement. Dans le paysage littéraire actuel où le genre policier est dominé par le sadisme et la violence, le règne interminable des serail killers et les thrillers à caractère sociopolitique, ces Nouveaux Mystères d’Udolpho seront sans nul doute accueillis par les vrais amoureux de la littérature policière classique – « le délassement des grands esprits », disait-on à son âge d’or-, comme un bain de jouvence. » J’étais flattée bien évidemment et je me suis dit que j’avais bien choisi. Mais après j’ai tourné la page … où Roland Lacourbe nous explique gentiment que ce n’est pas le meilleur John Dickson Carr voire qu’il n’est pas très bon parce que l’auteur était malade et l’a écrit pendant sa chimio. Qu’il a été plutôt bien accueilli aux États-Unis mais pas en Angleterre. J’ai trouvé que c’était un peu étrange comme préface mais bon …

    Maintenant parlons du texte à proprement dit. John Dickson Carr est un des précurseurs du roman policier historique. Ici, il fait une description du Londres de l’année 1869 digne d’un auteur de l’époque à mon avis (dans la description pas dans la langue : ce qu’il faut complimenter en fait surtout c’est le travail documentaire). Par contre, sur la description du mode de vie, j’ai trouvé que les femmes de la bonne société (trois des personnages principaux) avaient des moeurs un peu légères (ce qu’aucun écrivain de l’époque n’aurait permis à mon avis) ; je me suis demandée si Carr n’avait pas plaquée le mode de vie du 20ième siècle sur celui du 19ième.

    L’intrigue est plutôt bonne « dans son classissisme » mais je me suis sentie un peu flouée comme à chaque qu’il n’y a pas un meurtre dans une enquête policière. Parce que oui Nigel Seagrave n’est pas mort (avec une balle près du coeur tout de même et en plus opéré au manoir d’Udolpho par le médecin généraliste du coin : pas sûre que le mien sache faire ça). Comme quoi, l’esprit humain est prompte à s’imaginer n’importe quoi.

    En conclusion, vous n’avez plus de Agatha Christie, plus de Patricia Wentworth, plus de Ngaio Marsh, plus de Anne Perry, vous pouvez lire ce roman : vous y passerez un moment de détente sympathique. Il faut cependant passer sur quelques invraissemblances et anachronismes …

    Références

    Les nouveaux mystères d’Udolpho de John Dickson Carr – préface de Roland Lacourbe – traduit de l’anglais (États-Unis) par Danièle Grivel (Rivages/Noir poche, 2010)

  • Miguel Delibes est un auteur traduit depuis les années 1990 par les éditions Verdier : 11 titres au total. C’est cependant une toute petite partie de son oeuvre. Ici, Verdier nous offre une nouvelle traduction, établie par Dominique Blanc, de Cinq heures avec Mario. Ce livre a été publié en Espagne pour la première fois en 1971.

    Deux livres me sont venus à l’esprit à la lecture de cet ouvrage : Une si longue lettre de Mariama Bâ et La mort d’Olga Maria d’Horacio Castellanos Moya. La première référence m’est venue à la lecture de la quatrième de couverture et de l’histoire de base. Carmen vient de perdre son mari Mario, mort d’une crise cardiaque ; elle reste seule avec le corps une nuit entière et ainsi peut se remémorer le passé. La seconde référence elle vient du ton de l’écriture. À part, le prologue et l’épilogue, il n’y a que Carmen qui parle et elle n’arrête pas. Si à la fin du livre, Carmen ne vous apparaît pas comme antipathique ou ne vous a pas donné mal à la tête, c’est que vous êtes un ange.

    Parce qu’en plus de vous casser les oreilles (ou les yeux puisque c’est de la lecture tout de même), Carmen est désagréable : c’est une femme bourgeoise, futile, ancrée sur ses convictions et qui ne supportent pas qu’on n’ait pas les mêmes qu’elles. Comme exemple, je vous livre ce passage :

    Quoi que vous en disiez, j’ai passé du bon temps pendant la guerre, écoute, je ne sais pas si je suis trop légère ou quoi, mais j’ai passé des années formidables, les meilleures de ma vie, c’est sûr, comme si tout le monde était en vacances, la rue pleine d’enfants, et tout ce remue-ménage. Même les bombardements ne me gênaient pas, tu vois un peu, je n’avais même pas peur ni rien, et il y en avait qui criait comme des folles chaque fois que les sirènes sonnaient. Mais non, ma parole, tout m’amusait, même si avec toi on ne pouvait pas discuter, ni avant ni après, parce que chaque fois que je commençais avec ça, toi : « tais-toi, s’il te plaît », motus, parce que si tu réfléchis bien, Mario, mon amour, des conservations sérieuses, ce qui s’appelle des conversations sérieuses, nous en avons eu très peu. Les vêtements, tu t’en fichais, la voiture n’en parlons pas, les fêtes encore plus, la guerre qui était une Croisade de l’avis de tout le monde, pour toi c’était une tragédie, total, comme on ne parlait pas de l’argent malin ou des structures et de toutes ces histoires, toi, silence. (p. 70)

    Cette Carmen a donc épousé Mario, professeur sans prétention, idéaliste et se faisant du soucis pour le monde et pas pour son monde (faut-il avoir une voiture comme tout le monde pour être ? : that is the question), gauchisant à l’extrême. Dépressif aussi. Il peut paraître mou mais il est surtout incompris par sa femme (ils ont quand même fait cinq enfants !), par son milieu bourgeois de l’Espagne de l’après-guerre que nous dépeint ici Miguel Delibes :

    Et après tout, qu’est-ce que je risquais en rappelant à Josechu que ses parents fréquentaient les miens, beaucoup moins qu’en faisant confiance à ta qualité de fonctionnaire avec famille nombreuse, parce que ces conditions, on le sait bien, Mario, ça ne date pas d’hier, on les jette aux orties quand c’est nécessaire, et je me souviens que la pauvre maman, qu’elle repose en paix, « celui qui ne pleure pas ne tête pas », rends-toi compte, mais je suis en colère contre toi, Mario, franchement, parce qu’on dirait que le monde va s’écrouler si on demande un recommendation, alors que dans la vie il n’y a que des recommendations, des uns pour les autres, depuis toujours, nous sommes faits comme ça, et je n’en peux plus d’entendre maman, « celui qui aura un parrain sera baptisé », mais avec toi il n’y a pas moyen, c’est bien connu, les conditions, « je suis fonctionnaire, avec une famille nombreuse, ils ne peuvent pas faire autrement », comme s’il suffisait de te faire confiance, mon grand, parce que vous autres, vous vous agrippez à la loi quand ça vous arrange, et vous refusez de vous rendre compte que la loi est appliquée par des hommes et que la loi ne ressent rien et ne souffre de rien, alors que ces hommes-là, il faut les ménager et leur lécher un peu les bottes, ça n’a jamais déshonoré personne, imbécile, tu passes ta vie à lancer des piques et après, parce que la loi le dit, tu crois que tout le monde va se mettre à genoux, et si on te refuse l’appartement : au tribunal, un recours, comme c’est charmant, contre les autorités, il ne manquait plus que ça, et je ne sais pas dans quel monde tu vis, mon bien-aimé, mais on dirait toujours que tu tombes des nues.  (p. 254-255)

    Comme vous pouvez le lire sur les deux extraits, c’est un livre au ton très original. L’histoire déborde un peu sur l’Histoire, comme dans le deuxième extrait, mais est quand même principalement centré sur la vie du couple et leur relation avec leur environnement.

    En conclusion, je tiens à redire toute mon admiration à Mario, à l’auteur et au traducteur pour avoir supporter Maria aussi longtemps ! Et surtout méfiez-vous parce qu’après cette lecture vous ne supporterez plus les gens qui sont comme ça dans votre entourage (en tout cas pour quelques temps …)

    Merci à Abeline Majorel de Chroniques de la rentrée littéraire et à Sylvain de Ulike pour cette lecture si particulière et surtout l’envoi ultra-rapide.

    Pour en savoir plus sur Miguel Delibes, plusieurs liens : Ulike, Dailymotion pour l’émission Un siècle d’écrivains qui lui a été consacré.

    Références

    Cinq heures avec Mario de Miguel DELIBES – traduit de l’espagnol par Dominique Blanc (Verdier Poche, 2010)