Présentation de l’éditeur
Entre 1973 et 1974, dans une minable bourgade proche de Buenos Aires, des rumeurs d’infiltration marxiste sèment la zizanie chez les petits chefs péronistes. Cela tourne au western absurde, les fantoches de Soriano ne mégotant ni sur la bouteille ni sur le choix des armes (dynamite, camionnette, bulldozer, épandage de matière fécale…) pour arriver à leurs fins. Une tranche subversive, bouffonne, sanglante, de l’histoire argentine, servie par l’un des plus mordants romanciers sud-américains. Italo Calvino ne comparait pas pour rien Soriano à un « Hemingway héroï-comique ».
Mon avis
Le titre anglais est beaucoup plus parlant que le français : A Funny Dirty Little War. Osvaldo Soriano place son histoire dans une bourgade de campagne où il y a énormément de notables, le reste de la population est en arrière plan dans le livre. Il y a le maire, le secrétaire du maire, le maire de la grande ville de la circonscription, les policiers du villages, ceux au-dessus, ceux de la grande ville.
Il y a un moment dans la ville des rumeurs qui insinuent que le maire et son secrétaire ne sont pas des vrais péronistes mais plutôt des sales communistes. Bien sûr, les autres notables veulent les chasser mais c’est sans compter sur la résistance des deux hommes. Chaque camp va réunir une petite armée de partisans autour de lui (civil ou non) et la guerre des tranchées peut commencer : les uns devant la mairie, les autres à l’extérieur.
Au début de la lecture, on se dit que c’est bien ridicule de se lancer dans une guerre alors que la veille, on était encore très amis (c’est un peu le principe de la guerre civile mais c’est quand même ridicule). Les situations sont burlesques, les moyens pour se combattre aussi (un avion qui balance de la merde, il fallait quand même l’inventer), les plans pour se défendre idem. J’ai eu un peu de mal à retenir les prénoms. Je me demandais parfois si tel personnage n’était pas dans le camp adverse avant, et n’était pas juste venu se promener et repartir ensuite.
À un moment, dans la farce, s’infiltre le tragique. Tout le monde meurt, tuer par son voisin, de manière toujours stupide. J’ai trouvé que Osvaldo Soriano avait tendance à décrire la mort comme au cinéma, comme si c’était pour de faux. Quand il y a des scènes de mitraille au cinéma, ceux qui sont touchés, on les voit volés mais on ne s’attarde pas sur eux. C’est exactement cela ; on a l’impression que ce qui se passe est fantoche. La fin a contribue à renforcer mon opinion car personne ne tire de conséquences des dégâts matériaux et humains. Tout le monde part chercher un autre terrain de jeu.
Une fois terminée le livre, il y a une postface. Et là, j’ai compris que tout ce que je venais le lire pouvait être interprété dans le contexte du péronisme. Puisque suivant les époques, il a été à gauche puis à droite. Il a gouverné avec les ouvriers (sans les partis de gauche qu’ils réprimaient), puis sans. De ce que j’ai compris, il y avait ceux qui croyaient dans le nouveau Perón, les autres qui étaient restés à celui d’avant. Tout le monde était péroniste mais d’une manière bien différente. Cela créait des tensions forcément et c’est aussi ce qui est décrit dans le livre. Je me suis demandée à quel point l’auteur était dans le vrai et à quel point il avait exagéré.
C’est pourquoi j’ai déduit de cette lecture qu’il fallait que je revois mon histoire de l’Argentine très fortement pour combler toutes ces lacunes.
Références
Jamais plus de peine ni d’oubli de Osvaldo SORIANO – traduit de l’espagnol (Argentine) par Marie-France de Paloméra – postface de Miguel Angel García (Les Cahiers Rouges / Grasset, 2003)
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