J’ai été samedi au Divan .. ah ! (officiellement pour aller à la bibliothèque et aussi acheter du café et un livre).
Je suis tombée sur ce livre et je l’ai pris pour plein de raisons (raisonnables bien évidemment) : j’aime beaucoup la couverture, je ne connaissais pas la maison d’éditions, je ne connaissais pas l’auteur, cela faisait longtemps que je n’avais pas lu un livre d’Amérique du Sud et le résumé était très dynamique (en tout cas la première partie) :
Le 19 décembre 1986 Olaf Krause reçut un coup de fusil en pleine jugulaire alors qu’il participait à une partie de chasse aux lapins dans la propriété des Kunz. L’attaque mit un point final à la vie d’Olaf Krause et fut classée par la police et les médias dans les faits divers tragiques. Tania Cayupi, la compagne du citoyen allemand à cette époque, confia lors de l’enquête qu’une semaine avant de mourir, Olaf Krause lui avait fait part de son projet de révéler publiquement et à la communauté internationale les aberrations commises dans le sous-sol du collège.
Cela ne ressemble pas trop à un thriller ? En fait pas du tout. C’est un des livres les plus étranges que j’ai lu et pourtant je n’ai pas pu le lâcher !
Le livre est séparé en deux parties : la première raconte l’histoire de Sylvana Kunz, descendante d’immigrés allemands, ayant une grosse fortune, et dont le père faisait partie de la direction du Collège allemand de Temuco, où se sont passés les fameuses aberrations dont parlent le résumé ; la deuxième partie raconte principalement la vie du fils de l’agent d’entretien chargé de la surveillance du sous-sol, même si la vie du père est évoquée. On a donc deux points de vue, venant de deux communautés différentes.
Sylvana Kunz était une enfant capricieuse, qui s’est mariée à un homme, un journaliste, qui sera à l’origine du scandale sur les atrocités du sous-sol (il sera assassiné dans une chambre d’hôtel). Pourtant, l’auteur nous montre son futur qui ne sera que brillant, jusqu’à un certain point, où les apparences tant protégées éclateront. Cette partie est fascinante pour le lecteur. L’auteur nous tient par le suspens, sur le pourquoi du décès de Olaf Krause, sur la nature des pratiques du sous-sol. Pourtant, il écrit d’une manière à perdre son lecteur : il mélange les trois périodes (présent, passé, futur) de la vie de Sylvana, en exagérant pas mal sur le futur. Chaque « période » est séparée par trois petites étoiles qui indiquent le changement, mais jamais je ne me suis jamais retrouvée perdue pour savoir où j’étais temporellement. Une autre chose sur cette première partie est le fait que le lecteur ne sait pas où l’auteur veut en venir. Il semble tourner autour du suspens, de l’élément important. Quand je lisais, je regardais la deuxième partie arrivée (où j’avais bien vu que les protagonistes de la première partie, surtout Sylvana, ne revenaient pas) et je ne comprenais pas ce que l’auteur voulait montrer, ce qu’il voulait dire.
La deuxième partie est plus conventionnelle au niveau de la narration. Elle est aussi est menée en trois narrations : la vie du père, la vie pathétique du fils, devenu professeur-assistant de droit, la vie virtuelle de celui-ci. En effet, il entretient une correspondance avec une femme vivant aux États-Unis et qui vend ses charmes sur internet. Le père a une conscience qui lui dit que ce qui se passe dans le sous-sol n’est pas moral et est, et sera toujours, très gêné par cela, même s’il n’est jamais intervenu car il a baissé la tête devant son chef, tout simplement. Malgré le fait qu’il est meilleur que le père Kunz, sa vie ne sera pas meilleur et son fils ne sera pas meilleur (ni sa vie) malgré toute sa soumission (sa vie est à mettre en parallèle avec les exploits de Sylvana dans la première partie).
Cette deuxième partie m’a fait voir le livre d’une autre manière. L’auteur n’a pas du tout voulu faire un thriller, un livre glauque sur des exactions de migrants, mais bien comme le dit la deuxième partie de la quatrième de couverture (que je n’ai pas lu dans la librairie), une histoire sur un siècle « de la région rurale du sud du Chili, modelée par la rencontre du Mapuche, du Chilien et du Colon ». Quand on lit le livre de ce point de vue, les détails auxquels on porte attention sont tout autres. C’est l’évolution des générations qui commencent à intéresser, la différence de vies mais aussi les jeux d’apparences et de pouvoirs qui mènent la petite et la grande Histoire.
Je trouve cependant que c’est un livre difficile d’accès pour un lecteur, on va dire, occidental. On peut lui faire dire n’importe quoi (ce n’est qu’ici mon interprétation, guidée par la quatrième de couverture tout de même) ou même complètement passé à côté, tant à cause de l’histoire, tant à cause de l’écriture.
Quand je vous disais que c’était un livre étrange !
L’avis de Nathalie
Références
L’extinction des coléoptères de Diego VARGAS GAETE – roman traduit de l’espagnol (Chili) par Julia Cultien (L’atelier du tilde / Tadeys, 2015)
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