Quatrième de couverture
C’est une véritable course contre la montre à laquelle se livre Honoré de Balzac. En libre précurseur de Phileas Fogg, il entreprend de démontrer que l’on peut se rendre de Paris à Berditchev, en Ukraine, en 6 jours. Ce récit en consigne l’aventure émaillée de ses colères et de remarques savoureuses où il se gausse des Anglais, de l’Allemagne, « le pays le plus tire-laine que je sache », de Berlin, « capitale de l’ennui » qui « a l’air d’un dictionnaire », de lui-même, des Français …
Grand pourfendeur et pasticheur de récits de voyage, Balzac n’aura écrit d’authentique que celui-ci. Mais si sa plume se fait aussi véloce que les trains et les malles-poste qu’il emprunte et aussi cinglante que le fouet de ses cochers, c’est pour mieux dissimuler le véritable motif de son voyage : l’amour de la belle comtesse Hanska.
Mon avis
Le récit du voyage de Balzac est précédé par une introduction où il explique tout ce que l’on peut reprocher aux « voyageurs » qui écrivent leurs voyages comme si ils étaient de grands connaisseurs du pays. Ils ont été de Saint-Pétersbourg à Moscou par la grande route : ils connaissent la Russie. On se rend bien compte de la fausseté de la chose. Balzac n’a jamais écrit de récits de ses voyages sauf celui-ci. Pourquoi l’a-t-il publié ? La quatrième de couverture donne un indice puisqu’elle parle de pastiche. Balzac nous décrit son obsession des horaires pour arriver le plus rapidement possible à son lieu de destination (dont il ne nous dit pas pourquoi il y va). Il nous parle de ses changements de moyens de locomotions, de leurs rapidités, de leurs inconvénients, de la publicité mensongère du chemin de fer à Paris. Il ne prend pas le temps de rencontrer des gens de l’endroit, de parler avec eux (difficile puisqu’il ne parle que français dans des contrées où les gens qui peuvent traduire se font rares). Du coup, il enchaîne les clichés : l’antisémitisme très 19ième siècle, la condition très heureuse des paysans russes sous servitude.
On peut alors penser deux choses : soit un grand écrivain peut être un voyageur comme les autres et ne pas faire mieux que ses contemporains soit que c’est un pastiche très réussi. Je vous laisse juge !
Le contexte
Balzac a commencé une correspondance avec la comtesse Hanska en 1832 et se sont rencontrés dès 1833. Ils tombent amoureux alors que la comtesse Hanska. Il y a promesse de mariage dès lors que le mari sera mort (cela me rappelle Arthur Conan Doyle et sa deuxième épouse). Mais quand la comtesse Hanska se retrouve veuve en 1841, elle somme Balzac de régler ses dettes avant tout mariage. Le récit dont je vous ai parlé avant se situe en 1847 et on comprend que Balzac soit pressé (c’est ce qui me fait douter du côté pastiche en fait). Pour rappel, le mariage se fera en 1850 à Berditchev. Le couple décide de s’installer à Paris. Cela se fera au mois de mai. Le voyage a épuisé Balzac. Il meurt en août.
Références
Russie – Express de Honoré de BALZAC – présentation de François Graveline (Nicolas Chaudun, 2010)
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