Cecile's Blog

  • Quatrième de couverture

    Cuba, 1977. Sur la plage d’une île à l’ouest de La Havane, dans le vieux bungalow qu’elle a hérité d’un médecin américain, la famille Godínez s’active à barricader portes et fenêtres pour prévenir l’arrivée de l’ouragan Katherine. Sous le même toit sont réunies trois générations.

    Alors que le calme s’installe avant la tempête, le jeune Jafet, qui rêve de vivre aux États-Unis, prend le large à bord d’un radeau de fortune baptisé Le Mayflower. Impuissante, la petite Valeria assiste au départ de celui qui préfère fuir le régime cubain plutôt que le cyclone, de celui qui deviendra « le navigateur endormi ».

    Dans ce vieux bungalow se concentre toute l’histoire du pays : l’esclavage, la guerre contre l’Espagne, la dictature de Batista, l’ouragan révolutionnaire, la tragédie des balseros… Excellent conteur, Estévez fait de ses personnages les symboles de l’histoire et de la culture cubaines, et éclaire le présent à la lumière du passé.

    Mon avis

    J’ai adoré ce livre. Je vous le dis de suite pour que vous sachiez à quoi vous en tenir. C’est un livre d’accès difficile à mon avis à cause du style et du fait qu’il n’y a pas d’histoire à part de dire qu’il y a des gens dans une maison à Cuba qui attendent. L’attente dans un roman ce n’est jamais bon mais ici, cela passe grâce au style. C’est un peu le serpent qui se mort la queue : le livre est difficile à cause du style qui permet de faire passer une histoire qui n’aurait pas passionné avec un autre style.

    Une phrase du livre résume son propos :

    Elle commencera à écrire ce livre, qui sera l’histoire d’une vieille maison de bois devant la mer, ainsi que celle d’une ou de plusieurs évasions, d’un cyclone et de quelques fantômes. (p. 473)

    L’histoire m’a fait pensé aux Vagues de Virginia Woolf. On est à la fin des années 70 dans un petit bungalow sur une plage de Cuba. Rien autour à part la mer. Sont réunis les grands-parents, les parents, la bonne de 90 ans, la fille de la bonne, les petits-enfants mais aussi les morts qui sont présents dans la tête de tout le monde : ceux qui se sont enfuis vers le Nord, ceux qui se sont suicidés, ceux qui sont des morts de l’Histoire de Cuba. Ce qui m’a rappelé Les Vagues c’est qu’aucun personnage ne se parle sauf exceptions, mais chacun vit dans son monde, se remémore son histoire propre. Il ne parle jamais de leurs histoires communes. C’est notamment l’occasion de se repasser l’Histoire de Cuba depuis les années 1890.

    Comme je le disais, un autre élément important du livre est l’attente. Il y a l’attente de la tempête mais surtout d’un monde meilleur qui n’arrive pas malgré les promesses. Il y a les plus vieux qui n’en peuvent plus d’attendre après tous les malheurs qu’ils ont subi, il y a ceux qui tolèrent encore ou ceux qui fuient. Je crois que l’attente est un élément très important de la littérature cubaine ; j’avais déjà eu cette impression avec les livres de Leonardo Padura. Cette attente est à mettre avec ce que représente le Nord pour les plus jeunes habitants du bungalow :

    Quoique ces perceptions fussent sans doute ultérieures, le Nord était aussi le signe de la quiétude, du plaisir, de la joie, du bien-être, ou, ce qui revenait au même, de la bonne chère, du bon travail, du bon sommeil et du bon temps. (p. 481)

    Pour parler du style, j’ai lu dans Lire que c’était un style baroque. Je dirais moi que c’est un style qui ressasse, qui redit en donnant encore un peu plus de détails à chaque fois.

    Cela se passa un après-midi au bord de l’étang. Un après-midi lumineux d’avril 1963. Année fameuse en d’autres lieux qui n’étaient pas Cuba, encore moins Carabello, année de la mort d’Edith Piaf et de Jean Cocteau, année de l’assassinat du président Kennedy.

    Cela faisait quatre ans que les rebelles étaient entrés à La Havane. La crise des missiles avait eu lieu l’année précédente. Personne ne s’était encore vraiment rendu compte du changement définitif, sans appel, sans retour, irréversible d’une certaine vie, personne n’avait vraiment pris conscience qu’une vie différente commençait à s’imposer. Peu comprirent l’irrévocabilité de cette transformation qui avait lentement, insensiblement commencé. (p. 344)

    Je trouve aussi le paragraphe final magnifique :

    Alors, fermant les yeux sans cesser de ramer, il pense, ou dit :

    – Sans aucun doute, ce voyage est un rêve.

    Et en supposant que nous soyons d’accord et que nous croyions comme lui que ce voyage est un rêve, qui aurait le courage de révéler à ce rameur, intrépide ou naïf, que les rêves ont une fin ? (p. 488)

    En conclusion, si vous ouvrez ce livre pour le lire, persistez même si cela vous paraît très difficile. C’est un livre qui en vaut la peine ; il faut juste prendre son temps pour le savourer.

    Ce livre a été chroniqué dans le cadre d’un partenariat avec le site Chroniquesdelarentreelitteraire.com et dans le cadre de l’organisation du Grand Prix Littéraire du Web Cultura.

    La biographie de l’auteur sur Wikipedia.

    Références

    Le navigateur endormi de Abilio ESTÉVEZ – traduit de l’espagnol (Cuba) par Alice Seelow (Grasset, 2010)

  • Présentation de l’éditeur

    Père placide et d’humeur conciliante, voilà Marc parti vers le sud avec sa fille Anne qu’il vient d’enlever à son hôpital psychiatrique pour le weekend. Mais la petite escapade tourne bientôt à la cavale. Anne ne veut plus rentrer, surtout plus à l’asile. Elle veut aller loin, très loin, le plus loin possible. Constellée d’incendies bizarres et semée de cadavres, la drôle d’équipée se transforme vite en un hallucinant road-movie.

    Avec férocité, avec fragilité aussi, les personnages de Pascal Garnier s’accrochent à leurs rêves naïfs ou dérisoires, en éclopés de la solitude fuyant le réel pour davantage s’y perdre. Ange du mal déguisé en cordon bleu ou en tueur à gages flapi, ce sont décidément des gens comme vous et moi, des monstres candides en proie à leur plus chère folie.

    Mon avis

    C’est le deuxième Pascal Garnier que je lis et celui-là m’a énormément plu, énormément ! L’autre, L’A26, m’avait un peu déçu car je m’attendais à un truc extraordinaire tellement on lit des avis positifs sur les blogs. Mais là pour le coup, c’est trop bien. Peut être parce que j’ai été en empathie avec Marc. Il a envie de partir loin, de quitter sa vie qu’il n’arrive plus à supporter. Le prétexte ce sera de se rapprocher de sa fille en faisant un voyage ; ils iront du Touquet à Agen. Le problème c’est que parfois une personne en hôpital psychiatrique a des raisons d’y être. Finalement, Marc se sent aussi seul qu’avant et ne supporte pas plus sa nouvelle vie que l’ancienne. Finalement, Le Grand Loin dont parle le titre ce ne sera pas géographique mais plutôt mental. Il y a la même noirceur que dans L’A26 mais l’histoire m’a semblé plus convaincante comme je l’ai dit. Il y a aussi les mêmes personnages originaux (je n’en ai jamais vu dans les livres des comme ça) et un peu paumés, un peu (même beaucoup) marginaux. C’est un roman mais un roman noir. Je vais continuer du coup ma découverte de cet auteur !

    D’autres avis

    Celui de Dasola, de Pascale, de Hannibal le lecteur, de Cuné, d’Esmeraldae, de Bene, de Sylvie, de Moisson Noire, d’Yv, de Cathe, de Laurent, et sûrement d’autres (merci de vous signaler).

    Références

    Le Grand Loin de Pascal GARNIER (Zulma, 2010)

  • Quatrième de couverture

    L’enfant veut lire, tout l’en empêche. Ce qui contrarie son « plaisir divin » l’augmente aussi. Une abeille, un rayon de soleil, l’heure du goûter ou du dîner, autant de freins et de souvenirs liés aux livres d’une façon impérieuse. Quand Marcel Proust adulte feuillettera ces livres, c’est « avec l’espoir de voir reflétés sur leurs pages les demeures et les étangs qui n’existent plus ».

    Mon avis

    Mon premier Proust ! Je suis trop fière. C’est encore un des livres que j’ai été obligé de prendre à la librairie à cause de Matilda. Mais je ne regrette pas du tout, rassurez-vous.

    C’est en réalité une préface de Marcel Proust à sa traduction du livre de John Ruskin Sésame et les lys. Elle est divisée en deux parties. Une première où Proust une journée d’enfance passée à lire. Plutôt que de parler des sentiments qu’il a eu à la lecture, il parle de son environnement, de ses souvenirs de la nature, de ce qu’il a ressenti quand son entourage a essayé de lui faire fermer son livre. Finalement, c’est ce qui l’entoure qui reste important et pas vraiment le livre (dont il dira du mal dans la deuxième partie). En effet, il était en train de lire Le Capitaine Fracasse, qu’il dit avoir adoré à cet âge mais en l’ayant repris plus tard il a été déçu car alors qu’il pensait que Théophile Gautier ne commençait qu’à lui dévoiler le monde (et qu’il fallait continuer à lire d’autres œuvres du même auteur), aujourd’hui il en arrive à la conclusion que c’était tout ce qu’il avait à dire.

    Pour vous donnez une impression de cette première partie, un petit extrait (franchement, si c’est ça À la recherche du temps perdu je signe de suite) :

    Puis la dernière page était lue, le livre était fini. Il fallait arrêter la course éperdue des yeux et de la voix qui suivait sans bruit, s’arrêtant seulement pour reprendre haleine, dans un soupir profond. Alors, afin de donner aux tumultes depuis trop longtemps déchaînés en moi pour pouvoir se calmer ainsi d’autres mouvements à diriger, je me levais, je me mettais à marcher le long de mon lit, les yeux encore fixés à quelque point qu’on aurait vainement cherché dans la chambre ou dehors, car il n’était situé qu’à une distance d’âme, une de ces distances qui ne se mesurent pas par mètres et par lieues, comme les autres, et qu’il est d’ailleurs impossible de confondre avec elles quand on regarde les yeux « lointains » de ceux qui pensent « à autre chose ». Alors, quoi ? ce livre, ce n’était que cela ? Ces êtres à qui on avait donné plus de son attention et de sa tendresse qu’aux gens de la vie, n’osant pas toujours avouer à quel point on les aimait, et même quand nos parents nous trouvaient en train de lire et avaient l’air de sourire de notre émotion, fermant le livre, avec une indifférence affectée ou un ennui feint ; ces gens pour qui on avait haleté et sangloté, on ne les verrait plus jamais, on ne le saurait plus rien d’eux. Déjà, depuis quelques pages, l’auteur, dans le cruel « Épilogue », avait eu soin de les « espacer » avec une indifférence incroyable pour qui savait l’intérêt avec lequel il les avait suivis jusque-là pas à pas. L’emploi de chaque heure de leur vie nous avait été narrée. Puis subitement : « Vingt ans après ces événements on pouvait rencontrer dans les rues de Fougères un vieillard encore droit, etc. » Et le mariage dont deux volumes avaient été employés à nous faire entrevoir la possibilité délicieuse, nous effrayant puis nous réjouissant de chaque obstacle dressé puis aplani, c’est par une phrase incidente d’un personnage secondaire que nous apprenions qu’il avait été célébré, nous ne savions pas au juste quand, cet étonnant épilogue écrit, semblait-il, du haut du ciel, par une personne indifférente à nos passions d’un jour, qui s’était substitué à l’auteur. On aurait tant voulu que le livre continuât, et si c’était impossible, avoir d’autres renseignements sur tous ces personnages, apprendre maintenant quelque chose de leur vie, employer la nôtre à des choses qui ne fussent pas tout à fait étrangères à l’amour qu’ils nous avaient inspiré et dont l’objet nous faisait tout à coup défaut, ne pas avoir aimé en vain, pour une heure, des êtres qui demain ne seraient plus qu’un nom sur une page oubliée, dans un livre sans rapport avec la vie et sur la valeur duquel nous nous étions bien mépris puisque son lot ici-bas, nous le comprenions maintenant et nos parents nous l’apprenaient au besoin d’une phrase dédaigneuse, n’était nullement, comme nous l’avions cru, de contenir l’univers et la destinée, mais d’occuper une place fort étroite dans la bibliothèque du notaire, entre les fastes sans prestige du Journal de modes illustré et la Géographie d’Eure-et-Loir

    Dans la deuxième partie, Marcel Proust se fait plus essayiste que romancier. Il prend prétexte d’une idée de John Ruskin (la lecture d’ouvrage savant est la même chose que de discuter avec des gens savants) pour développer une idée (il répond notamment que la lecture permet une solitude et donc une réflexion que la discussion ne permet pas), ou plutôt son idée, sous-entendue dans la première : la lecture sert à sublimer le monde et la vie, à encourager la flânerie mais ne doit aucunement le remplacer.

    C’est un texte magnifique par le propos et par l’écriture que je découvre ici (et pourtant ce n’est pas faute que personne ne m’en ait parlé).

    Références

    Sur la lecture de Marcel PROUST (Mille et une nuits numéro 24, 1997)

  • C’est mon premier manga et tout ça est de la faute de Marion et Matilda : Marion parce que je ne connaissais pas du tout et elle a fait un billet dessus pour faire connaître et Matilda qui m’a poussé à me l’offrir à Gibert.

    Ça m’a rajeuni parce que les mangas je regardais ça à la télé quand j’étais petite le mercredi. Quand je suis allée à la fac, j’ai un copain qui lisais des mangas de Nicky Larson en cours de calcul intégral et qui m’avait intrigué en me disant qu’il y avait des différences entre le dessin animé et le manga (pour ceux qui se rappelle cela concerne le coup de marteau quand une jeune fille passe). Mais je ne m’étais jamais lancé dans cette lecture. Là j’ai tenté et je dirais que c’est sympa parce que cela détend et surtout ici l’histoire et les personnages sont très bien campés (le côté original étant les méthodes du héros qui sont très inspirées de celles de Sherlock Holmes). Je n’en lirai pas forcément énormément parce que je préfère les dessins des BD (ils sont plus importants dans la BD que pour le manga ; il m’a semblé que le dessin en manga illustre tandis que le dessin en BD raconte et le texte illustre même si il sert).

    Que je vous raconte quand même l’histoire !  Shinichi Kudoa 17 ans, vit seul depuis trois ans (ses parents sont partis aux États-Unis car son père est un très célèbre écrivain de roman policier), a comme voisin le professeur Agasa (un savant fou), est un fan absolu de Sherlock Holmes et de Ranpo Edogawa (célèbre écrivain japonais de roman policier) et est élève en première au lycée Tivedétec. Il résout des détectives à ses heures perdues, en impressionnant les adultes et entre autre l’inspecteur Maigret qui semble aussi impuissant que Lestrade face au talent du jeune détective. Il entretient une relation chien et chat avec une jeune demoiselle Ran (ils s’aiment pourtant). Un jour, ils vont ensemble à la fête foraine et montent dans une montagne russe où un jeune homme est décapité. Il résout l’enquête de manière brillante mais repère deux hommes dans le manège qui sont très suspects. Il les suit donc et découvre des histoires louches mais les méchants s’en rendent compte et lui donne un poison qui le fera rétrécir en un enfant de six ans. Pour que Ran ne le reconnaisse pas, il met des lunettes et change de nom Conan Edogawa. Il va habiter chez elle car son père est détective et espère ainsi découvrir qui l’a empoisonné pour trouver un remède. Le problème est que c’est un mauvais détective et qu’il passe donc plus de temps à résoudre les affaires du père qu’à chercher ses empoisonneurs.

    Références

    Détective Conan : Tome 1 – manga de Gosho Aoyama (Kana, 2006)

  • Quatrième de couverture

    Elle rêve d’être professeur, mais échoue au certificat et se fait bibliothécaire. Esseulée, soumise aux lois de la classification Dewey et à l’ordre le plus strict, elle cache ses angoisses dans un métier discret. Les années passent, elle renonce aux hommes, mais un jour un beau chercheur apparaît et la voilà qui remet ses bijoux. Bienvenue dans les névroses d’une femme invisible. Bienvenue à la bibliothèque municipale, temple du savoir où se croisent étudiants, chômeurs, retraités, flâneurs, chacun dans son univers. Mais un jour ce bel ordre finit par se fissurer.

    Mon avis

    J’ai volé cette idée de lecture chez Angélita. Je l’en remercie beaucoup car j’ai passé un très bon moment même si ce moment a été trop court, seulement 65 pages.

    Avant le livre, le ton nous est donné par le petit paragraphe sur l’auteur

    J’aime les aubergines, l’huile d’olive, et les confitures de ma mère, j’ai horreur des automobiles, je n’ai pas de téléphone portable, je suis féministe et j’ai la phobie des portes ouvertes. Je suis allergique aux acariens, aux chats et aux sulfites. J’aime me baigner dans la mer, les lacs et les rivières. Je trouve qu’on ne parle pas assez de Jacques Roubaud et de Claude Simon, et qu’il y a trop de bruit médiatique en ce monde. Je n’aime pas acheter un livre sans savoir ce qu’il y a dedans.

    et surtout la dédicace

    À toutes celles et à tous ceux qui trouveront toujours plus aisément une place en bibliothèque qu’en société, je dédie ce divertissement.

    Le ton est léger, drôle et prête donc à sourire. Une bibliothécaire arrive un matin dans son rayon géographie et trouve un homme endormi. Elle le réveille et commence avec lui un monologue (c’est assez paradoxal mais il n’y a qu’elle qui parle). Au début, elle se plaint que son rayon est mal aimé par rapport à celui d’Histoire ou de celui des pimbêches de la Littérature. Elle en profite par faire l’apologie de la classification de Dewey (en expliquant toute l’histoire qui est très intéressante pour une novice comme moi). Elle parle surtout de son mal être et de sa solitude dans son travail, dans sa vie privée. Une solitude qui l’a rendu très sensible au vide alors quand dans sa bibliothèque, on vide la cote 400 pour ne rien y mettre à la place. Cela l’a fait un peu grincer des dents. Au fur et à mesure que le récit avance, on comprend que son métier est quand même très important pour elle et surtout les lecteurs qu’elle peut croiser, les gentils, les timides, les hautains. Elle met un point d’honneur à encourager la lecture.

    Je trouve que c’est le récit de ce que l’on peut un peu tous ressentir pour notre travail (pas tous le monde malheureusement) : on y est attaché mais parfois il y a un ras-le-bol ! Je le redis : l’écriture est drôle et fraîche. Du coup, cela vous remet du baume au moral. Merci Angélita.

    Références

    La cote 400 de Sophie DIVRY (Les Allusifs, 2010)

  • Quatrième de couverture

    New York. Depuis plusieurs jours, un homme vient, seul, assister, dans une salle du MOMA, à la projection au ralenti du film d’Hitchcock Psychose, proposée, sous le titre 24 Hour Psycho, par le plasticien Douglas Gordon.

    Bien loin de là, en plein désert, le taciturne Richard Elster, universitaire à la retraite, accueille avec réticence chez lui le jeune cinéaste Jim Finley qu’intéresse la collaboration scientifique apportée par ce spécialiste de la « loi de l’extinction » au Pentagone pendant la guerre d’Irak. Les deux hommes sont rejoints dans leur solitude par Jessie, la fille d’Elster…

    Des images étirées à l’infini du film d’Hitchcock aux mots, toujours plus rares, qu’échangent trois personnages déconnectés du monde face aux illisibles étendues du désert, Point Oméga invite à faire l’expérience de perceptions inédites à la faveur d’une temporalité mutante, et à prendre la mesure secrète du monde.

    Plus énigmatique que n’importe quel secret-défense, plus assourdissant que le fracas des guerres, ce roman en forme d’arrêt sur image édicte la sidération du signe face à la langue impitoyablement étrangère que, depuis les origines, profère la matière qui donne forme à l’univers.

    Mon avis

    Après ma lecture ratée d’Americana, j’avais à cœur de comprendre pourquoi Don DeLillo était considéré comme un des grands écrivains américains. On m’a conseillé Outremonde et L’homme qui tombe (qui sont donc du coup tous les deux dans ma PAL) mais ils sont juste énormes. Alors quand j’ai vu à la librairie que le nouveau Don DeLillo était tout compact (140 pages) et qu’en plus ma libraire avait beaucoup aimé … je n’ai pas trop hésité !

    J’ai eu raison parce que j’ai trouvé le livre réussi dans son propos. Il y a des histoires communes avec Americana, notamment le jeune homme qui veut faire un film pour expliquer ce qu’est vraiment l’Amérique, et notamment qui a décidé la Guerre en Irak. Il montre notamment que Richard Elster est très affecté par cette guerre, et que maintenant il se laisse aller jusqu’à ce que seul sa fille puisse compter pour lui. Cette partie n’est pas du tout exploité par Don DeLillo comme si finalement c’était vain.

    Son personnage principal est le temps, les personnages secondaires les humains qui gravitent autour de ce temps, un temps différent suivant l’endroit où on se trouve. Le temps quand on est en Californie, le temps quand on est sur la côte est, le temps quand on est dans le désert, l’avancée du temps, le temps quand quelqu’un disparaît. Pour figurer tout cela, il était obligé d’avoir des personnages secondaires pour décrire les sensations. J’ai beaucoup aimé les parties sur 24 Hour Psycho qui parle de ce que serait un film si on le ralentissait au rythme de la vie, de tous les détails que l’on pourrait percevoir alors. L’entremêlement des personnages, et surtout de qui est qui, est à mon avis très subtil et très fin et marque l’importance des coïncidences dans la vie.

    Americana était un des premiers livres publiés de Don DeLillo : il marquait une sorte de désespérance par rapport à l’Amérique que l’on ne voit pas dans les journaux. Dans Point Oméga, c’est un Don DeLillo de la maturité qui a appris à vivre avec son Amérique et qui s’intéresse au temps et surtout à ce que le temps gardera.

    En conclusion, ce livre m’a permis de me réconcilier avec un auteur !

    Références

    Point Oméga de Don DELILLO – traduit de l’américain par Marianne Véron (Actes Sud, 2010)

  • Quatrième de couverture

    « À la santé de la guerre, Frans, car la guerre est une bénédiction. Et le capitalisme a quand même son bon côté, vrai ou pas vrai ? » C’est ce toast étonnant qui clôture Le bateau-citerne, écrit en 1941 et publié l’année suivante, alors que la guerre secoue la planète et expose une des faces les plus ombres du capitalisme.

    Fin de l’été 1939, Jack Peters raconte sa rencontre avec un certain Boorman, qui lui a permis de conclure une affaire en or : sans bourse délier, il est devenu propriétaire du Joséphine, un bateau-citerne ancré à Barcelone et dont la valeur ne manquera pas de décupler avec le début de la guerre. À moins que ce ne soit une arnaque de Boorman … ou que le Joséphine soit en réalité un navire fantôme.

    Hors dess normes et des conventions, Elsschot offre ici une satire percutante du monde des affaires.

    Figure majeure de la littérature européenne, Willem Elsschot (1882-1960) est aujourd’hui traduit dans plus de vingt langues, Le bateau-citerne est son cinquième roman publié au Castor Astral, après le mythique Fromage, Villa des Roses, L’embrouille et Le feu follet.

    Mon avis

    J’ai pris ce livre dans ma PAL parce que j’ai fait des PAL pour emmener dans mon déménagement (avec les nouveautés, les Sherlock Holmes, les George Sand, les Edith Wharton). Alors il me reste les livres que j’ai acheté il y a plus longtemps. En plus, Reka me fait trop envie avec son challenge sur la littérature belge mais comme il y a le temps je verrais pour m’inscrire au début de l’année prochaine.

    Le résultat est que j’ai été obligé d’ajouter Fromage dans ma PAL. Si on résume, cela fait : -1 + 1 = 0. Tout cela avance, me direz vous ! J’ai adoré l’écriture de Willem Elsschot où pointe une distance ironique qui m’a fait sourire à de multiples reprise. La lecture est très fluide grâce à une expression des idées très linéaire (la narration est classique si on veut parler en gros). En plus, l’histoire m’a rappelé les histoires de Sherlock Holmes où des pauvres gens se font dévaliser par des escrocs qui montent de fausses entreprises ! Parce que j’ai cru jusqu’au bout que c’était une arnaque de personnes qui comptaient profiter de la guerre et Jack Peters était une victime. Je pensais que Elsschot allait conclure. Figurez-vous que non ! En plus, il n’y a pas de second volume. Alors on ne sera jamais comment leur montage financier aura survécu à la guerre.

    Je dirais que c’est une belle découverte d’un auteur inconnu jusqu’à là de moi. Fromage a l’air d’être son chef d’œuvre. Il ne me reste plus qu’à lire !

    Livre lu dans le cadre du challenge Littérature Belge chez Reka.

    Références

    Le bateau-citerne de Willem ELSSCHOT – traduit du néerlandais (Belgique) par Marnix Vincent (« Escales des lettres » – Le Castor Astral, 2009)

  • Cet été, ma libraire m’a donné un exemplaire gratuit chez Cahiers Rouges (Grasset) de la nouvelle de Zweig, Le bouquiniste Mendel. Cette nouvelle était déjà paru dans cette collection dans le recueil La Peur. Je n’ai pas refusé bien évidemment et je l’ai donc lu pour vider un peu ma PAL.

    Quatrième de couverture

    Un homme entre dans un café à Vienne et éprouve une étrange sensation de « déjà vu ». Des années plus tôt, il y retrouvait un insolite et remarquable bouquiniste, plongée du matin au soir dans des livres ou des catalogues. La guerre rattrapera cette encyclopédie vivante, cet être isolé du monde extérieur : un personnage tragique.

    Mon avis

    C’est une nouvelle qui se découpe je dirais en deux temps, chacun m’a fait éprouvé des choses différentes : l’admiration et la peine. La première partie nous décrit le bouquiniste Mendel, russe mais sans le savoir. Ce personnage ne se soucie que d’une chose, le catalogage de livres : il est une véritable encyclopédie. Il sait le titre, l’auteur, les différentes éditions, le prix, la disponibilité d’énormément de livres. Ce qui fait qu’il est interrogé par les étudiants qui prépare leur mémoire (les bibliothécaires refusant de les aider). Le bouquiniste Mendel est admiré de tous, même des plus grands.L

    Ce personnage personnellement me fait rêver. Il peut trouver n’importe quel livre ! Imaginez … Je serais ruinée en moins de deux. Alors quand dans la deuxième partie, on apprend ce qu’est devenu le bouquiniste Mendel, on ne peut que ressentir de la tristesse. Un tel homme ne s’intéresse pas à ce qui l’entoure, surtout pas à la guerre (celle de 14-8) qui comme il est dit dans le livre fait que les frontières snt faites de fils barbelés. Alors être un ressortissant étranger dans une Vienne en guerre vous attire des ennuis (il est arrivé à Vienne trente cinq ans avant, ne se soucie d’aucune formalité mais pour lui, il est viennois). Il se retrouve enfermer dans un camp de concentration pendant deux ans, ses relations intervenant pour le sortir de là. Ce séjour l’a brisé : il n’ouvrira plus jamais de livres, de catalogues et mourra peu après.

    Je vous en ai beaucoup raconté mais cette nouvelle doit être parce qu’elle est de Stefan Zweig (j’avoue être fan depuis très longtemps) et est donc écrite, construite magnifiquement. En quarante-cinq pages, nous est livré un texte inoubliable !

    Pour finir, une citation qui dit tout

    Les livres sont faits pour unir les hommes par-delà la mort et nous défendre contre l’ennemi le plus implacable de toute vie, l’oubli.

    Références

    Le bouquiniste Mendel de Stefan ZWEIG – traduit de l’allemand par Manfred Schenker (Les Cahiers Rouges – Grasset, 2010)

  • Présentation de l’éditeur

    Joueur, voleur, buveur, Byon Gangsoé, dont le nom signifie « rigide comme le fer », jouit d’une grande santé sexuelle. Jusqu’au jour où ce vaurien vagabond rencontre une jeune veuve en exil, belle à se damner, sur qui pèse une lourde malédiction : tous ceux qui l’approchent passent de vie à trépas. Après bien d’autres, Byon ne craint pas de braver le sort. Malgré ses dons, il rejoint pourtant la cohorte de moines, saltimbanques, mendiants ou fonctionnaires qui, dans l’espoir d’une luxurieuse union et à leurs risques et périls, prêtent leur concours à de fort picaresques funérailles.

    Cette histoire se passe en Corée, en des temps reculés, alors que les forces de la nature refusent toute entrave morale.

    Un très grand classique de la culture coréenne enfin traduit en français, où la facétie le dispute à la gaillardise, l’insolence à la vigueur du verbe.

    De réputation sulfureuse, à la paillardise bon enfant et à la poésie imprégnée de culture chinoise, ce texte anonyme transmis de siècle en siècle sous la forme orale du pansori (mimodrame chanté à unique interprète) a été fixé sous sa forme actuelle au XIXe siècle, tout comme le Chant de la fidèle Chunhyang.

    L’humour noir dont il est tout entier tissé permet d’inverser le tragique de la mort en une joviale comédie. Magie des mots, alchimie de la littérature !

    Mon avis

    Je n’ai pas vraiment grand chose à dire de plus que l’éditeur sur ce livre à part à essayer de vous communiquez l’enthousiasme que j’ai ressenti à la lecture.

    Ce n’est pas aussi débridé que l’éditeur le laisse entendre : il y a parfois un vocabulaire un peu imagé mais pas plus choquant que ça. Tout est raconté sous la forme d’un conte, mêlant à la fois la narration et les chants. L’ensemble est extrêmement moderne (dû à la traduction à mon avis) notamment au niveau du vocabulaire et de la manière de s’exprimer. Les deux traducteurs ont aussi pensé à ceux qui ne connaissent pas (comme moi par exemple) la culture asiatique, et notamment les textes anciens de Chine et de Corée. En effet, ils ont ajouté de nombreuses notes et une introduction précieuse sur tout ça (j’avoue ne pas trop avoir saisi l’importance du confucianisme et du taoïsme sur la Corée de l’époque).Cela m’a permit de me rendre du lien qui lie la culture chinoise et coréenne à travers les nombreuses références de la seconde vers la première.

    Mon seul regret est que le livre est trop court, une centaine de page. J’aurais aimé continué un peu sur ce chemin mélangé de situations tragi-comiques, où alterne donc pleurs et sourires (on ne parle pas de rire quand il y a des morts). Ce qui peut consoler c’est qu’il y a un autre récit du même genre chez Zulma, c’est le fameux Chant de la fidèle Chunhyang.

    Sur le site de l’éditeur, un lexique qui permet d’entrevoir les thèmes abordés dans le texte.

    Références

    Histoire de Byon Gangsoé – traduit du coréen et présenté par Choi Mikyung et Jean-Noël Jutter (Zulma, 2009)

  • Quatrième de couverture

    Tout le monde connait Sherlock Holmes. Livres et films ont rendu familiers ses méthodes scientifiques, son fidèle acolyte le docteur Watson et même sa logeuse, Mrs Hudson.

    Mais tout le monde ne connaît pas Arthur Conan Doyle. Les années passant, il a rejoint Mary Shelley et son Frankenstein, Bram Stoker et son Dracula au club des auteurs dépassés par leur créature. Pourtant son œuvre littéraire est immense et diverse : histoires policières, romans historiques, nouvelles, contes fantastiques, science-fiction, correspondance, essais. Il a participé à la vie politique, morale, scientifique de son pays, avec une seule idée en tête : respecter les valeurs chevaleresques inculquées par sa mère.

    Tendre et coléreux, généreux et emporté, amateur de science moderne et nostalgique de la chevalerie, persuadé de la grandeur de l’Empire et défenseur des humbles, partisan du droit des femmes à divorcer et opposé aux suffragettes, conservateur et anticlérical, Arthur Conan Doyle est à la fois un homme de l’ère victorienne et un précurseur des temps modernes.

    Mon avis

    J’ai adoré cette biographie d’Arthur Conan Doyle que je recommande pour découvrir le personnage. En effet, Marianne Stjepanovic-Pauly dresse le portrait d’un homme attachant, aimant profondément le genre humain, ayant un caractère bien tranché qui voulait se révéler parfois difficile.

    L’auteur s’appuie sur un travail bibliographique important (elle sélectionne les faits et éclaire notamment les anecdotes connues de tous) et illustre son propos par des citations de Ma vie aventureuse, autobiographie d’Arthur Conan Doyle (qui est dans ma PAL bien évidemment et dont je vous parlerais quand je l’aurais lu). Ce qui est intéressant c’est que les faits et les opinions (sur ce qui est le plus discutable dans la vie de Conan Doyle) sont clairement énoncées comme tels. De plus, il n’y a pas à mon sens de suppositions vaseuses sur un peu tout et n’importe quoi (son opinion de son père Charles notamment) ; quand elle ne sait pas, elle dit clairement je ne sais pas. De cette manière, elle dresse plutôt le portrait de l’homme public plutôt que de l’homme privée (c’est la partie où logiquement elle a le moins d’info).

    Un autre point intéressant de cette biographie est que finalement Sherlock Holmes n’est pas omniprésent. Elle en a parle bien évidemment mais pas trop. Au final vous sortez avec l’envie de lire les autres livres de Conan Doyle (et bizarrement pas de relire le canon holmésien), les aventures du Brigadier Gérard ou celles du Professeur Challenger par exemple.

    Un dernier bonus du livre est qu’il y a un petit dossier avec des textes et images. On peut y lire entre autre un pastiche succulent (sur la mort de Sherlock Holmes) de l’auteur de Peter Pan, J.M. Barrie. À se tordre de rire même si très second degré.

    Je peux vous dire que la dame a aussi écrit une biographie de Simone de Beauvoir chez le même éditeur et du coup, elle me fait bien envie !

    Références

    Arthur Conan Doyle – Sherlock Holmes et au-delà de Marianne STJEPANOVIC-PAULY (Éditions du Jasmin, 2008)