Comme promis, je reviens aujourd’hui pour vous faire un billet sur le deuxième livre de l’irlandais Paul Lynch, La Neige noire. Je vous ai parlé du premier la semaine dernière (je dis cela pour ceux qui étaient en vacances).
Ce livre se déroule dans les années 50, dans le Donegal, région de naissance de l’auteur. Les personnages principaux sont une famille : le père Barnabas, revenu des États-Unis, après avoir participé à la construction des gratte-ciels du pays, avec dans ses bagages une femme, Eskra, américaine avec des origines irlandaises, et Billy leur fils, qui est adolescent dans le roman. Barnabas a racheté une ferme et des terrains pour devenir paysan. Il a à son service le vieux Matthew Peoples.
Le roman commence avec une scène très violente : l’incendie de l’étable de la ferme, avec toutes les vaches à l’intérieur. En essayant de sauver le bétail, Matthew Peoples va mourir, brûlé, et Barnabas, sauvé in extremis par un voisin, va être très fortement intoxiqué par la fumée. Les voisins compatissent avec la perte des vaches, même si l’assurance va payer, mais lui en veulent aussi de la mort du vieil homme. Surtout que c’est lui qui l’a poussé à l’intérieur de l’étable. Barnabas lui envisage rapidement que l’incendie ait été volontaire car il s’est produit par temps sec, en sortie d’hiver.
Au cours du roman, on va découvrir les petites rivalités entre voisin, le couple va se déliter car Barnabas change, en soupçonnant tout le monde, tandis que Eskra aimerait qu’ils reprennent le cours normal de leurs vies. On va aussi suivre les pensées de Billy par de courts intermèdes dans le texte. On « découvre » aussi le côté très croyant de cette partie de l’Irlande. En effet, quand Barnabas décide, sur les conseils de son voisin, de prendre des pierres de maisons abandonnées pour reconstruire son étable, les autres s’offusquent car ce sont les « tombeaux » des morts de la famine.
Paul Lynch va aborder ces thématiques de manière très singulière, car tout va passer par le ciel et la terre. Si on regarde bien, il ne se passe pas grand chose dans cette histoire (sauf à la fin bien évidemment, qui rappelle un peu celle du premier livre), les sentiments des uns et des autres vont peu évoluer mais la manière dont Paul Lynch va les décrire oui. Tout va évoluer grâce aux saisons, au climat, à la lumière. Là où j’ai trouvé, dans le premier livre, les descriptions climatiques de Paul Lynch, certes, très belles mais un peu lourdes, ici elles sont juste magnifiques. J’ai retrouvé l’Irlande que j’ai visité, il y a déjà 17 ans. Une lumière changeante, avec des passages très sombres, des passages lumineux, une nature rude, parfois accueillante, parfois hostile. Le bandeau de couverture est magnifique car il rend bien cela. Dans le livre, on voit les nuages passés ! On est tout simplement en Irlande. C’est pour cela que ce livre restera très longtemps dans mon cœur !
C’est un livre difficile à lire, plus difficile en tout cas que le premier car il demande beaucoup de concentration pour pouvoir intégrer justement cette langue « minérale » (j’ai pris ce terme dans le supplément de Livre Hebdo consacré à la rentrée car je le trouve très bien choisi). On ne peut pas lire ce livre comme un page-turner, où si on a un moment d’inattention, on peut se rattraper par la suite. J’ai voulu le faire à plusieurs reprises mais dans ces moments-là, j’avais le sentiment que le livre traînait en longueur, alors qu’en reprenant le même passage par la suite, je le trouvais tout simplement magnifique.
Comme vous l’aurez compris, ce roman est fait pour les amoureux de l’Irlande. D’ailleurs la quatrième de couverture cite une phrase de Robert McLiam Wilson « un roman sur une Irlande que je reconnais, et que devraient envier tous les écrivains ».
Références
La neige noire de Paul LYNCH – traduit de l’anglais (Irlande) par Marina Boraso (Albin Michel, 2015)
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