Cecile's Blog

Histoire d'un squelette de Matayoshi Eiki

Continuons encore un peu notre périple au Japon. J’ai pris cette idée de lecture japonaise chez Naina (bien évidemment !)

Présentation de l’éditeur

« Tout commence lorsqu’on exhume le squelette d’une jeune femme emurée vivante en sacrifice au XIIe siècle. Découverte archéologique, mais dans ce village de la lointaine île tropicale d’Okimawa, loin, bien loin du Japon métropolitain, le chamanisme est très puissant et les morts cohabitent avec les vivants. Aussi chacun a-t-il son idée sur ce squelette et sur ce qu’il conviendrait d’en faire. Et lorsque s’en mêle un jeune naïf tout frais débarqué de la préfecture, les rancoeurs et les vanaités familiales pourraient bien venir perturber une histoire d’amour qui avait pourtant bien commencé, à l’ombre des banians et des énigmatiques osements d’une jeune vierge.

Lire Matayoshi Eiki, c’est découvrir un pan méconnu de la littérature japonaise. L’île d’Okinawa n’a été rattachée au Japon qu’à la fin du XIXe siècle, et sa littérature y a une saveur plus proche de la littérature créole que de Kawabata ou Mishima. Autour de la découverte de ce squelette, c’est toute une communauté villageoise qui se dévoile à nous, avec ses coutumes, ses rivalités, ses personnages hauts en couleur, décrits avec beaucoup de drôlerie par l’auteur qui nous initie au passage à maintes traditions de son île natale.

Né en 1947, Matayoshi Eiki, premier auteur d’Okinawa lauréat du prestigieux prix Akutagawa (l’équivalent du Goncourt au Japon), ne s’est jamais absenté plus de trois semaines d’affilée de son île natale et y a le statut de héros national. Il vit aujourd’hui de sa plume et poursuit une oeuvre originale imprégnée des croyances et de la culture okinawaïennes.« 

Mon avis

Pour moi, Okinawa c’était uniquement la bataille de la Seconde Guerre mondiale que l’on cite dans les films américains. Je ne savais pas situer sur une carte, je ne savais pas non plus qu’il y avait un si fort sentiment de différence entre les Okinawaïens et les Japonais métropolitains (et que cette différence se ressente forcément dans la littérature). On apprend cela dans le livre mais on peut aussi glaner quelques informations sur l’Okinawa et le Japon Médiéval. C’est très intéressant et ça ne fait pas de mal ; cela permet se cultiver sur un pays que l’on ne connaît pas forcément (en tout cas moi). En plus, l’énoncé de ces connaissances n’est pas pompeux !

Ce livre, ce n’est pas que ça. Avant tout c’est l’histoire de Furugen Meitetsu qui vient de se faire arnaquer par un de ses collègues (il était professeur de grammaire japonaise) qui lui avait demander de se porter caution pour son appartement. Sa mère, avec qui il vivait, en est morte de chagrin mais lui a quand même laissé beaucoup d’argent (comme une assurance-vie). Il décide de « quitter » Naha, la capitale de l’île, pour le Nord, où il a trouvé un travail sur le chantier de fouille du fameux squelette. Il y rencontre Kotono chef du chantier, scientifique pure et dure pour qui seule la science compte, par rapport à ça les traditions ancestrales ne font pas le poids. Il couche avec elle dès le premier soir. Le deuxième jour, il rencontre Sayoko, fille du propriétaire de l’auberge qui leur fournit les repas. Elle est persuadée que le squelette est son ancêtre et ne comprend pas les gens qui veulent montrer scientifiquement que ce n’est pas le cas. On ne peut faire plus différente que Kotono et Sayoko mais le deuxième soir, Meitetsu couche avec Sayoko. Deux femme en deux soirs. Pour un type qui n’a pas l’air d’un sex-symbol, il aurait du se méfier un peu (quand l’éditeur parle de naïveté c’est un euphémisme). Il se retrouve dès lors embringuer dans une histoire où il doit défendre les convictions de l’une par rapport à l’autre (parce qu’en plus elles sont jalouses). C’est la dualité entre les deux femmes, tout ce qu’elle représente qui est très intéressante dans le livre. L’auteur décrite les causes, les actes et les conséquences des deux positions. Il a l’intelligence d’avoir lancer le débat sans pour autant trancher pour nous permettre de nous faire notre propre opinion.

En conclusion, un bonne lecture enrichissante et dépaysante qui fait réfléchir sur la cohabitation entre science et traditions religieuses.

P.S. pour ceux qui comme moi se posait la question de savoir ce que représentait la couverture : ce n’est pas une femme en habit de giraffe (comme je le croyais avant d’avoir le livre en main) mais la reconstitution d’une silhouette en coquillages (ce qui est plus logique par rapport à l’histoire) !

Références

Histoire d’un squelette de MATAYOSHI Eiki – roman traduit du japonais par Patrick Honoré (Éditions Philippe Picquier, 2006)

 


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