Cecile's Blog

  • Livre lu par Hélène, Kathel (chez qui je l’avais repéré), Delphine, Céline, Michel, Nana, Bazar de la littérature, Jostein.

    Quatrième de couverture

    Un vieil homme retrouve avec émotion deux lettres écrites par Mirka, son premier amour, qu’il avait relégué au fond de sa mémoire. Il décide alors d’écrire à son fils et de lui raconter toute l’histoire, en commençant par sa rencontre avec cette adolescente lors des vacances d’été, au bord de la lagune de la Vistule, en 1951 et 1952. Dans ses lettres, la jeune fille lui annonçait être enceinte. Il ne lui a jamais répondu. Bouleversé par cette paternité qui resurgit dans ses vieux jours, l’homme se met à la recherche de son passé. Cinquante ans plus tard, il se rend dans la maison sous les pins, au bord de la mer Baltique. Il y fait de longues promenades sur la plage et dans les dunes, se remémorant toute son existence et s’interrogeant sur ses choix, sa lâcheté vis-à-vis de ses proches, ses compromissions avec le système. Au fil des rencontres avec les habitants des lieux, il se rapproche pas à pas de la vérité. Son récit simple et brut, teinté de mélancolie et de nostalgie, sonne comme une confession qui vient trop tard, une manière de s’expliquer avec sa propre existence.

    Mon avis

    C’est le premier livre que je lis avec mon joli reader que mon papa m’a offert (pour ma fête qui est dans un mois mais mon papa n’aime pas faire de cadeaux les jours convenus et personnellement je ne m’en plaint pas)(son idée de départ est de ne plus faire d’étagères et de me faire progresser en anglais). Du coup, je vais vous parler du livre et ma vie avec mon reader (paraît que cela se fait).

    Le livre : si vous cherchez un livre plein d’actions et de péripéties avec un rythme rapide, passez votre chemin. Cela risquerait de vous ennuyez en moins de trois pages. Par contre, si vous cherchez un livre qui va vous prendre dans la petite musique d’une vie des plus ordinaires (je ne dis pas que tous les hommes ont des enfants cachés, entendons-nous bien), L’estivant est pour vous. L’auteur distille une ambiance désuète, nostalgique et mélancolique comme le dit la quatrième de couverture. C’est une ambiance que je n’avais pas réussie à saisir dans les premières pages car je n’en avais pas lu assez. Je pense que c’est un livre qu’il faut pratiquement lire d’un coup pour se laisser porter vers cette lagune. Sinon, vous risquez d’être coupé de ce monde quasi-irréel (tellement les personnages sont annihilés face aux souvenirs ou aux paysages : ils passent dans ces deux éléments mais n’agissent pas).

    Ce qui m’a plu aussi, c’est que l’auteur parle de la période de la Seconde Guerre et de l’après-guerre au travers des membres de sa famille ou des gens qu’ils veut rencontrer. Il ne juge pas, il réfléchit et s’interroge. C’est pareil pour son enfant caché, il ne va pas finalement se justifier, se dédouaner ou même s’accuser, il réfléchit, il s’interroge. C’est un homme qui semble avoir été dans l’indécision et la passivité toute sa vie et finalement, au terme de sa vie, il l’assume. Je trouve extraordinaire que l’auteur arrive à retranscrire cela, sans finalement chercher à utiliser les ressorts romanesques que l’on aurait pu attendre. Au final, une jolie découverte !

    Mon expérience avec le reader : au même moment, j’étais en train de lire un livre avec Sherlock Holmes, plein de péripéties et d’actions, qui me faisait beaucoup rire (je vais vous en parler aujourd’hui et demain). J’ai eu du mal à me concentrer sur ce livre au rythme si différent parce que j’avais la tentation de reprendre le livre en anglais et finalement c’était trop facile par rapport à deux livres papiers. C’est cette distraction qu’il va falloir que j’arrive à dompter. Je suis comme tout le monde sinon : la lecture est aisée, le maniement facile … le seul truc, c’est que je ne peux pas lire dans mon lit car il y a un contre-jour avec ma lampe de chevet. Du coup, je ne pourrais jamais me passer du livre papier (ou sinon, je devrais trouver un autre moyen de m’endormir).

    Références

    L’estivant de Kazimierz ORLOS – traduit du polonais par Erik Veaux (Éditions Noir sur Blanc, 2011)

  • Quatrième de couverture

    Devenu riche grâce à un héritage inattendu, le nain Jacques Courbé, l’un des phénomènes de foire du cirque Copo, obtient la main de Jeanne Marie, la belle et calculatrice écuyère. Convaincue de pouvoir profiter de cette fortune avec son amant, elle se moque ouvertement de son nouvel époux lors de leurs noces. Mais rire d’un homme susceptible, aussi petit soit-il, peut s’avérer dangereux, surtout lorsqu’il est accompagné d’un redoutable molosse.

    Mon avis

    C’est écrit en tout petit sur la couverture mais il s’agit de la nouvelle qui a inspiré le film Freaks (que bien sûr, je n’ai pas vu parce que sinon cela ne serait pas drôle et je ne serais pas moi. Dites-moi si c’est très différent de la nouvelle dans l’ambiance)(si vous l’avez vu, bien sûr).

    Le livre commence par une préface de Xavier Legrand-Ferronnière (préface très instructive par contre) dont la première phrase est :

    La liste est longue des classiques de la littérature fantastique ou d’horreur qui ont alimenté l’usine à « cauchemars » hollywoodienne du début des années 1930 jusqu’au lendemains de la Seconde Guerre mondiale.

    Je me disais « chouette, je vais avoir peur » mais en fait pas du tout (je pense que j’ai trop lu Le chien des Baskerville et du coup, les chiens ne me font plus peur). La nouvelle se lit comme un conte. L’histoire est conçue de cette manière là car il y a renversement de la situation : le gentil nain qui épouse la vilaine écuyère devient son oppresseur. De belle et « jeune », elle devient usée. C’est original et bien trouvé (surtout la manière dont le nain se venge de la fanfaronnade de sa femme le jour des noces) mais cela ne fait pas peur. J’ai plutôt trouvé que le nain qui chevauche le chien pour tuer le chevalier tirait le comique du grotesque.

    Après avoir vu, le sous-titre du film, je me suis dit que peut-être il s’agissait du monde du cirque mais en fait il n’est pratiquement pas décrit et comme on est dans une nouvelle, les personnages sont croqués par un trait de caractère uniquement. Cela ne m’a pas suffit pour visualiser ce qu’il pouvait y avoir d’intéressant.

    Alors, je ne sais pas trop quoi penser car j’ai trouvé la nouvelle agréable à lire mais je n’ai pas l’impression de retrouver ce que l’on peut lire sur le film (surtout dans la manière dont c’est écrit en fait). C’est pour avoir votre avis sur le sujet que j’écris un billet qui ne contient rien.

    Références

    Les éperons de Tod ROBBINS – préface de Xavier Legrand Ferronière – traduit de l’américain par Anne-Sylvie Homassel (La petite collection des éditions du Sonneur, 2011)

    Cette nouvelle, dont le titre original est Spurs, a paru pour la première fois en 1923 dans le Munsey’s Magazine.

  • Ce livre m’a appris quelque chose : le personnage de Arthur Conan Doyle peut être sujet à polémique. Ici, l’auteur joue avec des faits réels pour en faire une fiction, plutôt bonne d’ailleurs (mais heureusement qu’il y a les faits réels).

    Le jeune journaliste Bertram Fletcher Robinson revient d’Afrique du Sud sur un bateau avec Arthur Conan Doyle. Ils discutent boutique et Conan Doyle propose de lui acheter une idée (je n’ai pas très bien compris comment l’histoire de départ avait pu donner le Chien des Baskerville) et même une collaboration. Le temps passe et c’est ce qui va se faire ! Ils vont se rencontrer une première fois et établir l’idée de base du Chien des Baskerville. Or, Bertram Fletcher Robinson est de Dartmoor … et va proposer à Conan Doyle de venir chez ses parents, à Ipplepen, pour pouvoir décrire avec plus de précisions la région dans le livre. Jusque là, tout le monde est d’accord. John O’Connell attaque ensuite la fiction puisqu’il fait du journaliste un drogué, à la limite de la paranoïa (ce que l’auteur dit qu’il n’était pas en postface). Il décrit Conan Doyle comme un homme prêt à tout, même à mystifier un homme qu’il présente comme son ami, pour la cause du spiritisme.

    La polémique vient du fait que personne n’est d’accord sur la nature exacte de la collaboration entre les deux hommes. Par exemple, le cocher des parents de Robinson, Harry Baskerville, explique dans le cadre de la promotion du film de 1959 avec Peter Cushing et Christopher Lee que :

    Mr Doyle stayed for eight days and nights. I had to drive him and Bertie about the moors. And I used to watch them in the billiards room in the hold house. Sometimes they stayed long into the night, writing and talking together.

    John O’Connell complète ces propos en expliquant  que :

    Baskerville fed the controversy over the Hound’s authorship by claiming to have witnessed Robinson writing key sections of the story at Ipplepen, notably the 1742 manuscript outlining the curse of the Baskervilles. He also claimed that both Doyle and Robinson had thanked him for allowing them to use his name.

    Cela a toujours été contredit par le fils de Conan Doyle, Adrian (il n’a notamment aucun échange de lettres entre les deux hommes qui a été publié dans Arthur Conan Doyle : A life in letters)(je n’ai pas encore eu le temps de vérifier cette affirmation de l’auteur). Sur le site de la SSHF, on peut trouver une explication : Arthur Conan Doyle a précisé la nature de la collaboration avec le journaliste dans la première édition :

    Then came The Hound of the Baskervilles. It arose from a remark by that fine fellow, whose premature death was a loss to the world, Fletcher Robinson, that there was a spectral dog near his home on Dartmoor. That remark was the inception of the book, but I should add that the plot and every word of the actual narrative are my own.

    mais cela a été retiré par l’éditeur (et non par l’auteur) dans les rééditions. Ce qui donne une impression bizarre. J’aime beaucoup cette explication consensuelle. Par contre, John O’Connell complète en postface (et c’est là où du coup, il faut que je poursuive mes investigations) (n’hésitez pas si vous avez des infos). Dans une note accompagnant la parution du premier épisode dans le Strand :

    This story owes its inception to my friend, Mr Fletcher Robinson, who has helped me both in the general plot and in the local details – A.C.D.

    Dans la première version en livre, paru chez George Newnes en 1902, on trouve :

    My dear Robinson : it was to your account of a West-Country legend that this tale owes its inception. For this and for your help in the detail all thanks. Yours most truly, A. Conan Doyle.

    Dans la préface de ACD au livre The Complete Sherlock Holmes, en 1929, il y a :

    « The Hound of the Baskervilles » arose from a remark by that fine fellow whose premature death was a loss to the world, Fletcher Robinson, that there was a spectral dog near his house on Dartmoor. That remark was the inception of the book, but I should add that the plot and every word of the actual narrative was my own.

    Pourquoi a-t-il eu besoin de rajouter ces derniers mots ? Après, on peut se demander si ACD a partagé la somme qu’il a reçu pour le livre … C’est un peu sans fin tout cela.

    Pour ce qui est du livre (qui est très très beau par contre), je crois que son principal mérite est de nous faire connaître le personnage de Robinson, qui a d’ailleurs lui même créé un personnage de détective : Addington Peace.

    Références

    The Baskerville Leagcy – A confession de John O’CONNELL (Short Books, 2011)

  • Présentation de l’éditeur

    Des rumeurs de guerre civile sèment la panique dans un village de montagne. Des clans commencent à se former, mais les tensions convergent toutes vers Braulio, l’usurier, qui s’est rempli les poches avec l’argent des uns et des autres. Une chasse à l’homme s’engage, dans une nature desséchée par un soleil de plomb, où chacun laisse libre cours à la violence et au fanatisme.

    Marqué par l’Aragon, ses odeurs, ses couleurs, sa rudesse et par les souvenirs de la guerre civile espagnole, ce récit ne fait pourtant référence ni à un pays, ni à une époque. Il peut évoquer Faulkner, par son rythme incantatoire et les obsessions de l’écriture, ou Juan Rulfo, par la force des décors arides et sauvages.

    Biographie de l’auteur (par les éditions Attila)

    Né à Saragosse en 1935, José Antonio Labordeta a vécu presque toute sa vie en Aragon. Son père, professeur de latin, et arrêté au début de la guerre civile pour son activité militante et exclu de l’Université sous Franco. Labordeta se fait connaître comme poète, puis comme chanteur à texte, émule de Brassens. Auteur de fictions, réalisateur de documentaires sur la campagne espagnole, il est élu député aux Cortès en 1999, où il défraye la chronique et devient une gloire nationale en insultant des députés qui se moquaient de lui pendant sa prise de parole. Il a disparu en septembre 2010.

    Mon avis

    C’est un livre assez court, qui m’a beaucoup fait pensé au livre de Ramón Sender L’empire d’un homme chez le même éditeur. Cela vient bien évidemment du contexte : un village se divise en plusieurs groupes et s’oppose. Ici, il s’agit de trois groupes : deux hommes doivent fuir devant un la majorité des hommes du village à cause de leurs idées opposées, et ce à la suite de la disparition d’un troisième homme. Les esprits s’échauffent rapidement. Là dessus, un de ceux qui sont majoritaires se croit le maître du monde et décide de s’opposer à l’usurier du village. Manque de chance, celui-ci le tue et s’enfuit (pratiquement au même moment que les deux autres hommes). La chasse à l’homme commence.

    L’histoire est racontée de différents points de vue : de l’âne de l’usurier qui l’accompagne dans sa fuite à la sœur de l’usurier en passant par les différents groupes de villageois et le marchand ambulant (le seul neutre dans l’histoire). On suit leurs pensées, parfois interrompues, en plein milieu de phrase, par un dialogue. Cela donne quelque chose qui déroute parfois mais surtout qui est très vivant et ne s’essouffle pas à la lecture.

    Après, pour l’interprétation, je l’avais personnellement pris au sens littéral. Sans raconter la fin, je m’étais dit que c’était l’illustration de ce qui pouvait se passer dans un village dans le cas où deux visions s’opposent. Le seul moyen de réunir tout le monde dans ce cas c’est de trouver un troisième, qui sert de bouc-emissaire.

    Les éditeurs suggèrent une lecture plus approfondie car dans le récit, il y a des dominés (la sœur de l’usurier notamment) et des dominants (celui qui va se faire tuer ; il ne domine pas longtemps pour le coup). Celui qui survit n’est pas forcément le plus fort (on pense aussi à l’usurier).

    J’ai trouvé cette lecture très agréable et intéressante (je lirai Juan Rulfo un jour, c’est sûr). Elle m’a permis de découvrir entre autre la personne de José Antonio Labordeta. On peut écouter son Canto a la Libertad sur internet.

    Références

    Dans le tourbillon de José Antonio LABORDETA – traduit de l’espagnol par Jean-JAcques et Marie-Neige Fleury – gravures de Paz Boïra – postface de Antonio Pérez Lasheras (Attila, 2011)

  • Quatrième de couverture

    On ne reçoit en France que de trop parcimonieux échos de l’effervescence créatrice qui agite la Corée depuis la chute de la dictature, il y a une vingtaine d’années. Le cinéma coréen, dont les écrans français donnent de temps à autre un aperçu, fournit de saisissants témoignages de cet audacieux dynamisme, que connaît aussi la littérature, notamment dans le domaine des nouvelles longues.

    Les trois textes réunis dans ce recueil saisissent sur le vif un quotidien très contemporain, celui des auteurs, tous nés après 1970 ; ils affichent aussi un goût prononcé pour la dérision et des situations au burlesque parfois déjanté.

    Deux pied-nickelés se retrouvent emprisonnés à l’intérieur de la chambre forte qu’ils étaient en train de dévaliser et attendent que la police vienne  les délivrer ; un chanteur frustré incapable de chanter en rythme dans la chorale de son lycée se met à courir les karaokés pour enregistrer les voix de casseroles ; enfin, « J’étais un maquereau », de Kim Tae-yong, qui donne son titre au volume, est aussi la première et unique phrase que s’avère capable d’écrire un homme subjugué par la page blanche… Ou comment se faire une idée de la Corée contemporaine.

    Mon avis

    J’ai sûrement été conditionné par la quatrième de couverture et surtout que je lis peu de littérature asiatique mais j’ai trouvé justement que ces trois nouvelles étaient très différentes de ce que l’on pouvait lire d’habitude. Généralement, il y a une manière de raconter qui est différente par rapport à des littératures occidentales (française ou autres). Ici, ce n’est pas le cas en tout cas pour le mode de la narration et pour la première nouvelle du recueil.

    Les trois nouvelles ont à mon avis un point commun : le désenchantement. Chacun des personnages n’attend rien de sa vie (les braqueurs bras-cassés, le vieux qui était maquereau ; même le copain du gars qui chante faux, à quarante ans, est déjà blasé). Le héros de la deuxième nouvelle a atteint son objectif en montrant à ses camarades que l’on peut survivre en chantant faux et on se demande : et après ? Il a attendu vingt ans pour réaliser cela et a orienté toute sa vie là-dessus. Dans la première nouvelle, on a à faire avec deux bras-cassés qui ont ouvert un coffre d’une banque un vendredi soir avec l’aide d’une pauvre fille. Malheureusement, la porte se referme par accident. Les trois se se retrouvent enfermer tout le week-end dans le coffre. Les deux garçons qui ont un casier ne sont pas trop d’illusions sur le sort mais la jeune va être prête à tout pour s’en sortir, quitte à se vendre. L’auteur nous présente cela comme quelque chose de « normal », ou plus exactement de « pas si grave ». Ils sont blasés. La troisième nouvelle est la plus triste et la plus réussie aussi. Le vieux, le maquereau, ne sait ni lire ni écrire ; la jeune fille qui s’occupe de lui va lui apprendre. Il va dès lors se retrouver comme bloquer sur son passé (qu’il nous raconte au travers du prisme de la figure du père et d’un livre) car il n’arrivera pas à la coucher sur le papier (il n’arrive pas à s’en décharger). Je ne vous parle pas de la jeune fille qui couche avec le vieux.

    Finalement, je m’interroge sur ce que je dois penser de la Corée d’aujourd’hui (ne regardant pas beaucoup de films, je ne peux même pas me baser sur une quelconque culture cinématographique). Je vous demande donc conseils : quels sont vos expériences avec la littérature coréenne ? Avez-vous ressenti la même chose ?

    Références

    Recueil de trois nouvelles :

    • Prisonniers de la chambre forte de Kim EON-SOO
    • D le décalé de Kim JUNG-HYUK
    • J’étais un maquereau de Kim TAE-YONG

    Les trois nouvelles ont été traduites dans le cadre des ateliers de traduction organisés par l’Institut coréen de la traduction littéraire.

    Éditions Cartouche, 2011

  • C’est la troisième adaptation du Portrait de Dorian Gray que je lis en bandes dessinées et c’est celle que je trouve la plus réussie.

    L’histoire est bien évidemment respectée (avec quelques ajouts mineurs) même si la partie sur la vie de Dorian Gray entre la mort de Sibyl Vane et le meurtre de Basil est occultée rapidement. Enrique Corominas a pris le parti de changer la structure du roman pour prendre celle d’une pièce de théâtre en cinq actes, précédés d’un prologue introductif (Dorian parle à son chat pour lui expliquer toute l’histoire) : Papillon (acte I), Masque (acte II), Livre (acte III), Poignard (acte IV), Champagne (acte V). Chaque début d’acte débute par le portrait qui se dégrade au fur et à mesure. J’ai aimé que l’auteur ne fasse pas une bête retranscription du livre mais se l’approprie pour nous donner sa vision. Ce qui m’a beaucoup plus aussi c’est qu’il resserre l’action autour de Dorian Gray, de Sibyl et fasse moins intervenir Lord Henry et ses aphorismes, finalement comme si l’histoire parlait d’elle-même et que les bons mots ne servaient qu’à masquer le propos. Ce qu’il y a aussi de très intéressants c’est les références directes au livre de Huysmans et aux illustrations de Salomé faites par Beardsley. L’auteur dit dans sa postface qu’il s’est inspiré d’autres artistes de l’époque mais je ne connais pas (et ne peut donc pas en parler).

    Les illustrations sont aussi très intéressantes et parle beaucoup. Ce qui m’a le plus marquée (mais peut être est-ce que je me fais des idées), c’est que les images sont comme aspirées par le haut alors que le visage de Dorian Gray (avec sa forme de triangle inversé) est lui aspiré vers le bas. Pour Lord Henry, c’est un peu la même chose. Pour les autres personnages et les intérieurs, le dessin est plus en rondeur, plus dans l’onirisme. Les décors extérieurs sont eux plus dans l’impressionnisme, plus suggérés. Chaque case est à mon avis comme un petit tableau.

    Corominas dit dans la postface qu’il a aussi fait varier les couleurs du plus clair, pour le premier acte, au plus foncé pour le cinquième. Je nuancerai en disant que les couleurs varient bien mais de manière moins tranchée. Le premier acte est dans les couleurs bonbons, un peu féérique, le cinquième est bien sombre mais le troisième a des couleurs très cosy je trouve, très « je me retrouve chez moi, tranquille, après qu’on se soit suicidé pour moi ».

    En gros, j’ai beaucoup aimé.

    BD lu dans le cadre du challenge Born To Be Wilde de Lou.

    Références

    Dorian Gray de Enrique COROMINAS – traduction de Carole Ratcliff (Galerie Daniel Maghen, 2011)

  • Livre lu également par Laure et par Ys.

    Quatrième de couverture

    Une comtesse charge un homme de cataloguer la bibliothèque de son château.

    Cet homme traverse les nuits et les jours du domaine, franchit les apparences, lit tous les livres, même ceux qui ne sont pas écrits et dont il invente l’intrigue, à mesure qu’il découvre que les morts ne sont pas morts, ni les fantômes ceux qu’on croyait, ni les vérités celles qu’on admettait.

    En fin de compte, c’est de la littérature elle-même qu’il s’agit, et à laquelle il est rendu ici le plus beau des hommages.

    Mon avis

    Ce livre est magnifique pour plein de raisons. J’avais lu le précédent ouvrage de l’auteur Bibliothèques de nuit. Je l’avais acheté pour le titre et du coup, je n’avais rien compris car je m’étais fait une idée qui ne correspondait pas à ce qu’il y avait dans le livre. J’avais passé toute ma lecture à me demander quand est-ce que ce que je cherchais apparaîtrait. Du coup, j’ai envie de le relire maintenant car avec ce roman Thierry Laget m’a définitivement conquise.

    L’histoire est très intéressante car on ne sait jamais où est la vérité. On y croit, même si cela ressemble à un conte de fées inversé, au monsieur qui est devenu riche en une nuit, qui a fait plein de voyage pour dépenser son argent et qui se retrouve à classer la bibliothèque d’une comtesse. Mais le roman semble après être mouvant, on ne sait plus ce qui est vrai et ce qui ne l’est pas. Cela commence par le château en lui-même qui décolle du sol, des fantômes, des ombres et lumière qui reste allumer tout le temps (la lumière du lecteur qui veille). Les personnages semblent aussi mouvant, ne pas savoir comment ils doivent agir. D’une minute à l’autre, ils deviennent contradictoires. L’âge du narrateur semble aussi mouvant. Il est un coup vieux comme la Comtesse puis il arrive à séduire (ou pense avoir séduit) plein de jeunettes.

    Le style est beau, juste beau. Il donne une impression d’une désuétude, de s’être installé hors du temps. Quand tout à coup on nous parle subprimes, on se désenchante en ce demandant où on est. Un premier exemple quand le narrateur observe la galerie de portrait de la propriétaire du château :

    Sans doute, pour des gens tels que moi, qui n’ont pas d’ancêtres et ne se sont illustrés en rien, le miroir est le moins fidèle des portraits : mais c’est un imposteur qui prend votre personne et l’aplatit, la rend aussi inconsistante qu’un rai de lumière, et il ne peut se prévaloir de la signature de l’artiste pour donner quelque prix au tableau. (p. 40)

    Dix lignes sur un taille-crayon (où est-ce que l’on peut trouver cela dans un autre roman contemporain) :

    J’essayais de recouvrer mes esprits, de me concentrer sur une réalité plus concrète, moins soupçonneuse, d’élire par exemple pour sujet de mes observations ce taille-crayon, semblable à ceux que les écoliers fourraient autrefois dans leur trousse, parallélépipède rectangle d’acier brossé ou guilloché sur le corps duquel une lame inclinée est maintenue par une vis au bord d’un orifice tronconique muni d’une encoche prévue pour évacuer les résidus, sciure et graphite, instrument d’une rusticité, d’une simplicité d’usage, d’une perfection telles et se logeant dans la main d’un poids si amical qu’on est tenté d’y débiter tous les crayons de couleur de la boîte, pour le plaisir de voir se dérouler sans fin ce copeau de bois d’ancien volumen. (p. 246)

    Mon seul regret est que je pense que plein de références m’ont échappé par mon manque de culture littéraire.

    Références

    La lanterne d’Aristote de Thierry LAGET (Gallimard, 2011)

    P.S. La lanterne d’Aristote est l’appareil masticateur (la bouche) de l’oursin.

    P.P.S. Une petite vidéo, de chez Mollat, pour la route (moi aussi, je veux vivre dans une bibliothèque de château) :

    [yframe url=’http://www.youtube.com/watch?v=1-fZNfmds4Y’]

  • Grâce à Matilda, j’avais découvert les deux précédents tomes des aventures de ces trois jeunes gens et de leur chat Watson. Pour ce troisième opus, les voilà en train de résoudre une enquête à Londres sous la neige. Encore une fois les trois auteurs signent ici une aventure palpitante, pleine de charme (on prend plaisir à retrouver les personnages et la reconstitution de l’époque est impeccable) avec un graphisme détaillé et typé (pour les personnages j’entends).

    L’histoire est la suivante : un jeune lord vient d’hériter de la fortune et du titre de son père à seulement dix neuf ans. Il n’en dispose pas franchement car il est soumis à l’autorité d’un conseil de famille. Or le jeune homme s’est épris d’une chanteuse de cabaret de l’East End et souhaite en faire sa femme. Or celle-ci et son père sont soumis à un terrible chantage. Bloody Percy (c’est le méchant avec un nom comme cela), sous l’égide d’un ancien flic, assure la protection de leur cabaret sous condition (de paiement bien évidemment). Mais ils n’ont plus les moyens de payer.

    Là dessus interviennent les quatre de Baker Street, mandatés par Sherlock Holmes pour surveiller le lord dont la mère est inquiète (mais lui, il a autre chose à faire). En effet, leur surveillance commence dans le cabaret le soir où Bloody Percy décide de le brûler. Les francs tireurs de Baker Sreet sauvent alors tout le monde des flammes. S’en suit des tentatives d’enlèvements, de meurtres, des internements d’office … Tout cela en 56 pages.

    Si vous avez aimé les deux premiers tomes, vous ne pourrez qu’aimer le troisième. Sinon, il est temps de découvrir !

    Références

    Les Quatre de Baker Street – tome 3 : Le rossignol de Stepney de J.B. DJIAN, de Olivier LEGRAND (scénario) et de David ETIEN (dessin et couleur) (Vents d’Ouest, 2011)

  • Anthony Trollope commence cette courte nouvelle (55 pages) par une description du Puy-en-Velay qui donne envie d’aller faire du tourisme là-bas (en gros, pour faire autre chose que d’aller chercher des lentilles)(la parenthèse précédente est dédiée à mon père). On a cette impression persistante que La Puy est la ville où il faut être (même si le livre a été écrit il y a plus de 100 ans).

    On peut faire tenir le résumé en une phrase : Mr Lacordaire, dont on ne sait rien, veut demander en mariage Ms Thomson, veuve, mère de deux jeunes filles, dont une placée en pension au Puy.

    Trollope jette un regard tout en contradiction avec le titre. En lisant Le château du prince de Polignac, on s’imagine un univers plein de romantisme, d’amour … Or, l’auteur propose un récit empreint de pragmatisme où l’intérêt pratique du mariage est prépondérant : revenu, situation professionnelle du mari. C’est très drôle du coup car cela vire rapidement à la critique d’une certaine société et aux sarcasmes. En prenant à contre pied les clichés habituels (femme romantique et homme pragmatique), l’auteur renforce l’intérêt que l’on peut avoir puisqu’il prend par « surprise » le lecteur.

    Au passage, Anthony Trollope dénonce une société anglaise qui a rejeté cette jeune veuve anglaise, arrivant des Indes, après avoir perdu son mari (pour le prétexte qu’elle n’était pas assez riche).

    L’Herne va sortir au début du mois de novembre une autre nouvelle de cet auteur dans la même collection. Celle-ci est issue d’un recueil de nouvelles Tales of All Countries.

    Références

    Le château du prince de Polignac de Anthony TROLLOPE – traduit de l’anglais par Béatrice Vierne (L’Herne – Carnets, 2011)

  • Vous pouvez retrouver, entre autre sur le net, les avis de Matilda, de George et de Lily Tigre.

    Andrew Lane a voulu imaginé dans cette série comment Sherlock Holmes est devenu Sherlock Holmes. Visiblement, cela a commencé quand il avait quatorze ans et qu’il n’a pas pu retourner chez lui après une dure année au pensionnat de garçon, suite à l’absence de son père (pour des causes militaires) (et que Mycroft ne veut pas l’autoriser à rentrer chez lui (parce que je trouve que son père à mon avis il doit être un peu mort) parce que sa sœur a l’air bizarre et que sa mère pleure). Il est envoyé chez son oncle, frère de son père (qui a un nom a couché dehors mais apparemment c’est une tradition que les hommes Holmes aient des noms étranges) et qui en plus ne fait qu’écrire des serments,  et sa tante, qui parle tout le temps toute seule (parce que son mari ne lui parle pas tout simplement). Tout cela promet des vacances palpitantes.

    Mais comme tous les jeunes de cet âge-là (dans les romans surtout)(et peut être un peu plus jeune), Sherlock Holmes se découvre des ennemis et des amis en même temps qu’un mentor (ce qui va bien sûr augmenter l’intérêt des vacances, il va s’en dire). Son ennemi sera dans un gros paquet : un baron français qui veut anéantir l’Angleterre, les sous-fifres de celui-ci et des abeilles. Des amis, il en aura deux de son âge Matty, un orphelin qui vit du chapardage avec son cheval et sa barcasse, et Virginia la fille du fameux mentor. Celui-ci porte le doux nom de Amyus Crowe. Il est américain, chasseur de prime et a été engagé par Mycroft pour que son frère apprenne d’autres choses que ces bêtises qu’on lui apprend au pensionnat (qui se sert encore de nos jours des mathématiques, du latin, de l’anglais ?), c’est-à-dire à reconnaître les plantes, survivre en situation adverses, traquer une proie humaine ou non (qui osera dire que cela ne peut pas servir si on ne s’appelle pas Sherlock Holmes). Pour résumer, il luttera sontre ses ennemis avec son mentor et ses deux amis.

    Que dire d’autres ? J’ai cru que j’avais progressé en anglais de manière vertigineuse car j’ai tout compris à part trois scènes (mais depuis j’ai eu la preuve par a + b que ce n’est pas le cas).  Donc le niveau d’anglais est assez simple.

    Tout dans ce livre est vraiment sympathique et bien trouvé. L’histoire est rythmée, les personnages bien marqués, on apprend des petites choses sur l’Angleterre de l’époque. Le livre a un petit club des Cinq (je pense à ça car le garçon va habiter chez son oncle et sa tante, comme dans le club des Cinq ils vont chez Tante Cécile et l’oncle scientifique qui s’isole sur une île pour faire ses expériences). Je trouve que pour un pré-adolescent, c’est à recommander (c’est sorti en français depuis ne vous inquiétez pas).

    Le seul problème est que le garçon aurait pu ne pas s’appeler Sherlock Holmes, je n’aurais pas vu la différence (il n’y a aucune spécificité du personnage : il se sent seul. C’est l’archétype de la plupart du anti-héros de la plupart de ces romans jeunesse). Je trouve cela un peu gênant tout de même car c’est un peu l’argument commercial du livre. Je me demandais si finalement Andrew Lane n’aurait pas eu intérêt à commencer par la fac (ce qui est dans l’intention de l’auteur) ou choisir un mode de narration moins linéaire. Ici, on sent gros comme une maison que la série commence quand Sherlock a quatorze et va finir quand il en aura une vingtaine, que l’on va suivre cela chaque année.

    Basé sur de bonnes idées, le livre manque de complexité pour faire un bon pastiche mais reste un très bon livre jeunesse. Mais pas de soucis, je lirais les autres car ils sont dans ma PAL et que surtout que j’aime les lectures qui reposent comme celle-là (même si il n’y pas du SH dedans).

    Références

     Young Sherlock Holmes – tome 1 : Death Cloud de Andrew LANE (MacMillan, 2010)