C’est une autre de mes acquisitions de La Procure. Lui aussi est court, 115 pages, et est sorti pour cette rentrée littéraire. Il s’agit d’un premier roman d’une (jeune) femme née en 1981, qui travaille dans l’édition et dans le domaine du livre. Pourquoi ce livre ? Parce que j’ai retourné l’ouvrage à la librairie par pur hasard et que la quatrième de couverture m’a plu. C’est l’avantage de la librairie ; personne ne pourra rien faire contre cela.
Pour ce premier roman, elle a choisi le thème des livres (j’entends ce que vous vous dites « ah, voilà pourquoi elle l’a pris » et ce n’est pas faux).
Un homme, Constantin Caillaud, est parti en week-end avec sa femme Suzanne. Ils se perdent, chacun accuse l’autre (le truc habituel, en gros) et se retrouve par le plus grand des hasards dans la ville de Crux-la-Ville alors qu’ils voulaient aller à Clamecy. À Crux-la-Ville (dans la Nièvre d’après mon ami Google), Constantin se rend à la maison de la presse pour acheter une carte (car le GPS sur le téléphone, il n’y croit plus vraiment), le journal local (car il se régale des anecdotes de ce type de journal) et fureter dans la boutique. Il tombe sur une caisse de livre en solde et commence sans grand espoir à fouiller dedans. Miracle ! Il trouve un livre d’Émilien Petit, THE auteur, mais surtout un livre qu’il ne connaissait pas, Neige noire, alors qu’il pensait avoir lu tous les ouvrages de l’auteur. Il achète le bouquin bien évidemment et le lit le soir-même à l’hôtel quand sa femme dort. La lecture faite, il est évident que le livre est bien d’Émilien Petit. Il décide de faire part de sa découverte, une fois rentré à Paris, à sa maîtresse Hélène, attaché de presse dans le milieu du livre et qu’il a rencontré lors d’une lecture du même Émilien Petit. C’est elle qui a transformé pour Constantin un auteur aimé en l’auteur révéré.
Le problème est qu’il a oublié le livre à l’hôtel (il ne lui vient même pas à l’idée de téléphoner pour savoir s’il y est encore). Hélène ne le croit qu’à moitié mais est surtout amusé de ce prétexte. Elle lui suggère d’entamer une enquête, d’autant plus difficile que l’auteur ne répond à aucune sollicitation. Il écrit à l’auteur, à l’éditeur, aux amis de l’auteur (Olivier Rolin et Antoine Volodine tout de même), relit tous les livres d’Émilien Petit pour chercher des indices (car tous les livres de l’écrivain sont liés). Constantin Caillaud, personnage pépère malgré sa maîtresse, voit sa vie bouleversée par cette découverte, qui tourne rapidement à l’obsession.
Ce livre a été une très bonne lecture, bien évidemment pour l’histoire, mais aussi pour les personnages tous très attachants et bien décrits. L’écriture est plus classique (je dis cela parce que je lis Coeur-Volant de Philippe Bordas, vendu par mon libraire qui a confiance en mes capacités littéraires) mais est très agréable. J’ai déjà parlé de l’histoire et j’espère vous avoir persuadé sur ce point que le livre vaut le coup d’être lu. Je rajouterai qu’il faut y voir un bel hommage aux éditions de minuit (à mon avis), qui sont les éditions du miroir dans le livre, et aux auteurs qui peuvent créer des mondes fascinants et si réels pour les lecteurs.
Le personnage le plus attachant est bien évidemment Constantin Caillaud. Colombe Boncenne décrit très bien un homme normal. Avant de rencontrer Suzanne, il était serveur. Leur vie a été bouleversé par la disparition de l’amoureux de Suzanne, qui était aussi le meilleur ami de Constantin. Ils se sont donc mis ensemble, ont eu deux enfants, des jumeaux. Constantin a donc choisi de changer de carrière pour être plus stable et par relation a commencé à travailler il y a une vingtaine d’années comme comptable dans une imprimerie. Hélène est le piment de sa vie et la lecture et les livres sont moyens d’évasion. Il a ce caractère d’homme passe-partout que rien ne destinait à faire ce type de découvertes. Suzanne est la femme normale d’un homme normal (rien à voir avec notre président, bien sûr). Hélène est plus atypique. Célibataire, sans attache, elle ne cherche pas à perturber la vie de notre couple mais plutôt à s’amuser avec Constantin quand elle en a envie.
Le milieu de l’édition est peuplé de gens friands de jeux littéraires, curieux, à l’écoute du lecteur. La librairie est lieu de rencontre. Cela fait un peu monde des bisounours mais cela fait du bien de lire un livre de quelqu’un qui travaille dans ce milieu et qui ne décrit pas les gens comme obnubilés par leurs relations, leur carrière et qui ont un peu perdu le livre de vue. Colombe Boncenne a gardé son enthousiasme et cela fait du bien.
En conclusion, je dirai que c’est un premier roman réussi. Ce n’est pas un livre-doudou mais un livre qui met de bonne humeur pour les personnes qui aiment quelque peu les jeux littéraires, les livres parlant de livres.
L’avis de Clara.
Références
Comme neige de Colombe BONCENNE (Buchet-Chastel / collection Qui vive, 2016)