J’ai trois avis de livres passionnants à faire mais je ne résiste pas à partager deux extraits d’une nouvelle de Thomas Mann que je suis en train de lire.
Un extrait sur le fait d’avoir trop de livres.
Il aimait à lire, poursuivant passionnément à travers les mots et les idées je ne sais quel instrument de délivrance. Mais jamais il ne s’était abandonné et perdu dans un livre, comme en un petit univers dans lequel on s’enferme et s’enfouit pour en aspirer l’âme jusqu’à la dernière syllabe. Les livres et les revues pleuvaient autour de lui, et chaque fois qu’il en ouvrait un la foule de ceux qui restaient à lire le sollicitait. Alors, il les faisait relier en maroquin écrasé, marqués d’une belle initiale. Somptueux et suffisants, ils remplissaient sa bibliothèque et alourdissaient sa vie d’un poids dont il ne parvenait pas à se libérer. (p. 38)
Un extrait sur le vide de certaines journées.
[…] parfois, il s’inquiétait vaguement et s’interrogeait sur ce qui véritablement importe. Alors il comprenait combien l’absence de tout but extérieur paralysait son être et le détachait de la vie… L’emploi du temps de la maison semblait avoir été ordonné avec le seul souci de mettre chaque jour en fuite le plus rapidement possible, en rendant insensible le passage des heures vides. Constamment s’annonçait le prochain repas. Pourtant, comme on dînait à 7 heures, les soirées traînaient un peu, mais les jours s’évanouissaient sans laisser de traces, ramenant promptement le retour des saisons. (p39-40)
Est-ce que vous avez lu déjà Thomas Mann ? Je trouve que sa langue est extraordinaire. Il dit à la fois l’époque, le temps, un mode de vie en seulement quelques phrases. Pourquoi dit-on que ses « gros livres » sont très très … trop longs ?
Références
Sans réservé suivi de Désordre de Thomas MANN – introduit par Jacques Brenner – traduit de l’allemand par ??? (Livre de poche, 2005)
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