Quatrième de couverture
Pascal Duarte rédige ses Mémoires en attendant la mort dans la prison de Badajoz. Il écrit pour le meilleur ami de sa dernière victime, et raconte sa vie, ses erreurs, les femmes qu’il a aimées ou haïes, les épreuves traversées. Derrière les mots s’élève la voix d’un innocent, coupable d’être né dans une famille déchirée, au cœur d’un pays ravagé par la guerre civile [pour de vrai, les derniers mots sont faux car la narration s’arrête en 1922, au moment où il assassine sa mère. Son dernier crime, l’assassinat du noble du coin, sera fera bien par contre pendant la guerre civile mais Cela ne nous en parle pas].
Mon avis
La première fois que j’ai entendu parler de Cela et de Pascal Duarte c’est quand un critique de feu l’émission Jeux d’épreuves a dit que le Nada de Carmen Laforet était le deuxième ouvrage espagnol le plus traduit au monde après La famille de Pascal Duarte de Camilo José Cela. Je me suis dit ahhhhh comme si j’avais eu une révélation. Après, j’ai cherché et monsieur Wikipédia m’a dit Cela a été Prix Nobel de Littérature en 1989. Du coup, j’ai mis le livre dans ma PAL. Un an et demi après, sous le coup des 12 d’Ys, je le lis.
C’est franchement bien (on le lit sans déplaisir, on ne peste pas …) mais c’est une déception. C’est un premier roman de Prix Nobel tout de même, paru en 1942 (la préface souligne que c’est la même année que L’Étranger (j’ai pas trop aimé non plus d’ailleurs même si à la deuxième lecture j’ai trouvé cela mieux)(j’attends la troisième) et que les deux narrateurs tuent leur mère)(on voit les rapprochements que l’on veut). Quand on remet dans le contexte (de bien-pensance, de la fin de la guerre civile …), il apparaîtrait que le livre aurait fait polémique. Vu notre époque, le livre a bien vieilli et a donc perdu ce parfum de scandale. Avec ce livre, Cela inaugure un style, le tremendismo. La définition du Dictionnaire des Littératures Hispaniques (Bouquins, 2009) est « présentation brutale de la réalité dans un langage volontairement cru » (de langage cru, je parlerais plutôt de langage sans fioriture, direct et franc). Là aussi, le texte a perdu ce côté sulfureux qui a du l’accompagner à sa sortie.
Quand on enlève tout cela, que reste-t-il ? les Mémoires d’un homme qui est mal né, à qui la vie n’a pas fait de côté et qui dès qu’il a une contrariété tue la personne qu’il a en face de lui. Il justifie ses crimes par la fatalité de sa naissance. Pour ce qui est des malheurs, Cela a fait preuve de beaucoup d’imagination : le père est un taiseux, il mourra de la peste après avoir été mordu par un chien, la mère est une alcoolique et une méchante, la sœur cadette est gentille et deviendra donc une prostituée exploitée par son mac, le petit frère est simplet, se fera croqué les oreilles par un cochon et se noiera dans un fond d’huile. Pascal Duarte fera l’amour à sa première femme en la violant, ils se marieront donc car la jeune femme est enceinte. Trois jours après le mariage, elle tombe de cheval et avorte (la réflexion de Duarte est que franchement, cela ne valait pas le coup de se marier). Elle retombera enceinte ; le petit mourra au bout de 11 mois. Pascal, écœuré par le peu de compassion des trois femmes de sa vie, s’en ira sans rien dire pendant deux ans. Quand il revient, sa femme est de nouveau enceinte (pas de lui du coup)(et le pire c’est qu’il ne comprend pas pourquoi). Il la somme de dire qui est le père. Il s’agit du mac de la sœur de Pascal ; la femme meurt en lui faisant cette déclaration. La chose qui est bien c’est quand il explique qu’avoir tué sa mère l’a soulagé ; c’est peut être la seule fois où on a l’impression de comprendre quelque chose à Pascal Duarte.
Un point positif du livre : les dialogues. Très rythmés, ils relancent la narration en mettant Pascal Duarte avec son entourage.
En conclusion, le Dictionnaire des Littératures Hispaniques (Bouquins, 2009) dit :
La vision du réel qu’il propose se situe à cheval entre l’individuel et le collectif, entre l’existentiel et le structurel, la violence des hommes reflétant celle d’un paysage hostile et dévasté.
Et là, je me dis que quelque chose a du m’échapper (ce qui me rassure un peu, c’est que la personne qui a rédigé la notice biographique de Cela n’a pas trop l’air de le porter dans son cœur non pus). Je suis tenace et je lirais La Ruche qui m’a l’air un peu plus intéressant.
Références
La famille de Pascal Duarte de Camilo José CELA – traduit de l’espagnol par Jean Viet – présentation par Albert Bensoussan (Points Seuil, 1997)
Livre lu dans le cadre des 12 d’Ys dans la catégorie Prix Nobel de Littérature (j’en relirais sûrement un autre dans cette catégorie, genre Herta Müller ou Mario Vargas Llosa qui m’ont plus l’air dans mes cordes).
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