Baby Spot de Isabel Alba

babyspotisabelalbaBaby Spot est un texte court (93 pages) de la scénariste et photographe (et donc maintenant écrivaine) espagnole Isabel Alba. Il est indiqué au début de l’ouvrage que « baby spot » est le petit projecteur de lumière incandescente utilisé sur les tournages cinématographiques. Dans ma tête, je m’imaginais donc deux types deux livres : soit l’écriture était très cinématographique, soit le texte allait braqué une sorte de projecteur sur une histoire (et donc laissé dans l’ombre d’autres choses). Au vu de la couverture, j’ai penché pour la deuxième hypothèse.

En fait, non ; c’est tout simplement les deux. Le narrateur de l’histoire a douze ans et ressent le besoin d’écrire dans un cahier (que nous lisons) ce qui lui trotte dans la tête depuis le décès par pendaison d’un copain (d’une connaissance) de son quartier, ce qui le travaille en fait. On peut qualifier l’événement de traumatique (on le serait à moins) et donc l’écriture de l’enfant est heurtée, il ressasse beaucoup et fait de multiples digressions pour ne pas écrire ce qu’il ne veut pas admettre.

C’est l’occasion pour le lecteur de découvrir la vie d’un quartier pauvre en Espagne. La mère du narrateur s’est fait quitté par le père, mais a retrouvé depuis un autre homme qui a été obligé d’accepter un bébé. Le beau-père est violent, la mère pleure tout le temps et la petite-sœur a un retard mental. Le narrateur l’aime plus que tout et nous le dit dès le départ mais mettra plus de temps à dire qu’elle est retardée ; c’est un exemple d’informations qu’il peut retenir. En l’écrivant, je me rends compte que si on suppose que c’est lui qu’on lit son récit, il est logique qu’il ne le dise pas tout de suite, vu que pour lui c’est évident. Je ne sais pas, du coup.

Le narrateur a un meilleur ami, avec qui il va faire toutes les bêtises possibles et inimaginables, qui lui a un grand frère, qu’ils admirent tous les deux car il est le caïd du quartier (en tout cas, il passe pour aux yeux des enfants). Les deux frères ont une mère passablement inquiète et un père qui ne les voit plus, tellement il boit, au bar du quartier, tenu par un ex-taulard et sa sœur. Les gamins y vont pour se rafraîchir mais aussi pour regarder des films à l’œil (c’est une des passions du narrateur : imaginer sa vie comme si elle se passait au cinéma, pas en continu mais par scènes ; cela conditionne l’écriture du cahier que le lecteur lit). Il y aussi le flic du quartier qui semble plus trafiquer que travailler.

Dans tout ce petit monde, il ne semble y avoir qu’une seule famille « normale » : Lucas, le garçon qui va donc mourir pendu, et sa mère, qui est seule depuis le décès de son mari. C’est à mon avis cette normalité qui va faire que les choses se sont passées telles qu’elles se sont passées.

Qu’est ce que j’ai pensé de cette lecture ? Ben, je ne sais pas. J’ai aimé plein de choses, mais il manque un truc que je n’arrive pas à identifier. J’ai peut-être un sentiment de pas assez. J’ai aimé l’histoire, même si je me doutais du final. J’ai apprécié le fait que le garçon reste seul face à son histoire parce que justement, il est dans une famille un peu dysfonctionnelle (comme on dit de nos jours). Mais je n’ai pas accroché à la manière dont l’histoire est racontée ; j’ai aimé les digressions mais pas les ressassements qui rapportent les faits détail par détail et donc trop lentement.

L’écriture et la traduction sont belles mais c’est trop adulte pour un enfant de douze ans. J’ai adopté le point de vue, la vie du narrateur mais je n’ai pas ressenti ses sentiments. Ils ne sont pas suffisamment décrits ni suffisamment nombreux : une seule manière de voir est adoptée mais le narrateur n’oscille pas entre plusieurs états, alors que cela aurait été logique (d’un autre côté, cela aurait dévoilé la fin plus vite).

Peut-être que tout simplement, j’aurais aimé lire un texte plus long, plus fourni. Ou peut-être suivre plusieurs personnages. J’ai noté le second roman de l’auteur, qui est paru avant aux éditions La Contre Allée, qui est plus long et qui semble en plus correspondre totalement à mes goûts.

Références

Baby Spot de Isabel ALBA – traduit de l’espagnol par Michelle Ortuno (Éditions La Contre Allée, 2016)


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