Cette semaine, j’ai lu l’avis d’Iris sur ce livre, qu’elle a lu dans le cadre d’un semaine spéciale sur cette auteure (semaine organisée par Miss Darcy). Bien sûr, j’avais ce livre dans ma pile à lire, vu qu’il y a deux ans tout le monde en avait parlé en très bons termes, que j’avais été tenté mais que je n’avais rien lu (bien évidemment). Mais là, je ne sais pas, son avis a fait naître une envie irrépressible que j’ai satisfaite le soir même après avoir terminé mon autre livre (Des éclairs de Jean Echenoz pour ceux que cela intéresse). Bien m’en a pris car tout le monde avait raison (Lilly en premier). C’était une lecture magique.
Rosamond Lehamann décrit la préparation à son premier bal d’une jeune fille, Olivia Curtis, qui vient de fêter ses 17 ans. Elle vit dans un tout petit village anglais, en plein campagne, dans une famille assez bourgeoise, ni trop riche, ni trop pauvre. Dans la maison, il y a sa sœur Kate, à peine plus âgée qu’elle qui vient de finir ses études. Elle ne sait pas ce qu’elle va faire de sa vie. Elle présente pourtant une solide détermination et a beaucoup plus les pieds sur terre que sa sœur. Il y a le petit frère James de sept ans, un peu excentrique, un peu gamin, très intelligent mais dont personne ne semble se soucier de l’impliquer dans la famille. Il y a Mrs Curtis, très stricte dans la direction de sa maison et de ses enfants, qui semble s’être marié par dépit avec Mr Curtis. Il dirigeait avant son affaire mais la première guerre mondiale a rendu sa respiration très difficile et il a du céder sa place à d’autres de sa famille, en attendant que son fils prenne la direction de l’usine. Il y a aussi l’oncle (frère du père) qui habite avec eux.
Le roman est séparé en trois partie. Dans la première partie, Rosamond Lehmann décrit la journée d’anniversaire, 17 ans donc, d’Olivia. Du lever au coucher. Cette première partie permet d’introduire l’histoire : c’est ce jour-là que sa mère va lui offrir le tissus rouge qui servira à la confection de sa robe pour le bal organisé par les Spencer, les aristocrates du coin la semaine suivante. Ce tissu rouge marque déjà un événement. Sa mère voulait un tissu pastel ; sa sœur a préféré un tissu flashant (la mère a donc finalement écouté la sœur). Olivia doit donc aller voir la couturière du village pour lui demander de tailler la robe. C’est l’occasion pour l’auteur de nous décrire le village mais aussi ses habitants puisque Olivia va rencontrer plein de monde : veuve, vieilles filles, célibataires (plus ou moins jeune) aux idées mal placées, famille très pauvre avec une multitude d’enfant, couple remarié (après que la femme ait divorcé deux fois). On prend conscience alors qu’il existe une hiérarchie dans le village comme il peut y en avoir dans les romans d’Elizabeth Gaskell ou de Jane Austen. Il y a des choses qui se font et d’autres qui ne se font pas. On l’avais compris avec l’affaire du tissu mais c’est encore plus sensible ici. Pourtant, ce sont les principes de la mère et on sent déjà un changement entre le comportement de la mère et des filles ; les filles sont plus ouvertes et plus tolérantes face aux personnes qui ne sont pas de leur classe sociale. J’ai l’impression que c’est un des points que Rosamond Lehamann a voulu développer : la campagne et les mœurs anglaises sont en train de changer suite aux évènements et aux morts de la Première Guerre mondiale. On s’accroche à des choses du passé mais les choses bougent. Dans cette première partie, on découvre aussi Olivia en tant que personne : jeune fille rêveuse, extrêmement sensible, un peu en attente que sa vraie vie commence, peut être un peu trop gentille. Sa sœur semble plus décidée, plus terre à terre, elle semble aussi plus confiante en elle-même. Elles se rendront ensemble au bal des Spencer.
Pour Olivia, ce sera son premier bal. C’est, comme dans les romans de Jane Austen, son entrée dans le monde. Le problème est qu’à ce genre d’évènement, il faut apporter son cavalier et de tous les hommes du coin, célibataires on s’en doute, aucun ne peut venir ! Mrs Curtis écrit donc à une vieille relation pour qu’elle lui prête son fils, un étudiant d’Oxford pensez-vous. Un fils que l’on n’a pas revu depuis qu’il était poupon. La surprise est qu’il est pasteur, n’aime pas danser … mais cela on ne l’apprend que quand il est sur place. C’est l’objet de la deuxième partie. Cela m’a trop fait penser à Orgueil et Préjugés.
Dans la troisième partie, c’est donc le bal tant attendu. On découvre que les carnets de bal sont encore de rigueur, que les danses sont réservées. Il y a un petit charme désuet à tout cela. Ce bal est l’occasion pour Olivia de découvrir beaucoup de choses sur le caractère humain mais surtout énormément de nouvelles personnes car elle ne semble pas avoir une vie où elle voit beaucoup de monde. Elle fréquente plutôt un cercle restreint comme dirait Mr Darcy.
Ce roman, c’est donc le passage à l’âge adulte d’Olivia, dans un monde en tain de changer. C’est aussi pour elle l’occasion de voir des splendeurs qu’elle ne partagera sans doute pas. Elle souligne que le bal, organisé en l’honneur de Marigold, fille des Spencer, est l’occasion aussi de lui dire adieu puisqu’elle part dans le grand monde et qu’elle, elle, reste à la même place. Pourtant, elles ont été à la même école, et ont fait semble-t-il des bêtises ensemble.
Le seul reproche que je ferais est que la suite de ce livre étant dans ma pile à lire (elle aussi me direz-vous et je répondrais un oui innocent), j’ai donc lu la quatrième de couverture de cette suite Intempéries où il est clairement écrit qu’il y a une passion commune entre Rollo, frère de Marigold, et Olivia, qui peut être se concrétisera dans cette suite. Je n’étais donc qu’attente ! Cette passion commune ne pouvait qu’être développée dans L’invitation à la valse. Ben non. Il arrive dès le début de la troisième partie, du bal donc, où Olivia le repère de suite mais ils ne se parlent qu’à la page 220 ! Et pour franchement ne rien se dire qui montre une quelconque passion amoureuse. Une communauté de pensée peut être mais en quinze minutes que peut-on dire ! J’ai lu ensuite la quatrième de couverture de l’édition 10/18 où on parle d’un érotisme voilée présent dans le livre. C’est vrai que Rosamond Lehmann fait taire ou rougir, selon, ses personnages dès qu’il y a une allusion un peu graveleuse. On ne parle pas de sexe, pas d’alcool … Olivia ne comprend pas tout de suite ; on voit qu’elle est vraiment innocente, qu’elle est dans l’ignorance de ces choses. Elle comprend cependant à retardement ; son premier bal participant à l’élever au stade d’adulte. Du coup, je me suis demandée si je n’avais pas vu sa rencontre avec Rollo avec ses yeux à elle car ce n’est pas ce moment de la soirée qu’elle semble retenir en conclusion du roman. Elle semble ne retenir que les rencontres, bonnes ou mauvaises, avec des personnages nouveaux qui pourtant semblent pour beaucoup habiter très près d’elles. Elle retient aussi la rupture que ce bal a provoqué dans sa relation avec sa sœur. Celle-ci ne désire plus la prendre comme confidente après la soirée (elle lui préfère Etty la cousine londonienne pour raconter les moments de bonheur qu’elle a connu pendant le bal avec Tony Hériot, cavalier dont elle rêvait avant le bal). Elle savait cette séparation inévitable puisque la semaine d’après Kate partait à Paris mais elle note que c’est ce bal qui a provoqué ce changement et qui la rend donc adulte.
Maintenant, je vais lire Intempéries pour savoir cette histoire avec Rollo ! Non, mais.
Références
L’Invitation à la Valse de Rosamond LEHMANN – traduit de l’anglais par Jean Talva (Livre de poche, 1958)
P.S. : J’ai bien rigolé avec les Hullo ! Hullo ! du traducteur. C’est peut être l’époque qui veut de franciser les mots anglais mais cela m’a fait rire à chaque fois (et il y en a beaucoup).
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