Lewerentz, par un de ses commentaires, m’a donné envie d’ouvrir un des Thomas Mann de ma PAL. Comme je n’allais tout de même pas commencer par La Montagne Magique, j’ai choisi ce recueil de deux nouvelles.
La première nouvelle, Sang réservé, est assez connue en France car bien qu’écrite en 1905, publiée en 1921 en Allemagne, elle a été publiée en France en 1931 quelques mois après La confidence africaine de Roger Martin du Gard qui traitait du même thème, l’inceste entre un frère et une sœur. J’ai lu le livre de Roger Martin du Gard (personnellement je vous le conseille) mais le texte de Thomas Mann est totalement différent. On est dans une famille bourgeoise au début du XXième siècle en Allemagne. Le père s’est enrichi à la force du poignet et subit les légères moqueries de ses quatre enfants, Kunz, Marit, Siegmund et Sieglind, qui sont habitués aux choses les plus raffinées. Les deux derniers, nommés d’après la Chanson des Nibelungen, sont des jumeaux inséparables. Or, Sieglind doit se marier très prochainement avec un homme dénué de tout ce qui plaît au goût luxueux des jeunes gens. Pour fêter leurs derniers moments ensemble, ils iront voir un opéra de Wagner qui les transportera.
Écrite en 1925, la deuxième nouvelle a un sujet plus classique. Dans l’Allemagne des années 20, subissant de plein fouet l’inflation, des jeunes gens de bonne famille, d’une vingtaine d’années, invitent leurs amis pour se distraire. Participe à la fête les deux autres enfants des parents âgés de cinq ans, la mère et le père qui s’isole au début de la nouvelle puis se mêle à la fête pour mieux observer la nouvelle génération. Un drame se produit : la petite chérie du père tombe en amour pour un ami de son grand frère.
J’ai énormément aimé ces deux nouvelles, même si clairement pour la première nouvelle, j’ai manqué de références culturelles. Ce qui m’a impressionné, c’est l’écriture de Thomas Mann. Il arrive à recréer le contexte historique de manière très fine en utilisant un intérieur de maison bourgeoise et des relations familiales identiques dans les deux nouvelles. En effet, les deux textes mettent en avant une nouvelle génération décidée à perdre son indépendance par rapport à la précédente : elle veut s’amuser, s’affranchir des convenances, vivre dans l’absolu défini par l’Art et les sentiments. Les parents portent dessus un regard complaisant. Cependant, on sent que tout cela est permis par le fait qu’on est dans un milieu bourgeois. Thomas Mann porte lui un regard attentif mais aussi amusé sur ses personnage et leurs manières de vivre. Il décrit tout très finement et très légèrement en laissant penser au lecteur qu’il ne fait que jeter un coup d’œil dans ces vies, qu’il ne fait que passer.
Références
Sang réservé suivi de Désordre de Thomas MANN – traduit par ??? – préfacé par Jacques Brenner (Livre de poche, 2005)
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