J’étais tranquille à la librairie l’autre jour et j’ai vu cet album. Depuis toute petite, la Première Guerre Mondiale m’intéresse (faute à ma mère qui nous a emmené voir plusieurs fois Verdun car c’était assez près de notre maison de vacances). Le titre m’a donc forcément interpellé. En plus, c’est une bande dessinée éditée par une maison d’édition, Roymodus, que je ne connais pas et j’aime découvrir. Vous pouvez découvrir plus à fond cette maison savoyarde sur leur site.
L’histoire est une histoire vraie. Jean Yves Le Naour a d’ailleurs écrit un livre sur le sujet et qui a paru chez Hachette. Au sortir d’un train de blessés, on retrouve un soldat égaré, amnésique et qui ne parle pas. Il est bien sûr inconnu mais bien vivant. Les autorités n’en veulent pas et les administrations se déchargent les une sur les autres. On finit par l’interner et pour le faire parler on lui fait subir le supplice de l’électricité. On en déduit, plus qu’on ne les entend, un nom, un prénom et une ville d’origine. Anthelme Mangin ira donc dans l’asile de la ville de Vichy. Là, une femme, Mme Vaysettes, va le reconnaître comme son frère. On va donc lui rapprocher (le médecin voulait s’en débarasser car il était à charge puisqu’il n’avait pas de pension car son nom n’était pas le vrai) et le mettre à l’asile départemental de l’Aveyron à Rodez. Il va tomber sur LE docteur. En effet, il s’aperçoit très vite qu’il y a méprise puisque le patient n’a pas la bonne taille. Il n’aura de cesse pendant 20 ans de chercher à savoir quelle est l’identité de cet homme.
Il utilisera tous les moyens : la presse, la science, la magie (sans trop y croire), tous les stratagèmes de bon sens. Il découvrira aussi ce que cette guerre a laissé derrière elle. Des familles entières pleurant des disparus, pas des morts mais des disparus. Ces familles sont prêtes à tout pour retrouver les leurs, quitte à reconnaître des gens, à se bagarrer pour les avoir malgré des preuves indéniables. Le comble est que sa « vraie » famille ne pourra pas l’ »adopter » car le seul homme qui travaille a déjà la père et sa fille à charge, alors qu’il est veuf et demandera le placement dans un asile plus proche. Il mourra, ainsi que son père, deux mois après l’avoir retrouvé (plutôt que la justice lui ai donné son frère). Anthelme retournera à l’asile mais la justice, par le truchement de pourvoi en cassation, n’en a pas fini … Cette épreuve marquera le docteur à vie. Anthelme sera un peu comme le fils qu’il a perdu à la guerre.
Le choix du noir et blanc pour les dessins est vraiment parfait. On arrive à sentir le caractère des personnages : l’effacement d’Anthelme, la gentillesse et l’humour du docteur mais aussi la sécheresse des gens qui considèrent la détresse d’Anthelme comme un « emmerdement ». La malheur est bien sûr omniprésent. Les dessins montrent des gens plus recroquevillés mais la foule rend aussi sentiment plus poignant car partagé collectivement.
Vous pouvez voir des pages de cette BD sur le site de la maison d’éditions.
Références
Le soldat inconnu vivant de Jean Yves Le Naour et de Mauro Lirussi (Roymodus, 2012)
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