J’adore ces romans de 500 pages où on passe plein de temps. Quand le livre est fini, on a pratiquement l’impression de quitter, pour toujours (ou jusqu’à relecture), des amis.
Ce roman a reçu très récemment le prix mais j’avais décidé de le lire bien avant car cela se passait à Cambridge, en Angleterre. Je ne peux pas résister à cet argument (Oxford et Cambridge me font rêver, que voulez-vous).
Le roman commence par un prélude, où on sait qu’à la fin du roman, on va avoir deux morts. Comme pour tous les préludes, je n’ai compris que les grandes lignes, vu qu’aucun personnage n’est posé. Mais bon, il y aura deux morts dans l’histoire.
On fait ensuite la connaissance d’Oscar, jeune homme de vingt ans, qui a quitté sa famille à 17 ans car il voulait une autre vie. Son père était ouvrier en bâtiment et pensait que c’était la seule chose qui devait compter pour son fils mais celui-ci aurait préféré un monde plus « intellectuel » et surtout poursuivre des études. Il n’a pas pu le faire et travaille comme aide-soignant dans une maison de retraite cossue. Son patient préféré est Bram Paulsen, avec qui il prend grand plaisir à discuter des livres que celui-ci lui prête. Les livres sont signés Descartes … Un jour, Oscar se promène dans Cambridge et entend une musique provenant d’un Orgue. Cela le pousse à rentrer dans l’église où il y a un office. Il fait la connaissance d’Iris Bellwether dont il tombe immédiatement sous le charme. Le musicien est son frère, Eden. De fil en aiguille, il se lie d’amitié avec le frère et la sœur et leur bande d’amis, bande assez restreinte puisque constitué de trois autres personnes, Jane (la petite-amie d’Eden), Yin et Marcus. Il devient le petit-ami d’Iris, qui lui confie ne pas savoir si son frère est malade ou génial. Il croit pouvoir guérir avec la musique. Benjamin Wood fait de cette question une interrogation majeure de son roman : quel pouvoir a la musique ? Or, le docteur Paulsen lui présente Herbert Crest, psychologue qui s’intéresse au médecine alternative mais aussi aux personnalités hors-norme. Crest est lui-même intéressé par les pouvoirs d’Eden puisqu’il est atteint d’une tumeur au cerveau inguérissable.
Benjamin Wood va, au cours de son roman, s’attacher à décrire le milieu de la famille Bellwether, Iris et Eden avec leurs parents, Theo et Ruth, car c’est très nouveau pour Oscar. La musique est donc aussi très présente dans ce livre et c’est à mon avis une des plus grandes réussites de Benjamin Wood car on sent tout l’intérêt qu’il porte à la chose.
J’ai lu plusieurs avis qui disaient que ce livre avait les maladresses d’un premier roman, ce qu’il est soit dit en passant. Principalement, le livre serait trop long. Je ne comprends jamais très bien cette phrase. Je m’imagine toujours une bonne âme couper certains passages ou bien réécrire complètement l’histoire pour qu’elle soit plus nerveuse. Comme je l’ai dit, j’aime bien les gros romans car on a l’impression de suivre les gens. Je ne me suis pas ennuyée une seconde en lisant ce livre. Par contre, je suis d’accord qu’il y a quelque chose qui ne va pas.
Je pense que c’est une question de point de vue. Toute l’histoire est donc racontée du point de vue d’Oscar. On adopte donc sa vision des choses, puisqu’on n’a que celle-là. J’ai eu l’impression d’être une ethnologue en exploration dans les milieux bourgeois de Cambridge. Par exemple, je n’ai pas ressenti l’amour éprouvé par Oscar pour Iris, je n’ai pas ressenti les liens d’amitié qui se sont soit-disant créés entre Oscar, Eden, Iris, Jane, Marcus, Yin. Je n’ai pas trouvé les personnages particulièrement bien décrits dans le sens où je ne me les imagine pas. Je n’ai ressenti aucun lien d’amitié dans le groupe (avec ou sans Oscar). Le personnage d’Eden reste lui aussi très dans l’ombre car finalement, on n’a pas son point de vue. Selon moi, le livre aurait donc gagné à devenir un roman chorale car là, on n’arrive à comprendre que Oscar. Pour compléter, les liens avec Herbert Crest ou le docteur Paulsen semblent véridiques et sincères, comme ceux avec l’infirmière de Crest, Andrea mais ceux avec les Bellwether … non. Je dis pourquoi pas si c’est ce qu’a voulu faire l’auteur. Je ne suis cependant pas sûre qu’il est voulu faire une sorte de roman ethnologique. Il visait soit le roman psychologique, un peu page-turner, soit le roman d’apprentissage, soit un roman sur le pouvoir de la musique à mon avis, soit un roman sur la folie et les personnalités narcissiques. Il a réussi ces passages sur la musique (les passages où Eden joue de l’orgue sont splendides), sur les pathologies psychiatriques mais pas sur la « vraie vie ». Ce n’est donc pas trop long mais surtout il manque quelque chose. Je pense que pour son deuxième roman il devrait plus s’attacher à ses personnages, amplifier le côté humain.
En résumé, c’est un bon premier roman. C’est un roman ambitieux, qu’on ne peut pas lâcher, en tournant les pages sans relâche mais à mon avis, il manque un petit quelque chose au niveau des personnages.
L’avis de Lewerentz
Références
Le Complexe d’Eden Bellwether de Benjamin WOOD – traduit de l’anglais par Renaud Morin (Zulma, 2014)
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