C’est la troisième adaptation du Portrait de Dorian Gray que je lis en bandes dessinées et c’est celle que je trouve la plus réussie.
L’histoire est bien évidemment respectée (avec quelques ajouts mineurs) même si la partie sur la vie de Dorian Gray entre la mort de Sibyl Vane et le meurtre de Basil est occultée rapidement. Enrique Corominas a pris le parti de changer la structure du roman pour prendre celle d’une pièce de théâtre en cinq actes, précédés d’un prologue introductif (Dorian parle à son chat pour lui expliquer toute l’histoire) : Papillon (acte I), Masque (acte II), Livre (acte III), Poignard (acte IV), Champagne (acte V). Chaque début d’acte débute par le portrait qui se dégrade au fur et à mesure. J’ai aimé que l’auteur ne fasse pas une bête retranscription du livre mais se l’approprie pour nous donner sa vision. Ce qui m’a beaucoup plus aussi c’est qu’il resserre l’action autour de Dorian Gray, de Sibyl et fasse moins intervenir Lord Henry et ses aphorismes, finalement comme si l’histoire parlait d’elle-même et que les bons mots ne servaient qu’à masquer le propos. Ce qu’il y a aussi de très intéressants c’est les références directes au livre de Huysmans et aux illustrations de Salomé faites par Beardsley. L’auteur dit dans sa postface qu’il s’est inspiré d’autres artistes de l’époque mais je ne connais pas (et ne peut donc pas en parler).
Les illustrations sont aussi très intéressantes et parle beaucoup. Ce qui m’a le plus marquée (mais peut être est-ce que je me fais des idées), c’est que les images sont comme aspirées par le haut alors que le visage de Dorian Gray (avec sa forme de triangle inversé) est lui aspiré vers le bas. Pour Lord Henry, c’est un peu la même chose. Pour les autres personnages et les intérieurs, le dessin est plus en rondeur, plus dans l’onirisme. Les décors extérieurs sont eux plus dans l’impressionnisme, plus suggérés. Chaque case est à mon avis comme un petit tableau.
Corominas dit dans la postface qu’il a aussi fait varier les couleurs du plus clair, pour le premier acte, au plus foncé pour le cinquième. Je nuancerai en disant que les couleurs varient bien mais de manière moins tranchée. Le premier acte est dans les couleurs bonbons, un peu féérique, le cinquième est bien sombre mais le troisième a des couleurs très cosy je trouve, très « je me retrouve chez moi, tranquille, après qu’on se soit suicidé pour moi ».
En gros, j’ai beaucoup aimé.
BD lu dans le cadre du challenge Born To Be Wilde de Lou.
Références
Dorian Gray de Enrique COROMINAS – traduction de Carole Ratcliff (Galerie Daniel Maghen, 2011)
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