J’ai trouvé ce livre mercredi dernier à la bibliothèque, pas vraiment par hasard, mais plutôt grâce à un coup de pouce des bibliothécaires qui avait exposé ce livre sur une étagère sans raison particulière ; il n’est pas neuf, n’a pas d’actualité, ne rentre pas dans une thématique. Et franchement, ce livre est absolument formidable (en tout cas pour moi). Je l’ai commencé dans le RER et je ne pouvais plus le lâcher.
Le narrateur revient nettoyer la maison de campagne, qu’il a occupée avec sa femme pendant quelques années. Suite à leur rupture, ils ont en effet décidé de la vendre et c’est lui qui se charge de la remettre en état. Pour les deux protagonistes, il s’agissait d’un second mariage et ils ont tout de suite, en tout cas le narrateur, ressenti une réelle passion l’un pour l’autre, la passion devenant rapidement exclusive, virant à la jalousie pour le narrateur. Ces sentiments sont exacerbés par la maison de campagne elle-même. Située à la frontière suédo-norvégienne, malgré la proximité d’une zone commerciale importante, elle est une sorte de paradis isolé du monde extérieur (sauf à vouloir retrouver le monde extérieur), avec son lac pratiquement privé, puisque les voisins sont suffisamment loin pour ne pas gêner.
Comme vous l’aurez sans doute deviné, l’histoire est racontée uniquement du point de vue du narrateur. Le texte alterne entre les étés précédents, où le narrateur se remémore les moments heureux de son mariage, et l’été actuel, où le lecteur constate que le narrateur n’a pas compris les raisons de la rupture. Il soupçonne que Siri, l’été précédent, ait eu une liaison avec un des estivants d’une maison voisine, qui veut d’ailleurs aujourd’hui lui acheter la maison.
Le lecteur est forcé d’adopter le point de vue du narrateur et se prend à chercher les signes d’infidélité de Siri. Au fur et à mesure que le récit progresse, trop de signes apparaissent. La pauvre Siri accumule les contrariétés et problèmes : un bijou qui disparaît, des paroles malheureuses… On comprend que Siri ait eu besoin de s’extraire du cocon de la maison par de longues balades à vélo. Le lecteur prend alors un point de vue plus neutre, moins empathique ; il se met en position d’observateur (ou de voyeur car on est parfois réellement dans l’intimité du couple). Sauf que l’auteur est joueur ! Il ne change jamais son mode de narration. Le narrateur sera toujours l’homme et on ne sera jamais réellement ce qu’il s’est passé pendant l’été dernier et l’année qui a suivi. Après bien sûr, cela permet d’avoir sa propre théorie en tant que lecteur. C’est l’éternel dilemme entre fin ouverte ou fermée !
Qu’est ce qui fait de ce livre un très bon livre, un formidable moment de lecture et pas seulement une pathétique histoire de couple, où le lecteur devient un voyeur ? L’écriture, voyons ! Niels Friedrik Dahl recrée l’atmosphère à l’intérieur du couple, mais surtout l’inscrit dans un environnement à la fois idyllique et oppressant. On ressent l’isolement, la chaleur de l’été, la magie des lieux. Cela a été pour moi jusqu’à être exaspérée, comme les deux protagonistes, par l’agitation du monde extérieur, qu’ils redécouvrent lors des visites dans la zone commerciale.
Pour finir, je signale que Niels Fredrik Dahl, écrivain et journaliste, est à la ville Monsieur Linn Ullmann, dont j’avais lu en 2011 Je suis un ange venu du Nord où il y avait aussi des sentiments exacerbés en vase clos. J’espère que ce roman est réellement un roman… Sinon je m’inquiète pour eux.
Références
L’été dernier de Niels Fredrik DAHL – roman traduit du norvégien par Céline Romand Monnier (Actes Sud, 2007)
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